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ZE LORD OF THE RING

ZE LORD OF THE RING
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Derniers commentaires
3 juin 2012

PLAN 9 FROM OUTER SPACE

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RÉALISÉ PAR | ED WOOD.
ÉCRIT PAR | ED WOOD.

GREGORY WALCOTT | Jeff Trent.
MONA McKINNON | Paula Trent.
DUKE MOORE | Lieutenant Harper.
TOM KEENE | Colonel Edwards.

Des extraterrestres appliquent le plan 9 destiné à manoeuvrer les Terriens. Plan diabolique, il consiste à la résurrection des morts en introduisant des électrodes à longue portée.

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On souhaite la bienvenue a notre nanardeux favori, ALICE IN OLIVER, qui signe aujourd'hui sa première critique sur ZE LORD OF THE RING! - ZE RING-


Film culte s'il en est. J'ai nommé PLAN 9 FROM OUTER SPACE, réalisé par Ed Wood en 1959. Ne cherchez plus ! Vous avez devant vous le film le plus nul de toute l'histoire du cinéma, un titre qu'il partage avec TURKISH STAR WARS de Cetin Inanç.
En vérité, PLAN 9 FROM OUTER SPACE ne gagnera sa réputation de film culte que dans les années 80. Dans un livre consacré aux pires inepties du cinéma, les deux auteurs, Michael et Harry Medved qualifient PLAN 9 FROM OUTER SPACE comme étant le pire film jamais réalisé.
Cette série Z commence à faire parler d'elle et Ed Wood devient à jamais le plus mauvais cinéaste que le septième art ait porté.
Pourtant, le réalisateur ne profitera jamais de cette gloire tardive puisqu'il meurt à la fin des années 70.
A l'origine, le film devait s'intituler GRAVE ROBBERS FROM OUTER SPACE mais Ed Wood devra revoir sa copie afin de satisfaire les producteurs.
D'ailleurs, ce sont les anecdotes autour de cette série Z qui font tout le charme de ce film de science fiction cocasse, fun et totalement involontaire.
A la fin des années 50, Ed Wood est un réalisateur à la dérive. Ses précédents longs-métrages ont faire un bide commercial.
Aucun producteur ne veut financer ses films et personne se semble reconnaître son talent.
Mais peu importe, le cinéaste semble transporté par une foi inébranlable. Avec PLAN 9 FROM OUTER SPACE, Ed Wood espère enfin signer son chef d'oeuvre absolu, le film qui le consacrera enfin parmi les grands réalisateurs d'Hollywood.
Hélas, le tournage du film sera un véritable casse-tête pour le cinéaste. Ed Wood devra faire appel à l'Eglise Baptiste pour réaliser PLAN 9 FROM OUTER SPACE.
Le cinéaste et son équipe sont donc obligés de se faire baptiser afin de satisfaire les producteurs.

plan 9a

Pire encore, l'acteur fétiche du réalisateur, Bela Lugosi, meurt peu avant le tournage. Ed Wood reste inconsolable.
Mais encore une fois, peu importe, Ed Wood veut lui rendre hommage et poursuit la réalisation du film. Pour cela, il intègre quelques séquences tournées avec l'acteur dans le film. Bela Lugosi n'est plus mais il sera la star de PLAN 9 FROM OUTER SPACE.
Ed Wood est obligé alors de trouver un sosie de Bela Lugosi pour le remplacer.
Certes, le réalisateur semble frappé par la pseudo ressemblance entre le chiropracteur de sa femme et l'acteur. Hélas, Ed Wood est bien la seule personne à trouver quelque ressemblance avec l'acteur décédé.
Mais encore une fois, peu importe, le faux sosie cachera son visage avec le bout d'une cape noire. Voilà pour l'ensemble des anecdotes qui entourent le tournage de cette série Z sans le sou mais réalisée par un cinéaste passionné.

plan 9

Toutes ces anecdotes sont importantes puisqu'elles permettent de comprendre l'essence même de ce film, ce qu'il va représenter par la suite dans le cinéma en général, et dans l'univers du nanar en particulier.
ObjectivementPLAN 9 FROM OUTER SPACE n'est pas le plus mauvais film de toute l'histoire du cinéma. Par exemple, TURKISH STAR WARS, que j'ai déjà cité, le dépasse largement en terme de nanardise et de médiocrité.
En vérité, PLAN 9 FROM OUTER SPACE contient tous les ingrédients qui font le sel et le charme du nanar absolu et involontaire.
Cette série Z apparaît surtout comme un film réalisé par un auteur farfelu mais incapable de transposer ses délires et ses fantasmes oniriques sur pellicule.
Pour faire court, rien ne va. PLAN 9 FROM OUTER SPACE est bourré de défauts: scènes totalement incohérentes, dialogues à se pisser dessus, mauvais montage, faux raccords, effets spéciaux médiocres, même pour l'époque, et des acteurs à la dérive font partie du menu fretin.
Même remarque pour le scénario qui a le mérite de résumer parfaitement l'excentricité de son auteur: des extraterrestres aux vils intentions appliquent un plan diabolique (le plan 9) et réveillent les morts afin que ces derniers tuent les personnes encore vivantes sur la Terre. Dans ce désastre filmique, Ed Wood varie les hostilités entre des soucoupes volantes en carton, des zombies moisis, des flics à la dérive et parfois la même séquence se déroulant successivement de jour comme de nuit sans aucune cohérence narrative.

Plan-9-from-Outer-Space1

Quant aux morts-vivants censés envahir la Terre, ils sont au nombre de quatre. Pour les extraterrestres de service, il faudra se contenter d'acteurs en pyjama et peu concernés par leurs personnages.
A aucun moment, Ed Wood ne parvient à maîtriser son film. Que ce soit les effets spéciaux, les acteurs et encore la mise en scène, tout semble inéluctablement lui échapper. Paradoxalement, ce sont aussi tous ces défauts qui rendent PLAN 9 FROM OUTER SPACE aussi amusant.
Et c'est aussi cela le cinéma. Personnellement, j'adore cette série Z autant pour ce qu'elle est et autant pour ce qu'elle montre, même si certains esprits chagrins n'y verront aucun intérêt. Mais peu importe en fin de compte.
Plus que jamais, Ed Wood reste un cinéaste hors norme, passionné et persuadé que son prochain film bouleversera le septième art.
Peu importe la misère, des conditions de tournage difficiles, Ed Wood portera cette passion inébranlable jusqu'au bout et jusqu'à son dernier souffle.
De son vivant, il ne connaîtra jamais la célébrité. Bien triste fin pour ce zeddard qui sombrera dans la solitude, dans l'oubli et dans l'alcoolisme.

Si à la vision de ce nanar, vous avez ri (ce dont Oliver ne doute pas), voici quelques nanars qui puent.

  • LES RATS DE MANHATTAN de Bruno Mattéi.
  • TURKISH STAR WARS de Cetin Inanç.
  • KING KONG 2 de John Guillermin.

-ALICE IN OLIVER-

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17 mai 2012

HISTOIRES DE CANNIBALES

Jaquette

RÉALISÉ PAR | TSUI HARK.
ÉCRIT PAR | TSUI HARK ET ROY SZETO.
MUSIQUE COMPOSÉE PAR | FRANKIE CHAN.

NORMAN CHU | Agent 999.
EDDY KO | Le chef.
MELVIN WONG | Rolex.
KWOK CHOI HON | Pickpocket.
MO-LIN CHEUNG | Eileen.

Un agent secret (Norman Chu) traque un voleur (Melvin Wong) jusque dans un village peuplé de cannibales.

1


Si THE BUTTERFLY MURDERS, le tout premier long-métrage de Tsui Hark, fut un grand succès critique, il en demeura un échec commercial retentissant. Cet échec parait évident à la vision du film en question, ce dernier étant une oeuvre radicale, violente et subversive, détournant sans gêne les codes du Wu Xia Pian pour mieux les renouveller... Hark poussera ce concept encore plus loin avec HISTOIRES DE CANNIBALES, dont le tître original, WE'RE GOING TO EAT YOU, annonce dès le départ la couleur. HISTOIRES DE CANNIBALES est une oeuvre profondément subversive et provocatrice, complètement irrévérencieuse vis-à-vis des codes narratifs des genres que Tsui Hark y exploite (et tant mieux) et, une fois de plus, un échec commercial mais aussi critique retentissant... Oeuvre jugée scandaleuse et de très mauvais goût en son temps, HISTOIRES DE CANNIBALES est pourtant à bien des égards un authentique chef d'oeuvre qui a fini de tailler a Tsui Hark sa place au panthéon, dont c'est pourtant seulement le deuxième film.

14

Des deuxièmes films aussi couillus, on aimerait sans doute en voir plus souvent! Dénoncant sans détour et sans pitié la société consumériste hong-kongaise au travers de personnages cannibales affamés de chair fraiche (et tous aussi cons les uns que les autres), le propos de Tsui Hark a vite fait de dépasser les frontières de Hong Kong et tape la ou ça fait mal. Rien de bien étonnant dans le fait qu'HISTOIRES DE CANNIBALES ait causé scandale à son époque, Tsui Hark gerbant littéralement dans la gueule de la société qui l'entoure leur propre nature. La métaphore est simple et il faudrait être complètement débile pour ne pas la voir, mais elle a le mérite d'être suffisamment claire pour déranger, Hark montrant, au travers de ces cannibales, une société qui s'entre-déchire et dont les habitants semblent tous prêts à se bouffer entre eux, impossible de ne pas voir dans ce village d'idiots une représentation, peu subtile certes mais efficace, de notre société. HISTOIRES DE CANNIBALES à 30 ans, mais c'est un film qui est d'autant plus intéréssant aujourd'hui que son propos est extrêmement actuel en plus d'être profondément véridique. Hark, non content d'être un cinéaste visionnaire dans sa mise en scène l'est également dans son propos politique, RESPECT. Cependant, contrairement aux apparences, HISTOIRES DE CANNIBALES ne puise pas tant sa force dans son propos subversif mais davantage dans sa facette de pur divertissement.

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Divertissant, HISTOIRES DE CANNIBALES l'est tout autant qu'il est subversif. Oeuvre survoltée et profondément référentielle, Tsui Hark s'éclate à défragmenter les codes de sa banale histoire de cannibales pour y introduire des éléments de films d'arts martiaux et de comédie. Basant son film sur un nombre réduit de personnages loufoques (et tous complètement à côté de la plaque la plupart du temps), Hark peut se permettre tout et nimporte quoi, notamment un mélange des genres des plus fous, provoquant un effet de surprise permanent. On ne sait jamais quel tour de force narratif Hark va encore nous sortir pour rendre son film encore plus délirant qu'il ne l'est déja, mais avant tout, HISTOIRES DE CANNIBALES, tout comme THE BUTTERFLY MURDERS, est un manifeste évident de la cinéphilie de Tsui Hark. Il n'y a qu'a voir pour s'en convaincre cette scène de baston finale dantesque ou vient se glisser la musique à la base du thème principal de la mythique série des IL ÉTAIT UNE FOIS EN CHINE, musique qui illustrait le plus souvent des films mettant en scène Huang Fei-Hung, petit chouchou du cinéma hong-kongais avec lequel Hark à grandi... Une fois de plus, ce dernier enchaine les hommages et impossible de ne pas voir dans cette volonté de détruire les codes pour les révolutionner un amour du cinéma incroyable, un amour qui n'a d'égal que la rage du monsieur. En effet, Tsui Hark signe avec HISTOIRES DE CANNIBALES une deuxième oeuvre enragée ou tout le monde se prend sa baffe dans la gueule : politiciens véreux, villageois affamés... Tous dans le film sont aussi cons et mauvais les uns que les autres, et Hark déverse une fois de plus tout ce qu'il à révendre sur ce morceau de pélicule bien schtarb, et ce jusqu'au plan final, pris comme une insulte de plus a l'époque mais qui en réalité témoigne surtout de toute l'énergie, l'amour et la rage que Hark y a investi.

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Dans cette mesure, HISTOIRES DE CANNIBALES est une oeuvre viscérale ou les choses ne semblent jamais s'arrêter. Hark livre une fois de plus une "intrigue à tiroirs", dans la mesure ou chaque péripétie ouvre le chemin à une autre, toutes par ailleurs plus délirantes que les autres et s'enchainant avec un rythme survolté. Dans ce rythme se mèlent de (très) nombreuses scènes de bastons superbement chorégraphiées par un Corey Yuen en folie. Très gores et très funs, ces bastons sont une fois de plus la preuve du génie et de l'inventivité de Tsui Hark, qui fait ici preuve d'une maitrise formelle qui n'a d'égale que la folie de l'entreprise, le maître sème le chaos dans chaque scène de combat sans pour autant que le tout soit désagréable à suivre, au contraire, HISTOIRES DE CANNIBALES absorbe dès les premières minutes son spectateur dans la folie, l'absurdité et le comique profondément slapstick de la moindre de ses scènes de baston... Au milieu de tout ce bordel, Hark et Szeto ne font pas l'erreur, pourtant récurrente dans le genre, d'oublier leurs personnages. Bien conscient qu'ils sont les piliers du film, ces deux fous donnent a ces derniers des personnalités excentriques mais passionnantes et surtout très amusantes, et glissent dans leur récit des personnages secondaires à mourir de rire (L'énorme, à tous les sens du terme, Vietnam Rose...), ayant tous quelque chose à apporter au film et l'amenant petit à petit vers un final REN-VER-SANT ou tous les enjeux du film se regroupent et donnent lieu a une des scènes de baston les plus dingues et spectaculaires vues sur un écran.

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HISTOIRES DE CANNIBALES bénéficie bien évidemment de la mise en scène magistrale de Tsui Hark, très inspirée, c'est une évidence, mais qui s'avère plus sobre (enfin, dans une certaine mesure) que d'ordinaire. Cela n'empêche pas à la mise en scène d'HISTOIRES DE CANNIBALES de lui donner une énergie et une pêche incroyable, et une fluidité tout simplement exceptionnelle. Qui plus est, HISTOIRES DE CANNIBALES comporte, comme nimporte quel film de Tsui Hark qui se respecte (autrement dit, tous.) des idées visuelles absolument incroyables, en témoigne ce plan final, bien connu, du coeur qui bat donné à la caméra (il est par ailleurs visible au tout début de l'article)... Génial, et ce n'est qu'un exemple parmi tant d'autres, Hark se livrant à des délires visuels gores, assez rares en regard de la réputation du film, mais tous très classes et très drôles... Hark parvient à trouver l'équilibre délicat entre bon et mauvais goût et ne tombe jamais dans le ridicule involontaire, un exploit prodigieux en regard du genre exploité par HISTOIRES DE CANNIBALES et de la façon dont il l'aborde!

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Jugé horrible et irregardable par la critique hong-kongaise en 1980, HISTOIRES DE CANNIBALES est pourtant à bien des égards un très grand film, une oeuvre divertissante et comique mais qui présente un propos subversif clair, concis, mais efficace et dérangeant. Dans cette mesure, il serait bien dommage de passer à côté de ce chef d'oeuvre intergalactique, brillant et savant mélange de film d'horreur, de kung-fu et de comédie... Contre toute attente, et bien qu'HISTOIRES DE CANNIBALES soit un divertissement de très grande qualité, il se mangera méchamment la gueule dans les salles, tout comme THE BUTTERFLY MURDERS, et n'y restera que quelques jours. Échec commercial auréolé d'un échec critique, HISTOIRES DE CANNIBALES marquera un tournant pour Tsui Hark, qui se lancera alors dans un projet encore plus radical : L'ENFER DES ARMES. Échec ou pas, en soit peu importe, passer à côté d'HISTOIRES DE CANNIBALES c'est passer à côté d'un grand film. Un indispensable donc.

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SI VOUS AVEZ AIMÉ CE FILM, VOUS AIMEREZ...

  • L'ENFER DES ARMES de Tsui Hark.
  • THE BUTTERFLY MURDERS de Tsui Hark.
  • THE BLADE de Tsui Hark.
  • EVIL DEAD de Sam Raimi.
  • EVIL DEAD II : DEAD BY DAWN de Sam Raimi.
  • BRAINDEAD de Peter Jackson.

-ZE RING-

2

16 mai 2012

THE BUTTERFLY MURDERS

Jaquette

RÉALISÉ PAR | TSUI HARK.
ÉCRIT PAR | FAN LIN ET CHI-MING LAM.
MUSIQUE COMPOSÉE PAR | FRANKIE CHAN.

SIU-MING LAU | Fong Hong-Ye.
SHU TONG WONG | Tian Feng.
MICHELLE YIM | Ombre Verte.
KUO-CHU CHANG | Shem Qing.

Une nuée de papillons meurtriers envahit un château féodal.

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A la fois dans l'histoire du cinéma hong-kongais et dans la filmographie du très grand Tsui Hark, THE BUTTERFLY MURDERS s'impose comme une date très importante. Premier film de son réalisateur, qui depuis s'est avéré être un véritable maître avec des oeuvres magnifiques comme THE BLADE, PEKING OPERA BLUES ou DANS LA NUIT DES TEMPS, THE BUTTERFLY MURDERS marque un tournant dans l'histoire du cinéma HK dans la mesure ou il s'agit très certainement du premier de la nouvelle vague hong-kongaise, composée de réalisateurs comme Patrick Tam, Ann Hui, et bien sur Tsui Hark. THE BUTTERFLY MURDERS est un film véritablement intéréssant, d'autant plus intéréssant aujourd'hui qu'il témoigne de l'évolution formelle des oeuvres du cinéaste le plus important de l'histoire de Hong Kong, mais en plus, s'avère être une alternative hardcore au dernier film en date du monsieur... DETECTIVE DEE. Alternative hardcore que l'on doit d'ailleurs entièrement à l'éditeur HK VIDEO, qui à réuni dans un superbe coffret ce film et deux raretés, HISTOIRES DE CANNIBALES et L'ENFER DES ARMES, quasiment introuvables en dehors de la France... Je doute que les gens dont il est question puissent me lire, mais un merci est la moindre des choses, d'autant plus que leurs éditions sont d'une grande qualité.

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Dès les premières images, THE BUTTERFLY MURDERS s'annonce comme un pur film de jeune énervé. En effet, Tsui Hark, en 1979, n'a que 28 ans. Il ne sait pas comment il va faire son film, ni même ce qu'on attend de lui. THE BUTTERFLY MURDERS est le résultat étonnant de ces frustrations. Tsui Hark fait dès son premier film preuve d'une inventivité que l'on retrouvera par la suite dans toutes ses oeuvres... Plaçant pour commencer son oeuvre dès le départ dans un univers visuel violent et craspec (par ailleurs renforcé involontairement par la mauvaise qualité de la copie originale... D'aussi bonne qualités soient les éditions d'HK VIDEO, on ne peut pas tout restaurer.) et dans un contexte novateur dans la mesure ou il comporte autant d'éléments historiques avérés que d'éléments relevant limite de la science-fiction. Tsui Hark le dit lui-même, ne sachant pas quoi faire, il s'est laissé aller sur ce film, le résultat est un mélange des genres extravaguant mais cohérent et solide, une relecture radicale du Wu Xia Pian classique ou se mélangent combats de sabre, enquête policière, et scènes d'horreur renvoyant inévitablement aux OISEAUX d'Alfred Hitchcock. Toutefois, Tsui Hark ne se base pas sur le suspense pour faire fonctionner, bien que ce soit très certainement ce qui est attendu de lui, mais signe en réalité une fable subversive ultra-violente dont l'univers visuel particulier à vite fini de faire de THE BUTTERFLY MURDERS un ovni des plus fous. Sans aucune retenue, Tsui Hark balance tout ce qu'il a avec panache dans la gueule du spectateur, que ce soit sa hargne ou ses frustrations ou bien son amour évident du cinéma.

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En effet, il faudrait être le roi des bigleus ou le dernier des cons pour ne pas se rendre compte très vite que THE BUTTERFLY MURDERS est avant tout une véritable déclaration d'amour au cinéma, rendant hommage à moults classiques, à commencer par LES OISEAUX, et détournant sans aucun complexe le Wu Xia Pian dans le seul but de le révolutionner et donc, par conséquent, de le renouveler, Hark fout tout ce qu'il a revendre dans cet ovni surréaliste... Il en va de même pour sa colère, par conséquent, THE BUTTERFLY MURDERS s'avère être une oeuvre méchamment subversive dans laquelle tout le monde se prend sa petite baffe. Dénoncant l'hypocrisie et, bien évidemment, la violence de l'être humain, il n'y va pas de main montre pour montrer son propos simple mais virulent. Ultra-violent, THE BUTTERFLY MURDERS l'est assurémment, ici pas de bouffons qui se tapent à coups de feuilles mortes et d'écharpes mais de la violence qui claque et pète a la gueule d'un spectateur démuni... A ce titre, si le film fut très bien reçu par la critique hong-kongaise de l'époque, il en demeura un bide commercial, et pour cause! On connait sans doute tous la sensibilité exacerbée du peuple hong-kongais, rien de bien étonnant du coup, à la vision de ce BUTTERFLY MURDERS, à ce qu'il se soit méchamment mangé... Car cette oeuvre n'est ni plus ni moins le premier pas vers la révolution si longtemps voulue par Tsui Hark, jusqu'a ce qu'il finisse par retourner sur sa gueule toute l'industrie du cinéma hong-kongais, notamment avec l'aide de son vieux pote John Woo, et ce n'était qu'un début. HISTOIRES DE CANNIBALES et L'ENFER DES ARMES, les deux oeuvres suivantes du monsieur, vont encore plus loin que THE BUTTERFLY MURDERS, qui n'y va déja pas avec le dos de la cuillère!

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Vous l'aurez compris, THE BUTTERFLY MURDERS est un film subversif et hardcore, mais ce n'est pas la sa seule qualité. Et oui, car avant tout, ce qui est magnifique avec Hark, c'est sa capacité à réinventer perpétuellement le cinéma tout en fournissant des oeuvres particulièrement divertissantes. Cette première oeuvre ne fait pas exception. Si THE BUTTERFLY MURDERS reste une oeuvre étrange et singulière, elle demeure très accessible et surtout très agréable à regarder... On s'en prend plein la gueule pendant 1 heure et demi. Que ce soit au travers de bastons majestueusement chorégraphiées et reposant sur des artifices classes et novateurs, ou d'une enquête policière magnifiquement écrite et narrée, THE BUTTERFLY MURDERS ne cesse de surprendre et de divertir le spectateur. On ne s'y ennuye jamais une seule seconde, il y a toujours quelque chose pour capter l'attention. L'histoire, construite en "tiroirs" multiplie les enjeux et les mystères, et si le tout peut parfois s'avérer assez confus, en soit peu importe, THE BUTTERFLY MURDERS reste très compréhensible. Pourtant, l'enquête policière du film est assez étrange, et complexe, et n'est pas sans rappeler, comme je le disais, la dernière oeuvre de Tsui Hark, DETECTIVE DEE. Les deux films sont d'ailleurs assez comparables, leurs histoires ont pas mal de points communs, mais surtout, ils partagent le même mélange des genres complètement loufoque... Dee est ici remplacé par Fong Hong-Ye, personnage aux motivations floues mais au large intellect dont il est toujours agréable de suivre les raisonnements et les déductions. Par ailleurs, concernant les personnages, si les interprétations des divers acteurs du film sont honnêtes, elles sont toutefois loin d'être transcendantes, mais les personnages demeurent crédibles et vivants, merci a un scénario bien conçu et très bien écrit qui n'échappe malheureusement pas, par courts instants, aux éceuils de longueurs, dont on se serait sans doute bien passés...

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Dans tout cela, la mise en scène de Tsui Hark est aussi magistrale que d'ordinaire. Celle-ci se distingue et ce malgré tous les défauts d'images clairement visibles sur la copie et le manque de moyens évidents... Si la narration du film est innovante, ce n'est rien en regard de son visuel, Hark enchaîne les trouvailles qui dégomment et signe des plans absolument sublimes (comme le plan final, sans doute l'un des plus beaux qu'il m'ait été donné de voir). Mais son génie éclate avant tout dans des scènes de baston renversantes, magnifiquement chorégraphiées par ailleurs, dans lesquelles Hark s'amuse, comme à son habitude, à semer le chaos à l'écran. Le résultat : THE BUTTERFLY MURDERS est un film plus ou moins bordélique mais ou tout est lisible et les scènes d'action se suivent sans aucune difficulté. Le film avance d'idées loufoques en idées encore plus loufoques, comme c'est bien souvent le cas chez Tsui Hark, jusqu'au final, qui vous trouera assurément le cul par son nihilisme et les idées visuelles délirantes qui y sont développées...

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Dans la catégorie "premiers films de réalisateurs renommés", THE BUTTERFLY MURDERS place la barre très haut. On y ressent déja la patte de Tsui Hark, qui expérimente, détourne, cherche et le plus souvent trouve des idées complètement délirantes et magnifiques... Le tout a vieilli, bien sur, notamment au niveau de l'image mais cela n'entâche jamais le génie visuel du maître, de paire avec un scénario solide... THE BUTTERFLY MURDERS est un film suffisamment novateur et important pour qu'on s'y attarde, d'autant plus que Hark y développe un propos subversif intéréssant... Hark prendra d'ailleurs le bide commercial du film comme un échec personnel et ira encore plus loin dans la provocation et la subversion avec les très controversés HISTOIRES DE CANNIBALES et L'ENFER DES ARMES... Mais ceux-la, on y reviendra plus tard. En l'état, THE BUTTERFLY MURDERS reste un excellent film, loin d'être dépourvu de défauts certes, mais pourvu de suffisamment de qualités pour qu'on jette un coup d'oeil attentif. A voir!

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SI VOUS AVEZ AIMÉ CE FILM, VOUS AIMEREZ...

  • L'ENFER DES ARMES de Tsui Hark.
  • HISTOIRES DE CANNIBALES de Tsui Hark.
  • THE BLADE de Tsui Hark.
  • DETECTIVE DEE de Tsui Hark.

-ZE RING-

15

13 mai 2012

JU-ON

jaquette

RÉALISÉ PAR | TAKASHI SHIMIZU.
ÉCRIT PAR | TAKASHI SHIMIZU.
MUSIQUE COMPOSÉE PAR | SHIRO SATO.

MEGUMI OKINA | Rika Nishina.
MISAKI ITÔ | Hitomi Tokunaga.
MISA UEHARA | Izumi Tôyama.

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Une critique de plus sur ce blog... Seulement, la différence majeure, c'est que cette fois-ci, ce n'est pas moi, Ze Ring, qui écrit, mais Salinui Chueok. La bienvenue à ce nouveau rédacteur sur ce blog, qui, je l'espère, continuera à s'agrandir! -ZE RING-


Pour tout vous dire, je suis un peu un gros fan du cinoche d'horreur Asiat. Bon, surtout les Yurei Eiga, peut-être d/ailleurs parce que ce sont les plus nombreux et que les réals qui ne tombent pas dans les histoires de fantômes de petites filles aux cheveux pas très propres (voire crade, et de préférence très longs) se comptent sur les doigts d/une main. Je pense d/ailleurs surtout à Kiyoshi Kurosawa, prolifique cinéaste venu du Japon et qui s'est désormais payé une bonne réputation dans le domaine du cinéma de genre en alliant deux choses dont la culture nippone est totalement imprégnée, la poésie et la peur. JU-ON, n'en est pas tellement imprégné, mais il serait dommage de dire que le film en est exempt. Premièrement, c'est faux, et deuxièment, même en légère quantité, il y en a, voulue ou non. Avant de m'attaquer plus sérieusement au film qu'est JU-ON, je tiens à faire une petite parenthèse sur la poésie dans le cinéma d'horreur Japonais (vous comprendrez donc son importance dans le film). Ne vous inquiétez pas, ce ne sera pas long, au pire passez directement au troisième paragraphe.

2
Bien que celle-ci soit rarement un élément central du film, elle l'englobe. La poésie a cette capacité de faire contraster peur et réalité de manière à rendre le tout ambigu et glauque. Par son aspect très onirique (rappelons nous la petite fille en parka et cartable dans DARK WATER, d'Hideo Nakata ), elle ajoute un aspect étrange et merveilleux dans l/intimité d/une vie au final extrêmement banale. Nous verrons donc dans énormément de films d'horreur, toujours Japonais, le personnage principal rentrer du boulot, se préparer à manger, prendre sa douche, emmener son enfant à l'école... La poésie se trouve très souvent dans des choses très banales du quotidien, mais elle doit rester quelque chose de fictif (vu qu'on ne la remarque pas, elle n'existe pas) car au final elle l'a toujours été, et c'est cela qui fait peur dans les films d'horreur nippons. La peur de l'inhabituel. Prenez un cartable de petite fille. Jusque-là, tout va bien non? Foutez-le dans un appartement complètement déserté et délabré d'un immeuble. Résultat? C'est étrange, glauque, ça fout mal à l'aise, mais c'est beau, captivant pour l'oeil, et tout cela couplé avec une mise en scène de génie (je n/ai pour l'instant pas vu de films d'horreur japonais dont la mise en scène m'ait rendu complètement indifférent ), vous obtenez un résultat magnifique. Et quand tout ça est sous la direction de réalisateurs tels qu'Hideo Nakata, Takashi Shimizu ou Kiyoshi Kurosawa, vous ne pouvez pas en ressortir indemne. C'est quelque chose qui prend à la gorge. Et de fait je ne peux que vous conseiller DARK WATER d'Hideo Nakata, un véritable chef d'oeuvre qui mêle peur et poésie avec beaucoup de subtilité et SÉANCES de Kiyoshi Kurosawa, qui est sûrement le film d'horreur le plus poétique que j'ai pu voir jusqu'à présent. En les visionnant (le second peut-être difficile à trouver cependant, hormis dans des coffrets), vous aurez une idée de ce que j'ai voulu dire dans ce paragraphe. Merci en tout cas à ceux qui ont lus cette parenthèse, même si j'ose avouer qu'elle est plutôt floue. Bref, on passe quand même à la critique de JU-ON!

3

Takashi Shimizu est un cinéaste très connu au Japon dans le domaine de l'horreur. Il est assez facile de rapprocher le réalisateur d'Hideo Nakata dans le sens où les deux ont LEUR série (RING pour Nakata, THE GRUDGE pour Shimizu). Ils ont tout les deux faits de leur saga de véritables emblèmes du Yurei Eiga, quitte à en faire trop, puis surtout se sont auto-remakés plusieurs fois, mais cela sans jamais ennuyer le spectateur en reproposant la même chose comme avec FUNNY GAMES U.S d'Haneke ( attention je ne critique pas le film, je l'aime bien même ). On sent chez ces deux réalisateurs l'envie de proposer une expérience nouvelle, américanisée et stylisée mais pas trop des sagas qui les ont fait connaître. Nakata s'amusera donc par deux fois avec RING en nous concoctant 2 épisodes avec Naomi Watts (seul le premier de Verbinski vaut le coup d'oeil, c'est un très bon film) dont les différences avec les versions japonaises sont hyper flagrantes (d'ailleurs la version américaine de RING 2 est totalement différente de la version japonaise, et est malgré son niveau plutôt moyen bien meilleure que l'originale), et Shimizu quant à lui s'amusera tout simplement à garder tout les éléments scénaristiques et les personnages de JU-ON, mais en proposant un montage et donc un schéma différent. C'est sympa à voir, pas lassant, bon tous ces remakes ne valent pas leurs versions originales, mais ils ont le mérite de divertir et d'être ouverts à un plus grand public pour ceux que le cinéma japonais n'intéresserait pas (rien que Naomi Watts et Sarah Michelle Gellar, ça attire du monde, hein).

4
Passées les premières mystérieuses secondes se contentant de simples écrits relatant une malédiction qui sévirait dans les endroits où de terribles meurtres blindés de rage jusqu'à la moelle ont eu lieu, le film (et ma critique) commence enfin. Il est intéressant de voir le choix très judicieux qu'a apporté Shimizu au lieu central du film. Effectivement le théâtre des horreurs ne sera rien d/autre qu'une simple mais très belle maison typiquement japonaise, avec son lot de portes coulissantes, d'escaliers à angles à 90°, de silences pesants (eh oui, on n'est pas dans un Ozu), mais surtout de verdures entourant la maison (intelligemment située dans une sorte de ruelle pour éviter tout contact extérieur). Ce sera ce cadre là la véritable poésie qui se dégagera du film, car oui c'est vert, c/est beau et écolo, mais surtout une bonne partie de la maison donne vers le soleil, et est donc constamment baignée d'une lumière pas trop vive mais suffisamment revigorante pour que l'on s'y sente bien, en bonne santé et plein d'entrain. Étrange comme décor de film d'horreur non? On est plutôt habitués à des cavernes, des souterrains, des maisons lugubres, mais surtout 95% du temps un soleil inexistant. C'est donc par ce film plutôt court (environ 1h30) que Shimizu nous donnera une petite leçon de ce qu/est la peur, mais surtout la peur en plein jour...
Le film est dans sa structure assez original. Celui-ci est découpé en plusieurs séquences variant généralement de 10 à 20 minutes chacunes, lesquelles se centrent sur un personnage en particulier, généralement jusqu'à son dernier souffle. Le changement de personnage se fait par le biais d'écrans noirs sur lesquels sont écrits les noms des prochaines victimes. C'est une structure totalement en adéquation avec le reste du film dans cette manière fataliste d'annoncer simplement le nom de la prochaine victime, comme si l'issue, quoi qu'il se passe, était inévitable et condamnait sans espoir de s'en sortir l'innocente victime ayant posée les pieds dans la baraque maudite. Reste à savoir la manière dont elle mourra, mais surtout dans quelles circonstances.
Ce n'est pas la manière de mourir, en soit, qui dérange, car de toute façon la mort n'est jamais montrée (cependant on voit le résultat, héhé, je laisse la surprise) de manière explicite. C'est plus ce qui la précède qui fera qui vous fera suer à vous en coller à votre fauteuil. La démarche du "fantôme tueur" (tro lol koi) est sacadée de sorte à instaurer une véritable sensation de malaise. D'autant que la mise en scène de Shimizu (je retiendrais une scène, bon attention petit spoil : où la caméra suit la démarche du fantôme caché derrière une sorte de cloison, c'est très ingénieux vu qu'on sait que la fantôme est là, mais qu'on ne le voit pas) est vraiment un modèle du genre. Les meurtres sont quasiment toujours commis dans des lieux sombres mais en pleine journée (bon de temps en temps, par exemple pour la soeur, non) et les acteurs miment très bien le malaise, pas comme un certain RING 2 où l'actrice principale en fait des tonnes, par exemple (troll).

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Ce qui fait au final de JU-ON un bon film (voire un très bon), c'est qu'il réunit tout ce que je considère qu'il faut dans un film d'horreur (enfin presque) : de la peur, une ambiance de folie, un fantôme hyper glauque, de bons acteurs, et une très bonne mise en scène. Le seul point donc que l'on pourra regretter, c'est ce scénario quasiment inexistant (bon il y en a un, mais il est léger, pas du tout passionnant, il est plus là pour dire qu'il est là). Mais il serait dommage de ne faire attention qu"à ça, car niveau ambiance, le film est une véritable réussite. C"est d'ailleurs le critère auquel j'attache personnellement le plus d'importance dans les films de ce genre. Cependant, le film n'est pas excellent non plus, je tiens à le dire, c'est un très bon film de peur, mais objectivement le reste n'est pas si exceptionnel que ça.

SI VOUS AVEZ AIMÉ CE FILM, VOUS AIMEREZ...

  • SÉANCES de Kiyoshi Kurosawa.
  • RING d'Hideo Nakata.
  • JU-ON 2 de Takashi Shimizu
  • LA MORT EN LIGNE de Takashi Miike (d'ailleurs je prèfère celui-ci à JU-ON, super film)

-SALINUI CHUEOK-

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1 mai 2012

PEKING OPERA BLUES

Jaquette

RÉALISÉ PAR | TSUI HARK.
ÉCRIT PAR | RAYMOND TO.
MUSIQUE COMPOSÉE PAR | JAMES WONG.

BRIGITTE LIN | Tsao Wan.
CHERIE CHUNG | Sheung Hung.
SALLY YEH | Pat Neil.
MARK CHENG | Ling Pak-Hoi.
KWOK KEUNG CHEUNG | Tung Man.
KENNETH TSANG | General Tsao.
FENG KU | Commandant Liu.

En 1913, la fille d'un seigneur de guerre (Brigitte Lin) rejoint un mouvement de liberation clandestin et rencontre une chanteuse cupide (Cherie Chung).

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On assimile bien souvent Tsui Hark a des oeuvres violentes et nihilistes comme THE BLADE ou L'ENFER DES ARMES. Toutefois, c'est un cinéaste a la carrière bien plus variée qu'elle n'y parait puisqu'au milieu de ces oeuvres violentes se tiennent d'autres, en contraste total avec ces dernières. C'est notamment le cas de PEKING OPERA BLUES, film on ne peut plus déconcertant, même dans la carrière d'un cinéaste comme Tsui Hark, puisque ce dernier s'amuse (et prend son pied, à la vision du film cela en devient évident) à mélanger les genres sans aucun complexe ou retenue... PEKING OPERA BLUES est une comédie mélangeant élément du film d'espionnage, d'arts martiaux, mais aussi d'importants hommages à tout un pan de la culture populaire chinoise, à commencer par l'opéra de Pékin, comme son titre l'indique... Mais la ou PEKING OPERA BLUES s'avère être une oeuvre véritablement exceptionnelle, c'est que tout ce pot pourri narratif fonctionne à merveille et ce, en permanence, mais en plus, Tsui Hark fait preuve d'une inventivité sans égal en détournant sans aucune limite les règles inhérentes a son genre et son sujet.

2

En effet, si PEKING OPERA BLUES est une oeuvre profondément comique, c'est indéniable, c'est également une oeuvre qui s'avère surprenante dans la mesure ou en réalité elle ne tranche pas radicalement avec les films antérieurs de Tsui Hark... En effet, elle demeure une oeuvre ultra-violente qui ne lésine pas sur l'hémoglobine, ou ça se bastonne sans arrêt et sans aucune pitié (à ce titre, les chorégraphies de Ching Siu-Tung sont aussi fluides qu'elles sont brutales) mais qui ne manque pas de moments hilarants et de situations cocasses... Jouant avec sa narration dans le seul but de créer les situations les plus drôles possibles, Hark n'oublie cependant pas de rester fidèle à la grande force de son film : la façon dont il mélange des genres qui pourraient sembler radicalement opposés... Ainsi, dans la logique interne a PEKING OPERA BLUES, il n'est guère surprenant de trouver une scène profondément dramatique au milieu d'une autre profondément comique. Tsui Hark l'a compris, le seul moyen de faire marcher tout cela, c'est en dressant de manière précise le portrait de plusieurs personnages, tous aussi loufoques qu'ils sont différents, afin de jouer par la suite avec leurs personnalités et états d'âmes. De cette façon, Hark peut se permettre très facilement de jouer avec des registres très différents, chaque personnage ayant des enjeux dramatiques (ou comiques, c'est selon) qui lui sont propres. Les personnages sont indéniablement la grande qualité de ce PEKING OPERA BLUES, et tous ont droit a leur heure de gloire, aucun n'étant laissé en retrait, ce qui au vu du nombre de personnages dans le film, est un véritable exploit.

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L'exploit narratif se poursuit lorsqu'une première partie hilarante laisse place à une deuxième partie qui recentre de manière explicite les enjeux les plus dramatiques du film... Ainsi la cocasse histoire d'espionnage de la première partie laisse place a une deuxième partie bien plus violente et tendue, ou la vengeance tient une place évidente. Qui plus est, dans tout ce mélange de genre, Hark détourne avec brio tous les codes inhérents a l'opéra de Pékin, -suffisamment explicités dans le film pour être compris par un public occidental-, au travers d'un tour de force narratif dont je tairai les détails, bien trop ingénieux et drôles pour que je les dévoile ici sans aucune finesse... La narration, c'est sans doute une des plus grandes qualités de PEKING OPERA BLUES, le screenplay de Raymond To multipliant les personnages et les enjeux pour mieux les faire converger vers un point précis. Le film, brillament construit en crescendo, fait preuve d'un rythme non-stop absolument incroyable. De temps morts, PEKING OPERA BLUES est absolument exempt, tout s'enchaine avec une fluidité qui inspire et a laquelle la mise en scène fait énormément honneur. En effet, à la vision du film, il est évident que peu de metteurs en scène auraient pu réaliser PEKING OPERA BLUES, Tsui Hark s'avère être un choix on ne peut plus judicieux dans la mesure ou sa gestion de l'espace et du temps hors du commun lui permettent de donner vie a des moments de bravoure cinématographique relevant purement et simplement du jamais vu, c'est notamment le cas de la deuxième scène "d'opéra" ou les enjeux se multiplient en même temps que les genres présents dans la même scène... Le tout s'avère tellement fou mais aussi tellement maîtrisé que cela inspire forcément le respect. Tsui Hark perd littéralement le spectateur dans tout ce florilège de genres et de situations dingues mais ce dernier ne perd jamais ses marques. Une fois de plus, le chaos propre a Tsui Hark s'avère tout aussi renversant et fou qu'il est organisé et minutieusement pensé (je vais devoir arrêter de chroniquer des Tsui Hark, j'ai vraiment l'impression de radoter.).

4

Dans tout ça, on retrouve un trio d'actrices tout bonnement exceptionnel, donnant vie a des personnages pas nécessairement faciles à interpréter de façon toujours différentes et inventives, le trio Lin - Yeh - Chung participe activement à la réussite qu'est PEKING OPERA BLUES, donnant une intensité dramatique ou comique, encore une fois c'est selon, aux scènes qu'elles animent. Toutefois, la palme revient très clairement à Kenneth Tsang, excellent acteur bien trop souvent rélégué a l'arrière plan, qui ici livre le portrait magnifique d'un personnage bourru et touchant, le bonhomme vole la vedette a chaque apparition et fait preuve d'un charisme pour le moins insolite. Tsang trouve ici l'un de ses meilleurs rôles, voire, tout simplement, son meilleur... A tout ce beau monde se rajoutent des seconds couteaux tous aussi talentueux les uns que les autres qui donnent vie a l'univers déjanté de ce PEKING OPERA BLUES pour le moins exceptionnel.

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Vous l'aurez compris, PEKING OPERA BLUES est un grand film... Mais, car il y a un mais, c'est un grand film qui demeure difficilement trouvable. Il n'y a pas d'édition disponible en France et le film n'existe sans doute qu'en VO sous-titrée anglais, disponible sur le Blu-Ray chinois (qu'il est possible "d'acquérir" sur le net.). Mais ce PEKING OPERA BLUES vaut la peine et l'effort. En effet, il s'agit d'une des meilleures oeuvres de Tsui Hark, tour à tour drôle, émouvant, ahurissant, violent... Une alchimie des genres et des registres absolument incroyable, qui, si vous avez la chance, vous laissera a coup sur un souvenir indélébile et vous marquera a vie la rétine. Un chef d'oeuvre, tout simplement.

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SI VOUS AVEZ AIMÉ CE FILM, VOUS AIMEREZ...

  • THE LOVERS de Tsui Hark.
  • IL ÉTAIT UNE FOIS EN CHINE de Tsui Hark.
  • IL ÉTAIT UNE FOIS EN CHINE II de Tsui Hark.

-ZE RING-

7

 

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28 avril 2012

TIME AND TIDE

Jaquette
RÉALISÉ PAR
|
TSUI HARK
.

ÉCRIT PAR | TSUI HARK ET KOAN HUI.
MUSIQUE COMPOSÉE PAR | JUN KUNG ET TOMMY KAI.

NICHOLAS TSE | Tyler.
WU BAI | Jack.
CANDY LO | Hui.
CATHY TSUI | Jo.
ANTHONY WONG | Oncle Ji.
JUN KUNG | Miguel.

A Hong Kong, la brève rencontre entre Tyler (Nicholas Tse), un jeune homme habitué aux dangers de la rue, et Hui (Candy Lo), une femme policier infiltrée, ne sera pas sans conséquence : celle-ci tombe enceinte. Afin de gagner de l'argent rapidement, Tyler devient garde du corps.

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Nombreux sont les cinéastes hong-kongais a avoir quitté Hong Kong dans les années 90, par craindre de perdre leur liberté artistique suite à la rétrocession. C'est notamment le cas de John Woo, Ringo Lam mais aussi de Tsui Hark, tous trois attirés vers Hollywood par Jean-Claude Van Damme. La-bas, dans des conditions de tournage bien pourries, Tsui Hark tourna les très nuls (mais aussi très bien foutus, de toutes façons Tsui Hark même quand il fait nimporte quoi, il pète à mille coudées au-dessus de tout le monde.) DOUBLE TEAM et PIEGE A HONG KONG. A la suite de ces deux échecs artistiques évidents, Tsui Hark revient à Hong Kong pour tourner TIME AND TIDE... Et que dire, si ce n'est que TIME AND TIDE marque le come back du maître avec brio? Toutefois, il marque aussi ses premières grosses difficultés, devant amputer son film de près de 50 minutes pour des besoins commerciaux... Et si TIME AND TIDE demeure un grand film, le manque de liberté artistique de Tsui Hark (qui se ressentira toujours a partir de ce film la) s'en ressent légèrement... Explications.

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Une telle coupe se ressent forcément, d'autant plus que l'ambition de Tsui Hark est à la mesure de son talent visuel et technique. Par conséquent, TIME AND TIDE comporte de nombreuses failles narratives : il y a de toute évidence des bouts qui manquent, certaines choses sont pas très claires voire incompréhensibles, toutefois, dans sa construction, l'oeuvre de Hark reste irréprochable, construisant méticuleusement la situation épineuse dans laquelle vont s'entremêler les destins de deux personnages dans une première partie magnifique. Cette construction conduit doucement mais surement vers une deuxième partie explosive ou le rythme s'envole littéralement et ne semble plus jamais s'arrêter. TIME AND TIDE est, selon Christophe Gans, "un film maelström qui vous emporte corps et bien et ne rend pas votre dépouille" et on ne saurait mieux le définir, Hark peignant de manière si précise le portrait de ses deux personnages principaux dans la première partie que la deuxième partie en devient on ne peut plus viscérale. Qui plus est, si effectivement il manque des choses, Hark parvient heureusement à gérer habilement son rythme pour le rendre, j'ai envie de dire, "consommable" facilement par le spectateur. Personnellement, un tel exploit m'inspire le respect, être forcé à couper son film de 50 minutes mais réussir à éviter tous les défauts évitables pour ne garder que ce qui est inévitable (les failles narratives suscitées), c'est tout simplement la classe. Finalement, à la vision de TIME AND TIDE, si le spectateur sera sans doute un peu confus face à certaines choses, le film ne semble pas souffrir de cette coupe importante.

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Et tant mieux, vraiment, car par conséquent, le spectateur peut se livrer entièrement aux délires visuels de Tsui Hark, on ne peut plus maniéristes une fois de plus, mais c'est indéniablement au travers de maniérismes visuels que le génie d'Hark éclate. En effet, avec THE BLADE, TIME AND TIDE est très certainement l'oeuvre la mieux mise en scène du maître. A travers son visuel, Hark transcende littéralement (tout comme dans THE BLADE) le genre qu'il exploite, démontant littéralement les codes visuels établis du polar HK, et ce, sans pour autant détourner les codes narratifs de ce dernier. Ainsi, si TIME AND TIDE peut sembler assez convenu d'un point de vue strictement scénaristique, on ne saurait en dire autant de son visuel, la mise en scène d'Hark étant d'une viscéralité et d'une fluidité sans précédent, mais également d'une originalité incroyable. Ce bon Tsui enchaine les plans insolites et ses idées visuelles, dans lesquelles se glissent des hommages évidents à son vieux pote John Woo, relèvent toute du génie. C'est simple, on s'en prend plein la tronche, en particulier lors des scènes d'action, ou le génie de Tsui Hark s'avère d'autant plus brillant qu'il se trouve véritablement dans son élément. Par conséquent, une fois de plus, Hark s'amuse, au travers d'une gestion du temps et de l'espace sans aucun égal, à semer le chaos à l'écran sans pour autant que les choses deviennnent illisibles : au contraire, tout comme dans THE BLADE, le chaos est ici pensé avec minutie et précision et impossible de se perdre dans les scènes d'action complexes du film mais aussi d'un réalisme palpable, merci à un montage virtuose qui n'oublie jamais aucun des personnages, pourtant assez nombreux.

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Plus accessible que son ainé THE BLADE, qui allait jusqu'a véritablement attaquer les sens du spectateur, TIME AND TIDE est très certainement le film le plus accessible de Tsui Hark, et donc par conséquent, le meilleur pour s'attaquer à la filmographie singulière du monsieur. En effet, TIME AND TIDE suinte a chaque instant le génie visuel de son réalisateur mais ne s'avère pas aussi perturbant et déconcertant que d'autres oeuvres du monsieur, ou les codes narratifs sont détruits sans aucune pitié et ou tout s'enchaine avec un mélange des genres qui, pour les "néophytes", pourraient s'avérer perturbant. Toutefois, pour ceux plus habitués au style sans concession du réalisateur, il serait également dommage de prendre cela comme un défaut : en effet, TIME AND TIDE est bien moins fou sur le plan scénaristique que les oeuvres précédentes du réalisateur, mais demeure une réussite de ce point de vue également, dans la mesure ou les choses s'enchainent sans temps morts, avec des rebondissements tous plus intéréssants les uns que les autres, qui plus est, que vaut l'absence de folie scénaristique face à tant de génie et d'audace visuelle? Qui plus est, si le film est effectivement bien moins fou qu'un ENFER DES ARMES, il demeure très bien écrit et ne présente aucun temps mort. Pourtant, il aurait été facile de tomber dans le consensuel et le lourdaud dans le traitement de la romance entre Nicholas Tse et Candy Lo, mais pas avec Tsui Hark qui traite cet aspect du film de manière réaliste et subtile. Rien de bien étonnant ceci dit dans la mesure ou ce dernier a toujours construit ses films autour de femmes, TIME AND TIDE ne fait pas exception. A vrai dire, TIME AND TIDE va encore plus loin puisque son histoire ne se construit non pas autour d'une femme mais autour de deux, évoluant dans la même situation de façon différente et prenant petit à petit une importance plus grande que les hommes visibles à l'écran. Hark prend donc a contre-pied l'aspect "amitié virile" imposé dans le polar HK par les oeuvres de John Woo (les mythiques THE KILLER et A TOUTE ÉPREUVE), avec brio, en plus... Le tout s'avère bien évidemment brillament interprété, notamment par Nicholas Tse qui livre ici la performance de sa vie mais surtout par le brillant Anthony Wong, qui vole littéralement la vedette a chaque apparition.

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TIME AND TIDE
est donc un grand film. Ne souffrant pas de ses quelques failles narratives, il bénéficie d'un soin visuel incroyable et s'avère être une oeuvre viscérale et renversante... Un des meilleurs films de Tsui Hark, assurémment, et ce malgré les difficultés que ce dernier à rencontré lors de sa réalisation. Peu importe en soit, TIME AND TIDE ne souffre pas de ces difficultés et est un film de très grande qualité qui se range aisément parmi ce qu'un des plus grands (voire le plus grand) génies du cinéma hong-kongais a fait de mieux... TIME AND TIDE est un indispensable que tout cinéphile se doit de voir, au plus vite!

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SI VOUS AVEZ AIMÉ CE FILM, VOUS AIMEREZ AUSSI...

-ZE RING-

7

26 avril 2012

THE BLADE

Jaquette
RÉALISÉ PAR | TSUI HARK.
ÉCRIT PAR | TSUI HARK ET KOAN HUI.
MUSIQUE COMPOSÉE PAR | RAYMOND WONG ET WAI LAP WU.

CHIU MAN-CHEUK | Ding On.
MOSES CHAN | Tête d'Acier.
XIN XIN XIONG | Fei Lung.
VALERIE CHOW | La prostituée.

Au Moyen-Âge, en Chine...En apprenant les circonstances tragiques de la mort de son père, Ding On (Chiu Man-Cheuk), un jeune forgeron, décide de retrouver l'assassin de celui-ci. Mais attaqué par une horde de bandits, il perd un bras...

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Tsui Hark est le fondateur et le fer de lance du mouvement cinématographique hong-kongais né dans les années 80... Toutefois, si ce mouvement est né avec LE SYNDICAT DU CRIME de John Woo, souvent considéré comme le pilier du mouvement, il est très souvent oublié que 6 ans avant cela, Tsui Hark posait toutes les bases de ce dernier avec L'ENFER DES ARMES, c'est-à-dire retourner littéralement le système du cinéma hong-kongais pour ensuite le révolutionner... L'ENFER DES ARMES fut un premier pas, par la suite Tsui Hark ne cessa pas de lancer des modes en produisant bon nombre de films (tels que la trilogie SWORDSMAN ou HISTOIRES DE FANTÔMES CHINOIS, ou encore tout simplement la trilogie du SYNDICAT DU CRIME) mais surtout réalisera bon nombre d'oeuvres de genres divers, l'occasion pour Hark de détourner les codes des genres qu'il exploite avec des oeuvres comme par exemple PEKING OPERA BLUES, THE LOVERS, ou bien THE BLADE. Et c'est de THE BLADE dont il est question aujourd'hui, chef d'oeuvre du Wu Xia Pian (film de chevalerie chinois) qui prend les codes du genre pour littéralement les retourner et livrer un ovni cinématographique, qui, aussi culte soit-il, n'a malheureusement pas tout le respect qu'il mérite.

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D'un autre côté, rien de bien étonnant, Tsui Hark livrant avec THE BLADE l'oeuvre la plus extrême de sa carrière. En effet, si pendant ses 30 années d'activité, il n'a eu de cesse de rechercher le chaos au cinéma, c'est avec THE BLADE que c'est le plus frappant. Avec ce film, les intentions de Tsui Hark sont très claires : plonger le spectateur dans un chaos visuel et sonore vertigineux, et cela se ressent à l'écran par un montage véritablement furieux ou tout s'enchaine avec une frénésie qui envoie sans aucune pitié tout ce qui s'est fait en la matière 6 pieds sous terre! Ne nous voilons pas la face, THE BLADE c'est du jamais vu, un film ou les choses s'enchainent avec une telle vigueur, une telle force et un tel chaos ambiant qu'il est quasi impossible d'en décrocher... Toutefois, encore faut-il accrocher aux délires visuels d'un Tsui Hark en colère, se servant de sa caméra comme catharsis et balançant toute la noirceur de son oeuvre a la gueule d'un spectateur on ne peut plus démuni. Je le répète, THE BLADE est l'oeuvre la plus extrême et la moins équilibrée de son réalisateur, pour cette raison, beaucoup resteront sur le carreau et ne parviendront jamais à rentrer dans le film... Les pauvres, tant THE BLADE est une oeuvre unique en son genre qui envoie chier sans aucune concession tous les codes du genre qu'il exploite pour devenir quelque chose de véritablement exceptionnel. Vision sans concession et noire du mythe du sabreur manchot, exploré dans les mythiques UN SEUL BRAS LES TUA TOUS et LA RAGE DU TIGRE (pour ne citer qu'eux), THE BLADE est également l'occasion de plus pour son réalisateur d'explorer la facette de l'homme (et je veux bien dire l'homme, pas l'être humain) la plus noire et la plus désespérée. Nihiliste, THE BLADE l'est assurément et sert, comme d'hab, d'intermédiaire entre ce fou furieux de Hark et un spectateur qui ne sait pas encore quel constat obscur il va se prendre dans les dents. C'est bien simple, Tsui Hark livre une vision tellement réaliste d'une époque souvent romancée qu'elle en devient presque excessive de noirceur!

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En conséquence, il n'y a rien de plus efficace pour montrer le chaos et l'horreur du contexte du film que les choix de mise en scène de Tsui Hark... Discutables sans doute pour ceux qui n'adhèrent pas aux délires visuels du monsieur mais on ne peut plus efficaces pour ceux qui réussissent à rentrer dans son trip. THE BLADE, à bien des égards, pourrait sembler bordélique, pourtant, il est clair, du moins lorsqu'on regarde le film avec ses yeux, que le chaos que Tsui Hark met en scène est paradoxalement on ne peut plus réfléchi... Le montage frénétique est d'une organisation rigoureuse et minutieuse, d'ou la réussite indéniable de l'entreprise : à des plans superbes s'allie un montage on ne peut plus fou, donnant lieu à une orgie visuelle certes parfois perdant un peu trop le spectateur mais le plongeant dans une immersion à toute épreuve... A cela se rajoute un travail sonore absolument assourdissant, l'élément supplémentaire montrant clairement la visée de Tsui Hark : attaquer les sens de la manière la plus viscérale envisageable. Le tout fonctionne a merveille, confronté à ce chaos des plus extrêmes, le spectateur ne sait vraiment plus ou se mettre! Dans cette situation, le spectateur ne peut qu'être ébahi face à des bastons incroyablement chorégraphiées, dans lesquelles se mélangent prouesses martiales sidérantes et violence percutante, à ce titre, le combat final est très certainement la meilleure scène de baston jamais réalisée, un véritable monument de barbarie jamais égalé!

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Dans tout ce bordel, Tsui Hark ne peut s'empêcher de jouer avec les codes de son histoire... Ainsi du personnage chevaleresque qu'était le sabreur manchot dans LA RAGE DU TIGRE, on passe à Ding On, sabreur impitoyable en quête de vengeance... Ce qui n'est pas un hasard puisque le tout s'inscrit directement dans une optique on ne peut plus "Harkienne". En effet, si ses films sont souvent considérés comme des "films d'hommes" (tout comme son pote John Woo), ce sont les femmes qui sont au centre de ces derniers et THE BLADE ne fait pas exception... Pour s'en convaincre, il suffit de regarder les 2 premières minutes du film, ou dès le départ la narration est donnée par une femme, personnage pivotal du récit, pivotal dans le sens ou THE BLADE est tout autant un film de sabre que c'est une histoire d'amour, on ne peut plus nihiliste certes (comme c'est souvent le cas avec Tsui Hark) mais une histoire d'amour quand même, montrant une fois de plus la propension qu'a Tsui Hark à manipuler sans aucune limite la codification des genres... Ce qui n'a pas de limites non plus chez Tsui Hark, c'est son ambition. En effet, s'il est bien connu pour son génie il l'est également pour son ambition presque mégalomaniaque, ce qui a donné lieu, par exemple, à des coupes de 2 heures sur son génial SEVEN SWORDS et donc a des défauts narratifs évidents... Fort heureusement, pas de ça ici, la narration est claire comme de l'eau et véritablement ingénieuse, en conséquence, THE BLADE est une oeuvre d'une fluidité incroyable mais qui s'avère être en plus brillament écrite... THE BLADE avance d'idée scénaristique brillante en idée scénaristique encore plus brillante, doublés d'idées visuelles époustouflantes (la scène ou Ding On s'entraîne... Quel pied!) renforcé par le talent technique sidérant d'un Tsui Hark au sommet de sa forme.

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Vous l'aurez compris, THE BLADE est une oeuvre exceptionnelle, qui, par sa forme on ne peut plus extrême, ne plaira certes pas à tout le monde mais demeure une expérience qui vaut le coup d'être tenté! THE BLADE est sans doute le Wu Xia Pian ultime, le chef d'oeuvre de tout un pan du cinéma asiatique... Une oeuvre nihiliste et noire mais aussi un plaisir sensoriel incroyable et sans aucun égal. THE BLADE est une oeuvre d'une très grande importance, et d'une très grande influence sur le cinéma dans sa globalité, par ailleurs, au cas ou mon conseil ne serait pas suffisant, Quentin Tarantino ne cesse de faire l'éloge du film et va même jusqu'a dire de Tsui Hark que c'est le meilleur metteur en scène de tous les temps... Et vous vous doutez bien que je suis d'accord. ;)

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Si vous avez aimé ce film, vous aimerez...

  • L'ENFER DES ARMES de Tsui Hark.
  • SEVEN SWORDS de Tsui Hark.
  • TIME AND TIDE de Tsui Hark.
  • LA RAGE DU TIGRE de Chang Cheh.

-ZE RING-

BANNIERE

3 février 2012

DIRTY HARRY

DH JAQ

RÉALISÉ PAR | DON SIEGEL.
ÉCRIT PAR | HARRY JULIAN FINK, RITA M. FINK, DEAN REISNER, JOHN MILIUS ET JO HEIMS.
MUSIQUE COMPOSÉE PAR | LALO SCHIFRIN.

CLINT EASTWOOD | Harry Callahan.
ANDY ROBINSON | Le Scorpion.
JOHN VERNON | Le Maire.
RENI SANTONI | Chico Gonzalez.
HARRY GUARDINO | Lt. Al Bressler.
JOHN LARCH | Le chef de la police.

DH1


Entre cinéphiles, on en vient souvent à parler du Nouvel Hollywood et des grands noms qui en ont fait la gloire : Sam Peckinpah, Clint Eastwood, Martin Scorsese, William Friedkin... Toutefois, l'un d'eux est trop souvent oublié, Don Siegel, et à tort. En effet, il s'agit très certainement du pilier principal du Nouvel Hollywood, en effet, non content d'être le mentor de Sam Peckinpah (rien que ça), il a également donné ses premiers grands rôles américains à Clint Eastwood et a influencé ce dernier dans ses propres réalisations, et ce que ce soit du point de vue de la mise en scène que du point de vue purement thématique. Des 5 collaborations entre ces deux grands hommes, une ressort plus que toutes les autres, DIRTY HARRY. En effet, il s'agit ni plus ni moins d'une des oeuvres les plus importantes de l'histoire du cinéma, ayant provoqué un scandale incroyable à sa sortie (j'y reviendrai, c'est en grande partie pour ça que j'écris cet article) mais surtout clairement représentatif de la démarche de Siegel et d'Eastwood. Siegel, lui, avait déja oeuvré dans un genre similaire et avec un personnage plus ou moins similaire à DIRTY HARRY avec COOGAN'S BLUFF (enfin disons que Coogan annonçait avec brio ce qu'allait être Harry Callahan), Eastwood, quand à lui, à soutenu Siegel a chaque fois et s'est par la suite attaqué de manière corrosive à la justice actuelle avec des oeuvres telles que L'HOMME DES HAUTES PLAINES, L'ÉCHANGE, ce qui lui a valu d'être taxé de fasciste à l'époque de la sortie de ce fameux DIRTY HARRY.

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Pourtant, pas besoin de porter de lunettes pour savoir qu'Harry Callahan est loin d'être un facho. Un flic aux méthodes peu orthodoxes certes, mais c'est également et surtout un flic qui a compris que le seul moyen d'obtenir des résultats dans un système judiciaire incompétent et régi par la politique, était de répondre au mal par le mal. En l'occurence, Callahan n'hésite pas une seconde à utiliser la violence contre ceux qui la pratiquent, toutefois c'est également une personne raisonnable et capable de discernement (en témoigne le braqueur au début, a qui il laisse le choix entre la vie et la mort de manière implicite) et faisant preuve d'une justice dans ses actes dont il est le seul dans cette oeuvre à posséder le secret. Ses méthodes sont violentes, certes, mais quel est le plus noir finalement? Les méthodes d'Harry Callahan ou bien les méthodes du Maire et de ses associés, étant davantage préocuppés par l'opinion publique à leur égard (cet aspect est d'ailleurs encore plus poussé dans L'ÉCHANGE de Clint Eastwood) que par la santé de ceux dont ils ont la responsabilité? Il semble clair que le choix ne se pose pas, et si Harry Callahan est une véritable enflure, il reste néanmoins le meilleur d'entre tous. La noirceur du film, qui lui a longtemps été reprochée avant qu'il ne devienne un véritable objet de culte, vient davantage de ce paradoxe atroce que des façons de faire d'Harry Callahan, qui se pose d'ailleurs davantage comme un vigilante que comme un policier, allant outre les lois dans le seul but de faire régner une justice que ces dernières ne parviennent pas à imposer. Siegel, avec DIRTY HARRY, soulève donc avec brio ce problème précis de notre société, toutefois il le fait avec l'ambiguité la plus incroyable et la plus subtile, plaçant d'une part son personnage principal comme un noble chevalier en croisade et de l'autre comme un enfoiré de première classe. Le scandale, qui visait à déterminer si oui ou non Eastwood et Siegel étaient des fachos, est sans doute venu de ce point précis de l'oeuvre, pourtant, ce que beaucoup de gens n'ont pas réussi à voir a force de gueuler au lieu de regarder le film, c'est que Siegel ne fait que poser des questions et ne donne pas de réponse, réponses qu'Eastwood ne manquera pas de donner dans le 4ème volet des aventures de l'Inspecteur Harry, SUDDEN IMPACT, après le très horriblement politiquement correct MAGNUM FORCE (sur lequel je reviendrai un de ces jours, histoire de me faire lapider sur place par les fans.).

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Le politiquement incorrect, Siegel et Eastwood le poussent a son paroxysme avec DIRTY HARRY, en allant jusqu'a remettre en cause les lois fondamentales de notre système judiciaire tout en bousculant les conventions du cinéma de l'époque. Rappelons-le, nous ne sommes à l'époque qu'en 1971, le Nouvel Hollywood à a peine vu le jour et nous entrons petit à petit dans une période importante de liberté artistique, Don Siegel en profite et signe ce qui peut très certainement être considéré comme l'un des premiers westerns urbains. En effet, le personnage principal y est un personnage solitaire, dont l'arme, par sa mythologie, et dont l'aspect impitoyable ne sont pas sans rappeler les vieux westerns. Ce côté "western urbain" est d'autant plus renforcé par COOGAN'S BLUFF, du même Don Siegel, -dont le titre français, UN SHÉRIF A NEW YORK, en dit long sur l'oeuvre du bonhomme- et est confirmé implicitement par Threlkiss dans SUDDEN IMPACT ("Callahan est le seul objet immuable dans un univers perpétuellement changeant"), ... Siegel détourne les codes du genre qu'il exploite avec brio, et si j'ai mis cet article dans la catégorie POLAR j'avoue avoir longtemps hésité entre WESTERN et VIGILANTE, tant DIRTY HARRY s'approche de tous ces genres d'une façon à chaque fois différente. En apparence, ce n'est rien de plus qu'un film policier lambda, finalement, pourtant, d'autres éléments le rapproche des autres genres suscités... Rien de bien étonnant finalement, dans la mesure ou chambouler les conventions, dans le Nouvel Hollywood, se faisait souvent par le détournement total des codes d'un genre voire la transposition des codes d'un genre dans un autre (voir pour s'en convaincre CROSS OF IRON de Sam Peckinpah.). Don Siegel finit de chambouler les conventions cinématographiques par l'usage d'une violence utilisée avec parcimonie mais percutante, par ailleurs indispensable au propos dans la mesure ou c'est par son biais que se développent les personnages et les questionnements qui y sont inhérents.

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Ces questionnements, Don Siegel les met en scène avec brio, livrant un objet cinématographique très bien photographié (et ce malgré un DVD qui est loin de lui rendre justice, vivement que je me chope le Blu-Ray.) mais surtout superbement filmé et monté, plaçant dès les premiers plans le personnage de DIRTY HARRY dans une mythologie qui lui est propre, capturant à chaque instant le charisme et la classe incroyable de Clint Eastwood, qui livre ici une de ses meilleurs performances. Totalement investi dans son rôle, Eastwood transpire la sincérité et retranscrit avec brio l'ambiguité du personnage qu'il incarne. Soyons clair, Eastwood vole la vedette à chaque instant, toutefois, DIRTY HARRY reste soutenu par un casting de seconds couteaux talentueux, avec notamment John Vernon que l'on retrouvera plus tard dans JOSEY WALES et Andy Robinson, dont l'interprétation d'un tueur psychopathe est elle aussi pleine d'ambiguité... Sans en dire trop (je pense en avoir déja trop dit), sachez simplement que le personnage du Scorpion soulève lui aussi d'importants questionnements et que la légimité ou l'illégimité sont perpétuellement remises en doute par son personnage... A vrai dire, tout dépend de quel côté on se met, DIRTY HARRY étant un film reposant énormément sur l'interprétation dont le spectateur en fera, expliquant l'absence totale de réponses vis-à-vis des questions que Siegel pose à ce dernier.

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DIRTY HARRY, finalement, ne peut pas être jugé objectivement. Une péloche fasciste pour certains, une série B fendard pour d'autres, ou un chef d'oeuvre absolu et subversif pour les autres... Je pense que vous savez de quel côté je me range, à mon sens, DIRTY HARRY est un très grand film, jouant avec les genres et les registres et faisant preuve d'une subversion et d'un politiquement incorrect qui ferait un paquet de bien au cinéma actuel... En tout cas, il est sur qu'avant de tenter l'expérience, vous ne saurez jamais de quel côté vous ranger. Peut-être qu'Harry Callahan n'est pas aussi facho que sa réputation sous-entend, et peut-être qu'Harry Callahan n'est peut-être pas aussi juste que ce que je laisse sous-entendre... Allez savoir!

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Si vous avez aimé ce film, vous aimerez aussi...

  • COOGAN'S BLUFF, de Don Siegel.
  • UN JUSTICIER DANS LA VILLE, de Michael Winner.
  • SERPICO, de Sidney Lumet.
  • L'ÉCHANGE, de Clint Eastwood.
  • L'HOMME DES HAUTES PLAINES, de Clint Eastwood.

-ZE RING-

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27 janvier 2012

CROSS OF IRON

Croix de fer

RÉALISÉ PAR | SAM PECKINPAH.
ÉCRIT PAR | JULIUS J. EPSTEIN, WALTER KELLEY ET JAMES HAMILTON A PARTIR D'UN ROMAN DE WILLI HEINRICH.
MUSIQUE COMPOSÉE PAR | ERNEST GOLD.

JAMES COBURN | Sgt. Rolf Steiner.
MAXIMILIAN SCHELL | Capt. Stransky.
JAMES MASON | Col. Brandt.
DAVID WARNER | Capt. Kiesel.
SENTA BERGER | Eva.

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ATTENTION FILM CHOC!

Film choc, en effet. Car de tous les films que Peckinpah, de toutes les oeuvres ou il manipule une violence tout aussi morale qu'elle est visuelle, CROSS OF IRON est sans doute la plus viscérale avec STRAW DOGS, autre oeuvre choc qui a, rappelons-le, causé scandale à l'époque de sa sortie, tout comme LA HORDE SAUVAGE et APPORTEZ-MOI LA TÊTE D'ALFREDO GARCIA, d'ailleurs... Sam Peckinpah est un réalisateur controversé, qui a ses admirateurs et ses détracteurs, et pour cause, il s'aventure toujours dans des sujets extrêmement délicats et de ce point de vue CROSS OF IRON est sans doute le plus extrême, Peckinpah y délivrant une description du front russe pendant la Seconde guerre mondiale du point de vue des nazis. De ce coup de provocation bien senti, Peckinpah construit une histoire a la charge subversive évidente et colle de vilains coups de savates dans toutes les conventions cinématographiques et morales établies... Mais CROSS OF IRON demeure avant tout une oeuvre profonde et intelligente, au propos réfléchi d'une noirceur et d'un nihilisme rarement égalée, a part peut-être dans le magistral REQUIEM POUR UN MASSACRE d'Elem Klimov, qui renvoye d'ailleurs a plusieurs reprises à CROSS OF IRON, en témoigne la séquence finale qui n'est pas sans rappeler le générique d'introduction de ce cru de Peckinpah...

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CROSS OF IRON est une oeuvre à l'influence indéniable sur le cinéma, tout comme la plupart des autres oeuvres de Peckinpah, ceci dit, qui a peut-être signé avec celui-ci son chef d'oeuvre absolu. Faisant preuve d'une maîtrise technique sidérante, Bloody Sam joue habilement avec son montage et crée avec brio le chaos sur le champ de bataille, dont la représentation est d'ailleurs impressionnante, CROSS OF IRON n'ayant pas pris une ride, et les scènes d'action, très nombreuses, ont quand à elles gardé une hargne et une violence magistrales au fil des années. L'oeuvre de Peckinpah plonge son spectateur dans les mêmes horreurs psychologiques et morales que ses personnages. L'identification a ces soldats allemands est donc immédiate, Peckinpah montrant très clairement ce que beaucoup semblent refuser de comprendre, c'est-a-dire que tous les soldats allemands n'étaient pas des nazis génocidaires, un constat simple mais qu'il est politiquement correct de ne pas comprendre... Mais vous savez que sur ce blog, le politiquement correct, on s'en fout, et Peckinpah lui s'en soucie encore moins, pour preuve, il fait tout pour rendre ces personnages attachants et il le fait bien, le spectateur suit avec attention leur descente aux enfers jusqu'a un final dont la puissance dramatique risque de vous laisser sur le cul... Ces personnages sont d'ailleurs pour Peckinpah l'occasion de détourner une fois de plus les codes du genre qu'il exploite en présentant davantage son personnage principal comme un personnage de western que comme un soldat en guerre... Taciturne, ne se pliant pas à l'ordre établi et survivant dans un environnement perpétuellement hostile, Steiner est un personnage intéréssant par sa dimension anachronique (que l'on retrouve dans tous les films contemporains de Peckinpah.) mais surtout par les différents aspects de sa personnalité.

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En effet, c'est un personnage violemment insubordonné, s'opposant perpétuellement aux officiers qui le dirige, d'une manière qui n'est d'ailleurs pas sans évoquer les conflits de Peckinpah avec ses producteurs. De cette insubordination découle toute la noirceur du récit, le personnage de Steiner met en évidence l'horreur des hommes qui nous dirigent, ici de vils officiers envoyant des hommes à la mort à l'abri dans leurs bunkers. La nature de l'homme est un sujet que Peckinpah a souvent abordé au fil de sa carrière, notamment dans CHIENS DE PAILLE ou David Sumner se montrait capable des pires horreurs par jalousie et fierté masculine, dans CROSS OF IRONPeckinpah dresse un très vilain portrait des hommes en charge, quand à eux, capables des pires atrocités par simple avidité matérielle... Notre société, Peckinpah l'avait comprise en détail, et il le prouve une fois de plus avec cette oeuvre actuelle, voire universelle par le contexte qui y est abordé. En effet, la Seconde guerre mondiale n'est pas un hasard, il est toujours plus facile de traiter d'un sujet aussi vaste lorsqu'on prend un exemple aussi global que la seule guerre à avoir touché le monde entier. Tout le monde devrait donc se sentir concerné par cette oeuvre sans concession, car finalement, Stransky, le bad mother fucker de l'histoire n'est rien de plus que le reflet parfait des hommes qui nous dirigent, et l'introduction d'images d'archives montrant les méthodes de contrôle d'Hitler vient clairement l'amertume du propos. Alors certes, Peckinpah ne fait pas avec ce film dans la plus grande subtilité, mais n'est-ce pas la le but? Il me semble que l'objectif avec CROSS OF IRON n'est pas de faire passer maintes réflexions mais davantage d'envoyer à grands coups de tatanes un constat simple, catégorique et brutal mais d'une importance capitale, pour nous et les générations futures... Ce n'est pas un hasard, une fois de plus, si, sans trop en dire, Peckinpah, d'une manière symbolique, éxécute le peu d'espoir et le peu d'humanité qui reste à l'humanité au bout de dix minutes...

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Dans toute cette noirceur, CROSS OF IRON se distingue par ses qualités formelles, à commencer par la mise en scène magistrale de Sam Peckinpah bien évidemment, mais également par la qualité de son scénario et de son script, superbement écrit, ainsi que la qualité de son interprétation. James Coburn est tout simplement brillant dans le rôle de Rolf Steiner, un rôle qui lui sied parfaitement et qu'il interprète avec charisme et subtilité. Le reste du casting n'a pas a rougir en comparaison avec sa prestation impériale : Maximillian Schell est excellent en bad mother fucker, livrant une prestation complexe pour un personnage qui l'est tout autant et chaque scène de conflit avec James Coburn est un régal... On compte également toute une liste de seconds couteaux tous aussi talentueux que les autres. Une distribution de qualité, et dirigée avec talent par Peckinpah, dont la mise en scène est brillament soutenue par la superbe bande-son d'Ernest Gold.

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Vous l'aurez compris, CROSS OF IRON, par sa violence et sa noirceur, n'est pas un film a mettre entre toutes les mains, toutefois, il en demeure un chef d'oeuvre absolu, qui, s'il ne plaira pas à tout le monde, mérite d'être vu... C'est l'aboutissement de toute l'oeuvre d'un maître, de toutes ses obsessions et de toutes ses thématiques favorites. C'est également l'aboutissement d'un propos enragé et d'une vision noire de l'humanité qui a mis des années et un paquet de films à se développer... Certainement l'oeuvre la plus viscérale de son réalisateur, pourtant connu pour la viscéralité de ses oeuvres, c'est un film majeur et qui, par son absence de concession, ses qualités techniques et formelles évidentes, et sa subversion, se range à mon sens parmi les meilleurs films jamais réalisés, rien que ça... CROSS OF IRON est un chef d'oeuvre, tout simplement. Putain, ça m'a donné envie de le revoir tout ça!

Si vous avez aimé ce film, vous aimerez aussi...

-ZE RING-

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1 décembre 2011

THE HOLY MOUNTAIN

LMS JAQUETTE

RÉALISÉ PAR | ALEJANDRO JODOROWSKY.
ÉCRIT PAR | ALEJANDRO JODOROWSKY.
MUSIQUE COMPOSÉE PAR | ALEJANDRO JODOROWSKY, DON CHERRY
ET RONALD FRANGIPANE.

HORACIO SALINAS | Le voleur.
ALEJANDRO JODOROWSKY | L'alchimiste.
RAMONA SAUNDERS | La disciple.

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Bon, je vais pas tourner autour du pot une seule seconde : LA MONTAGNE SACRÉE est de loin l'une des oeuvres les plus difficiles à chroniquer de tous les temps. Pour vous donner une idée, je prépare cette critique depuis 2 mois, il m'a fallu deux visions, dont une avec les commentaires audio d'Alejandro Jodorowsky pour en effleurer le sens... Il y a beaucoup trop de choses à dire sur cette oeuvre, tellement que la seule personne à pouvoir en définir clairement le sens et la portée est très certainement Alejandro Jodorowsky, le réalisateur lui-même. C'est pourtant ce que je vais essayer de faire (je dis bien "essayer") et ce malgré la complexité, la subversion, l'ésotérisme, la folie de ce film... Mais pour ça, il faut partir à la base, c'est-à-dire de Jodorowsky lui-même, qui après le succès d'EL TOPO, se lance, grâce à Allen Klein dans LA MONTAGNE SACRÉE... Et il faut bien se rendre compte dès le départ qu'il s'agit ici d'une des oeuvres les plus subversives jamais réalisées : blasphématoire, satirique, visionnaire, métaphysique, mystique sont une poignée de mots assez représentatifs de LA MONTAGNE SACRÉE, une pure expérience cinématographique avant d'être un film finalement puisque Jodorowsky signe une oeuvre qui relève purement et simplement du jamais vu... Pourtant, ce ne fut pas du gout du gouvernement mexicain toutes ces histoires de blasphèmes et d'ésotérisme, puisque pour l'anecdote Jodorowsky à frolé la mort à plusieurs reprises sur le tournage du film, à été menacé de mort à plusieurs reprises également et de peur pour sa famille à du s'exiler aux Etats-Unis pour finir son film...

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En même temps, rien de bien d'étonnant la-dedans dans la mesure ou en plus d'être certainement l'un des films les plus timbrés de tous les temps, Jodorowsky, qui a à cette époque pour objectif de changer le monde, dresse dans LA MONTAGNE SACRÉE un portrait méchamment satirique de notre société. En effet, dans LA MONTAGNE SACRÉE, tout le monde se prend sa petite baffe, notamment la religion catholique dont Jodorowsky rit carrément au nez, et ce malgré l'usage important de thématiques et d'imagerie christiques dans le film, jugeant que l'église à oublié ce qu'était la religion et dressant un portrait volontairement caricatural mais tout aussi drôle qu'inquiétant de cette dernière. Blasphémant à outrance (Les romains qui font des fausses icônes de Jésus fallait oser quand même.), Jodorowsky va encore plus loin en attaquant de manière satirique également commerçants d'armes, hommes politiques, pédophiles, même les artistes s'en prennent plein la gueule au travers d'une séquence pleine d'humour ou dans un des délires visuels propres à Jodorowsky, ce dernier critique de manière puissante les artistes modernes qui prennent l'art pour un business... Pas forcément très enthousiaste concernant l'être humain, LA MONTAGNE SACRÉE reste pourtant un film puissamment humouristique, chacune des séquences satiriques du film étant un puissant moment d'humour, humour marqué par un rire jaune certes surtout lorsque Jodorowsky se met à toucher au conditionnement de l'enfance et à taper sur les doigts du nazisme au travers d'une séquence de castration autant portnawak qu'elle est violente, dérangeante mais paradoxalement fun par son absurdité. LA MONTAGNE SACRÉE est donc une oeuvre puissamment satirique mais c'est également une oeuvre cinématographique universelle dans les thématiques qu'elle aborde dans la mesure ou, dans l'optique de changer le monde, Jodorowsky, touche à des dizaines de sujets et de thématiques. C'est d'ailleurs en grande partie l'abondance de thématiques abordées dans le film, ainsi que son aspect cinématographique assez unique, qui en fait une oeuvre si difficile à chroniquer, mais finalement n'est-ce pas la une des qualités principales du film? Son côté indescriptible et indéchiffrable, mais surtout le fait que toutes les thématiques que Jodorowsky aborde se réunissent en un seul groupement pour former une réflexion sur l'Homme avec un grand H?

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Dans LA MONTAGNE SACRÉE, l'Homme, en plus de ne pas avoir de nom, est comme d'habitude chez Jodorowsky, sur le chemin d'une quête initiatique supposée en faire un homme meilleur. Si le très touchant El Topo courait après l'amour, le personnage principal du récit court ici après l'immortalité. Sa quête de l'immortalité, véritable quête du surhomme, est marquée par une des mécaniques communes à tous les Jodorowsky : imagerie et thématiques christiques, le voleur vagabond ressemblant étrangement à Jésus, icône religieuse qui est également tournée en ridicule dans la première partie du film... Mais le plus intéréssant survient lorsque cette quête de l'immortalité se transforme subitement en quête de la vérité, lors d'une scène, qui, sans en dire trop, brise la fine limite entre Jodorowsky et son spectateur en plus de briser en même temps toutes les illusions (oui c'est énigmatique, je sais). Jodorowsky lance une puissante réflexion sur le cinéma, voire même sur la vie en elle-même. Cette même vie qu'il accorde aux personnages qu'il caricature, livrant par la même un puissant message d'espoir malgré le côté profondément pessimiste du film. Cette quête apparemment linéaire mais qui dévoile de manière surprenante ses enjeux au fur et à mesure qu'elle avance est rendue encore plus unique par l'intervention directe de la culture de Jodorowsky dans l'histoire... Cultures ésotériques, cultures modernes issues de tous les coins du monde, peu importe en soit d'ou ça vient tant que ça sert le propos de Jodorowsky, de ce point de vue le but est atteint et cette culture abondante (brillament expliquée en détail par les commentaires audio de Jodorowsky présent sur les DVD.) se marie à des délires visuels absolument incroyables.

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Vous l'aurez compris, LA MONTAGNE SACRÉE est une oeuvre unique et un tournant pour bon nombre de cinéphiles, mais c'est un tournant pour son propre réalisateur également, en effet, si Jodorowsky est bien connu pour son EL TOPO et sa MONTAGNE SACRÉE c'est en partie parce que ce sont ses plus beaux films d'un point de vue visuel. Ici, ses délires visuels sont poussés à l'extrême, au maximum, Jodorowsky le dit d'ailleurs lui-même, pourtant de la même façon que le film se divise en deux parties, une partie ésotérique et une autre plus réelle (relativement), cette division se ressent également d'un point purement visuel. En effet, si toute la première partie est d'une beauté à couper le souffle, les décors y sont grandiloquents, baroques, les costumes absolument magnifiques... Tout y est maniéré, exagéré, conçu pour être le plus classe possible, pourtant dans la deuxième partie, Jodorowsky calme un peu son jeu et livre un visuel toujours aussi beau mais bien plus sobre, visuel qu'il gardera pour la réalisation de son SANTA SANGRE. Il est donc clair que LA MONTAGNE SACRÉE constitue un galon important dans la filmographie d'Alejandro Jodorowsky, divisée tout comme son film en deux, une partie est artificielle la ou l'autre est plus réelle, impression confirmée par le fait que Jodorowsky lui-même admet ne plus penser de la même façon qu'a l'époque ou il a réalisé LA MONTAGNE SACRÉE... Ceci dit, pour la partie réelle, c'est assez relatif, parce que réel ou non Jodorowsky reste un réalisateur atypique qui se définit clairement par des délires visuels dont il est le seul à posséder le secret... Cinéaste surréaliste mais également poète macabre, Jodorowsky signe ici son plus beau film, mettant en scène des situations d'une beauté incroyable, d'un onirisme étrange, teintées d'humour mais en même temps d'une ultra-violence rarement égalée. L'alchimie de tous ces éléments donne lieu à des séquences d'une poésie sidérante, durant lesquelles des oiseaux sortent des impacts de balles et ou des crapauds en armures se bastonnent contre des caméléons lors d'une scène purement symbolique...

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Symbolique, LA MONTAGNE SACRÉE, l'est assurémment, c'est d'ailleurs une des choses qui le rend par occasion très difficile à comprendre, Jodorowsky allant presque aussi loin dans la métaphore que dans ses délires visuels. Pourtant, de ce déferlement de thématiques subtiles et complexes se dégagent d'autres thématiques plus évidentes à saisir. Toujours sous l'influence évidente de Tod Browning et de son FREAKS, Jodorowsky prend son temps pour filmer des "freaks", ces êtres qui l'obsèdent et qui représentent physiquement le côté monstrueux des hommes, ce côté monstrueux qui prend souvent le dessus sur le reste, cette séquence ou l'infirme corromp le voleur avec un joint de marijuana en témoigne. Malgré cela, ce n'est pas avec peur, ni avec haine que Jodorowsky filme ses freaks, et s'il y a une peur dans ses films qui y soit liée c'est celle de la perte d'identité que le côté monstrueux de l'homme provoque et qui doit être détruit... Seulement Jodorowsky le fait ici une fois de plus de manière assez étrange, même assez émouvante pour être encore plus précis, le côté monstrueux des hommes étant une fois de plus un personnage attachant bien qu'assez secondaire ici (dans la mesure ou il n'a droit qu'a peu de temps à l'écran) en regard des autres films de Jodorowsky, mais garde une importance symbolique considérable dans cette quête initiatique qu'est LA MONTAGNE SACRÉE, quête initiatique guidée par la réalisation et le scénario d'Alejandro Jodorowsky mais également par le personnage qu'il interprète.

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Si le personnage du voleur se rapproche énormément de Jésus par son apparence et son parcours, l'alchimiste qu'interprète Jodorowsky (avec classe d'ailleurs) se rapproche quand à lui plus de Dieu. Omniscient, immortel, supérieur d'un point de vue intellectuel et capables des plus grands miracles, il guide tout le film et l'emmène vers sa finalité petit à petit. Enigmatique, c'est également un personnage fascinant par les nombreux rites alchimiques qu'on le voit pratiquer et qui lui sont caractéristiques et par son savoir d'un niveau limite divin. Ce savoir s'explique de lui-même par la finalité du film, surprenante comme je l'ai déja dit auparavant mais qui donne également une tout autre dimension a cet alchimiste et explique par la même occasion la présence d'Alejandro Jodorowsky dans ce rôle spécifique, dans lequel il brille par son interprétation, basée sur un scénario maitrisé de bout en bout, timbré certes, mais d'une rare subtilité et renvoyant souvent au cinéma muet, cinéma dans lequel Jodorowsky à oeuvré avec, rappelons-le LA CRAVATE. Ici, Jodorowsky, une fois de plus, montre ses talents de scénariste et livre un film complet et complexe dont la subtilité et le style en font une expérience unique ou le dialogue est presque anecdotique... Jodorowsky parle à travers sa caméra et c'est largement suffisant, ce dernier ayant l'intelligence et le talent pour faire comprendre ce qu'il à a dire simplement par son imagerie.

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Vous l'aurez compris, LA MONTAGNE SACRÉE est un pur ovni, un film difficile à saisir certes mais brillant d'un point de vue formel, Jodorowsky maitrisant son film à tous les niveaux, ce qui en fait une expérience sensorielle forte et unique dont le visuel incroyable vous scotchera à chaque instant, une quête initiatique intense par son imagerie mais également par son propos et son ambiance, passant par tous les registres possibles et imaginables... Tantôt drôle, tantôt poétique, il devient ultra-violent pour partir sur quelque chose de plus subversif pour revenir sur de l'humour et autres bizarreries... LA MONTAGNE SACRÉE est un film qui ne ressemble à aucun autre, qui, pour cette raison, se range clairement aux côtés de TETSUO et autres bizarreries dans la liste des films qui se distinguent le plus de tous les autres... Alors, ne nous voilons pas la face, LA MONTAGNE SACRÉE n'est pas pour tout le monde, son côté jusqu'au boutiste peut notamment rebuter mais par sa dimension unique et ses qualités techniques et scénaristiques, c'est une expérience que tout le monde devrait faire au moins une fois.... Ce film est un chef d'oeuvre tout simplement, certainement un des plus grands films de tous les temps et si vous êtes encore la à lire c'est que vous n'avez pas compris : faites-en une priorité, et profitez-en au passage pour voir si ce n'est pas encore fait les deux autres chefs d'oeuvres d'Alejandro Jodorowsky, EL TOPO et SANTA SANGRE...

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Si vous avez aimé ce film, vous aimerez aussi...

  • EL TOPO, d'Alejandro Jodorowsky.
  • SANTA SANGRE, d'Alejandro Jodorowsky.
  • FANDO Y LIS, d'Alejandro Jodorowsky.
  • LA CRAVATE, d'Alejandro Jodorowsky.

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