Canalblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
ZE LORD OF THE RING
ZE LORD OF THE RING
Publicité
Derniers commentaires
28 juin 2011

COMPANEROS

C1
RÉALISATION
| SERGIO CORBUCCI
ÉCRITURE | SERGIO CORBUCCI, MASSIMO DE RITA, FRITZ EBERT, JOSÉ FRADE ET ARDUINO MAIURI
MUSIQUE | ENNIO MORRICONE

FRANCO NERO | Yodlaf Peterson "The Swede"
TOMAS MILIAN |
El Vasco
JACK PALANCE | John
FERNANDO REY | Professeur Xantos
IRIS BERBEN |
Lola
JOSÉ BODALO | General Mongo

C2


"LEVANTANDO EL AIRE LOS SOMBREROS, VAMOS A MATAR, VAMOS A MATAR COMPANEROS!"

C'est sur cette phrase culte, issue de la bande-son ultra-jouissive d'un Ennio Morricone en folie, que Companeros s'ouvre. Nous sommes en 1970, le western zapata est de plus en plus apprécié par le public (en grande partie grâce au très subversif El Chuncho de Damiano Damiani) et le western italien de manière générale à toujours autant de succès. C'est dans ce contexte que Sergio Corbucci, ennemi juré de Sergio Leone, signe un des meilleurs westerns italiens : Companeros. Pour ceux qui ne connaissent pas le western italien au-dela des oeuvres stylisées de Sergio Leone, je tiens quand même à prévenir, Companeros, et la majorité des westerns italiens que je critiquerai à l'avenir (à commencer par le chef d'oeuvre Keoma, la tuerie absolue El Chuncho et Le grand silence que je verrai très très bientôt.) que ce sont des oeuvres très différentes. Corbucci fait des films hardcores par définition, et très loin de la beauté stylistique des films de Leone. Et même si Companeros fait pale figure en termes de violence face à des oeuvres comme Django ou Keoma, force est de constater que le côté sans concession de chef d'oeuvre en rebutera beaucoup, en particulier s'ils ne sont pas préparés outre-mesure à voir quelque chose de très différent de Le bon, la brute et le truand. Quoiqu'il en soit, inutile de dire qu'a mes yeux, Companeros est une pure réussite, une telle réussite que Sergio Leone, ze big master of ze western made in Cinecitta, s'en est très très inspiré pour son Il était une fois la révolution, ce qui sera une occasion pour les détracteurs de Leone (si si ça existe.) de coller quelques taquets au bonhomme, taquets complètement injustifiés puisqu'effectivement s'il s'inspire de l'oeuvre de Corbucci, Il était une fois la révolution est tout de même très différent de Companeros dans la mesure ou il n'est pas si si sans concession, ni autant basé sur la comédie ni aussi bon que ce dernier.

C3
Car Companeros est une alchimie de tous les registres imaginables : tantôt politique et subversif, il passe au comique, puis à des fusillades dantesques et se termine sur un final aussi émouvant qu'il est épique. Autant dire qu'en termes de générosité, Companeros délivre la marchandise puisqu'on ne s'ennuie pas une seule seconde dans ce film, merci à un rythme incroyable et furieux propre au western zapata (voir El Chuncho, un film qui lui non plus, ne s'arrête jamais.), Corbucci livre un film complet dans sa structure puisque non content d'imposer un rythme incroyable au spectateur de son film, le bonhomme livre une mise en scène, qui, si elle est loin d'égaler le réal "fer de lance" du genre (inutile de dire de qui je parle.), demeure absolument géniale. On trouve donc quelques merveilles visuelles dans ce Companeros, comme par exemple cette charge finale d'un Franco Nero moustachu complètement fou, ou les apparitions de Jack Palance dans un rôle de bad mother fucker zoophile marijuana-crazed mémorable. Et oui, car c'est un autre point ou Companeros brille, et ça pas besoin de voir le film pour le deviner : son casting. Car Companeros est un des rares films de cette époque et de ce genre à ne pas avoir été tourné en post-synchronisé (doublage après le tournage grosso modo.), et cela s'en ressent. Parlant tous en anglais, chaque acteur livre des prestations plus que mémorables, à commencer par celui qui est pour moi le meilleur acteur de westerns de tous les temps, je pense bien évidemment à Franco Nero (Django, Keoma et pour ceux qui ne connaissent pas le western spaghetti, c'est le général Esperanza dans 58 minutes pour vivre.), qui joue ici le rôle d'un traffiquant d'armes suédois (Franco Nero trouvait toujours une excuse pour parler avec sa vraie voix en anglais, ainsi son accent ne genait pas sa crédibilité.), véritable tête à claques ambulante, gros crevard, un sacré enfoiré en somme mais tellement charismatique, tellement bien interprété et composé qu'il en devient attachant, au même titre que Tomas Milian (Le dernier face à face, Tire encore si tu peux, Les 4 de l'apocalypse), bandido sans remords et sans scrupules, mais qui parviendra à trouver une certaine forme de rédemption dans la révolution, car la est tout l'objectif de Companeros, et c'est d'ailleurs une composante commune à une grande partie des westerns zapata : la rédemption et une évolution dans l'idéologie des personnages grâce à une personne qui à tout pour être leur ennemi. Ici, c'est Fernando Rey (French Connection et beaucoup des oeuvres de Luis Bunuel) qui endosse le rôle de rédempteur, celui du professeur Xantos, mexicain instruit très très cool, et surtout, pacifiste. Bien évidemment, parler des acteurs du film sans parler du légendaire Jack Palance serait criminel : bad mother fucker en puissance mais également le personnage le plus barré du film, puisque non seulement c'est un accro a la marijuana mais il semble aussi entretenir des relations, disons, étroites avec Marshall, piaf agacant et menaçant mais également source d'un des moments les plus comiques du film.

C4
Tout ce festival de personnages donne naissance à un aspect scénaristique inattendu dans un western : le nihilisme profond de ce Companeros. Car nihiliste, il l'est assurément, transformant les rebelles pacifistes du début du film petit à petit en révolutionnaires violents, annihilant les plus pacifiques, Sergio Corbucci ne fait pas de cadeaux et montre la violence comme solution à l'oppression et à la violence mais aussi comme la seule solution à ces problèmes, pour cela, Corbucci accorde un travail tout particulier au groupe du professeur Xantos, pacifique en puissance, jugeant la violence comme un mal mais également comme une honte, faisant de ce personnage censé incarner la sagesse dans toute sa splendeur un personnage aux ambitions limite naives, mais surtout irréalisables, en témoigne cette scène ou ce même professeur, dans un élan de colère, envoie une mornifle dans la gueule d'un de ses disciples et en témoigne également cette scène finale très émouvante ou je vais pas vous dire ce qu'il se passe. :-) C'est donc un film nihiliste mais aussi subversif que livre Corbucci, et derrière ce Companeros se cache un aspect sombre et inquiétant que le côté bon vivant et comique du western zapata camoufle légèrement. Companeros, un film couillu? Carrément ouais, ce pourquoi il me gonfle de le voir encore comparé par des gens qui ont visiblement de la merde dans les yeux puisque la ou Il était une fois la révolution est un pur exercice de style comique et jouissif doté d'une légère subversion, Companeros lui est un film engagé dans un propos nihiliste et subversif qui mélange tout comme le film de Leone plusieurs registres.

C5
Car ici se trouve une des plus grandes forces du film, l'aisance dont fait preuve Corbucci pour passer d'un registre à l'autre, ainsi si le film est une oeuvre dans sa globalité complètement barrée, très fun et très drôle illustrée par une bande-son ultra-fun d'Ennio Morricone, au moment des fusillades, Corbucci transforme son Companeros en une oeuvre ultra-violente et sans concession, puis entre deux fusillades envoie des passages se déroulant sous l'égide d'un humour pince sans rire (y a des moments je me demandais s'il fallait que je rigole ou pas.). Finalement toutes ces scènes mènent à un dénouement émouvant mais aussi épique, avec un Franco Nero galopant toutes armes dégainées en criant de toute voix une phrase qui restera à jamais gravée dans votre esprit : "VAMOS A MATAR COMPANEROS", le tout avant un arrêt sur image en rouge et noir à la Red Dead Redemption, la classe (et si la vous n'avez toujours pas envie de voir le film je ne sais plus quoi faire pour vous.). C'est de cette façon que se solde ce qui est pour moi un des meilleurs westerns italiens, un pur chef d'oeuvre que tout le monde se doit le voir au moins une fois.

C6
Malheureusement tout le monde ne pourra pas le voir au moins une fois. La raison est simple : merci à ces enculés d'éditeurs incompétents, Companeros ne peut pas être vu en version originale en France. Il y a bien un DVD, mais assez cher, dénué de bonus, et ne disposant que d'un doublage français de merde. Le même désastre que pour Le temps du massacre de Lucio Fulci en somme (pas étonnant, c'est le même éditeur.). Du coup, pour ces deux films, il n'y a qu'une seule solution pour les voir en VO : le DVD Zone 1. Il faut donc un lecteur DVD dézoné (ce qui n'est guère difficile à faire.) mais surtout des compétences en anglais puisque le film n'existe pas en VOSTFR... Pour les anglophones je tiens toutefois à signaler que Companeros à été édité chez Blue Underground. C'est l'édition que je possède et elle déchire tout, elle est trouvable sur amazon.co.uk pas très cher et tout ce que je peux vous conseiller dessus c'est de vous jeter dessus pour pouvoir vous vanter d'être un des rares en France à avoir vu le chef d'oeuvre Companeros dans les meilleures conditions possibles. Et oui, un chef d'oeuvre, c'est le mot... Alors voyez-le dès que vous en avez l'occasion!

-ZE RING-

C7

Publicité
Publicité
26 avril 2012

THE BLADE

Jaquette
RÉALISÉ PAR | TSUI HARK.
ÉCRIT PAR | TSUI HARK ET KOAN HUI.
MUSIQUE COMPOSÉE PAR | RAYMOND WONG ET WAI LAP WU.

CHIU MAN-CHEUK | Ding On.
MOSES CHAN | Tête d'Acier.
XIN XIN XIONG | Fei Lung.
VALERIE CHOW | La prostituée.

Au Moyen-Âge, en Chine...En apprenant les circonstances tragiques de la mort de son père, Ding On (Chiu Man-Cheuk), un jeune forgeron, décide de retrouver l'assassin de celui-ci. Mais attaqué par une horde de bandits, il perd un bras...

1


Tsui Hark est le fondateur et le fer de lance du mouvement cinématographique hong-kongais né dans les années 80... Toutefois, si ce mouvement est né avec LE SYNDICAT DU CRIME de John Woo, souvent considéré comme le pilier du mouvement, il est très souvent oublié que 6 ans avant cela, Tsui Hark posait toutes les bases de ce dernier avec L'ENFER DES ARMES, c'est-à-dire retourner littéralement le système du cinéma hong-kongais pour ensuite le révolutionner... L'ENFER DES ARMES fut un premier pas, par la suite Tsui Hark ne cessa pas de lancer des modes en produisant bon nombre de films (tels que la trilogie SWORDSMAN ou HISTOIRES DE FANTÔMES CHINOIS, ou encore tout simplement la trilogie du SYNDICAT DU CRIME) mais surtout réalisera bon nombre d'oeuvres de genres divers, l'occasion pour Hark de détourner les codes des genres qu'il exploite avec des oeuvres comme par exemple PEKING OPERA BLUES, THE LOVERS, ou bien THE BLADE. Et c'est de THE BLADE dont il est question aujourd'hui, chef d'oeuvre du Wu Xia Pian (film de chevalerie chinois) qui prend les codes du genre pour littéralement les retourner et livrer un ovni cinématographique, qui, aussi culte soit-il, n'a malheureusement pas tout le respect qu'il mérite.

2
D'un autre côté, rien de bien étonnant, Tsui Hark livrant avec THE BLADE l'oeuvre la plus extrême de sa carrière. En effet, si pendant ses 30 années d'activité, il n'a eu de cesse de rechercher le chaos au cinéma, c'est avec THE BLADE que c'est le plus frappant. Avec ce film, les intentions de Tsui Hark sont très claires : plonger le spectateur dans un chaos visuel et sonore vertigineux, et cela se ressent à l'écran par un montage véritablement furieux ou tout s'enchaine avec une frénésie qui envoie sans aucune pitié tout ce qui s'est fait en la matière 6 pieds sous terre! Ne nous voilons pas la face, THE BLADE c'est du jamais vu, un film ou les choses s'enchainent avec une telle vigueur, une telle force et un tel chaos ambiant qu'il est quasi impossible d'en décrocher... Toutefois, encore faut-il accrocher aux délires visuels d'un Tsui Hark en colère, se servant de sa caméra comme catharsis et balançant toute la noirceur de son oeuvre a la gueule d'un spectateur on ne peut plus démuni. Je le répète, THE BLADE est l'oeuvre la plus extrême et la moins équilibrée de son réalisateur, pour cette raison, beaucoup resteront sur le carreau et ne parviendront jamais à rentrer dans le film... Les pauvres, tant THE BLADE est une oeuvre unique en son genre qui envoie chier sans aucune concession tous les codes du genre qu'il exploite pour devenir quelque chose de véritablement exceptionnel. Vision sans concession et noire du mythe du sabreur manchot, exploré dans les mythiques UN SEUL BRAS LES TUA TOUS et LA RAGE DU TIGRE (pour ne citer qu'eux), THE BLADE est également l'occasion de plus pour son réalisateur d'explorer la facette de l'homme (et je veux bien dire l'homme, pas l'être humain) la plus noire et la plus désespérée. Nihiliste, THE BLADE l'est assurément et sert, comme d'hab, d'intermédiaire entre ce fou furieux de Hark et un spectateur qui ne sait pas encore quel constat obscur il va se prendre dans les dents. C'est bien simple, Tsui Hark livre une vision tellement réaliste d'une époque souvent romancée qu'elle en devient presque excessive de noirceur!

3
En conséquence, il n'y a rien de plus efficace pour montrer le chaos et l'horreur du contexte du film que les choix de mise en scène de Tsui Hark... Discutables sans doute pour ceux qui n'adhèrent pas aux délires visuels du monsieur mais on ne peut plus efficaces pour ceux qui réussissent à rentrer dans son trip. THE BLADE, à bien des égards, pourrait sembler bordélique, pourtant, il est clair, du moins lorsqu'on regarde le film avec ses yeux, que le chaos que Tsui Hark met en scène est paradoxalement on ne peut plus réfléchi... Le montage frénétique est d'une organisation rigoureuse et minutieuse, d'ou la réussite indéniable de l'entreprise : à des plans superbes s'allie un montage on ne peut plus fou, donnant lieu à une orgie visuelle certes parfois perdant un peu trop le spectateur mais le plongeant dans une immersion à toute épreuve... A cela se rajoute un travail sonore absolument assourdissant, l'élément supplémentaire montrant clairement la visée de Tsui Hark : attaquer les sens de la manière la plus viscérale envisageable. Le tout fonctionne a merveille, confronté à ce chaos des plus extrêmes, le spectateur ne sait vraiment plus ou se mettre! Dans cette situation, le spectateur ne peut qu'être ébahi face à des bastons incroyablement chorégraphiées, dans lesquelles se mélangent prouesses martiales sidérantes et violence percutante, à ce titre, le combat final est très certainement la meilleure scène de baston jamais réalisée, un véritable monument de barbarie jamais égalé!

4
Dans tout ce bordel, Tsui Hark ne peut s'empêcher de jouer avec les codes de son histoire... Ainsi du personnage chevaleresque qu'était le sabreur manchot dans LA RAGE DU TIGRE, on passe à Ding On, sabreur impitoyable en quête de vengeance... Ce qui n'est pas un hasard puisque le tout s'inscrit directement dans une optique on ne peut plus "Harkienne". En effet, si ses films sont souvent considérés comme des "films d'hommes" (tout comme son pote John Woo), ce sont les femmes qui sont au centre de ces derniers et THE BLADE ne fait pas exception... Pour s'en convaincre, il suffit de regarder les 2 premières minutes du film, ou dès le départ la narration est donnée par une femme, personnage pivotal du récit, pivotal dans le sens ou THE BLADE est tout autant un film de sabre que c'est une histoire d'amour, on ne peut plus nihiliste certes (comme c'est souvent le cas avec Tsui Hark) mais une histoire d'amour quand même, montrant une fois de plus la propension qu'a Tsui Hark à manipuler sans aucune limite la codification des genres... Ce qui n'a pas de limites non plus chez Tsui Hark, c'est son ambition. En effet, s'il est bien connu pour son génie il l'est également pour son ambition presque mégalomaniaque, ce qui a donné lieu, par exemple, à des coupes de 2 heures sur son génial SEVEN SWORDS et donc a des défauts narratifs évidents... Fort heureusement, pas de ça ici, la narration est claire comme de l'eau et véritablement ingénieuse, en conséquence, THE BLADE est une oeuvre d'une fluidité incroyable mais qui s'avère être en plus brillament écrite... THE BLADE avance d'idée scénaristique brillante en idée scénaristique encore plus brillante, doublés d'idées visuelles époustouflantes (la scène ou Ding On s'entraîne... Quel pied!) renforcé par le talent technique sidérant d'un Tsui Hark au sommet de sa forme.

5
Vous l'aurez compris, THE BLADE est une oeuvre exceptionnelle, qui, par sa forme on ne peut plus extrême, ne plaira certes pas à tout le monde mais demeure une expérience qui vaut le coup d'être tenté! THE BLADE est sans doute le Wu Xia Pian ultime, le chef d'oeuvre de tout un pan du cinéma asiatique... Une oeuvre nihiliste et noire mais aussi un plaisir sensoriel incroyable et sans aucun égal. THE BLADE est une oeuvre d'une très grande importance, et d'une très grande influence sur le cinéma dans sa globalité, par ailleurs, au cas ou mon conseil ne serait pas suffisant, Quentin Tarantino ne cesse de faire l'éloge du film et va même jusqu'a dire de Tsui Hark que c'est le meilleur metteur en scène de tous les temps... Et vous vous doutez bien que je suis d'accord. ;)

CLIQUEZ ICI POUR ACCÉDER A LA GALERIE COMPLETE DU FILM

7
Si vous avez aimé ce film, vous aimerez...

  • L'ENFER DES ARMES de Tsui Hark.
  • SEVEN SWORDS de Tsui Hark.
  • TIME AND TIDE de Tsui Hark.
  • LA RAGE DU TIGRE de Chang Cheh.

-ZE RING-

BANNIERE

2 juin 2011

IL ÉTAIT UNE FOIS EN AMÉRIQUE

AMERICA1

RÉALISATION | SERGIO LEONE
ÉCRITURE
| SERGIO LEONE, FRANCO FERRINI, FRANCO ARCALLI, ENRICO MEDIOLI, PIERO DE BERNARDI, LEONARDO BENVENUTI, ERNESTO GASTALDI, ET STUART KAMINSKI A PARTIR D'UNE NOUVELLE DE HARRY GREY.
MUSIQUE | ENNIO MORRICONE

ROBERT DE NIRO | David "Noodles" Aaronson
JAMES WOODS | Maximilian "Max" Bercovicz
ELIZABETH McGOVERN |
Deborah Gelly
JAMES HAYDEN | Patrick "Patsy" Goldberg
WILLIAM FORSYTHE | Philip "Cockeye" Stein
LARRY RAPP | "Fat" Moe Gelly
TUESDAY WELD | Carol
TREAT WILLIAMS | James Conway O'Donnell
RICHARD BRIGHT | Chicken Joe
DANNY AIELLO | Vincent Aiello
JOE PESCI | Frankie Minaldi
BURT YOUNG | Joe

AMERICA2


Nous y voila. La fin de la carrière de Sergio Leone. Son dernier film, et, accessoirement, son meilleur, j'ai nommé Il était une fois en Amérique. Atteindre la perfection est chose impossible, surtout au cinéma, il est possible de s'en rapprocher énormément mais jamais de l'atteindre, et dire qu'avec Il était une fois en Amérique on tient un film qui se rapproche de la perfection est peu dire tant le film est l'oeuvre la plus proche de la perfection d'un perfectionniste, Sergio Leone. Malheureusement, Il était une fois en amérique, qui dure 3h40 et est monté dans un ordre non-chronologique, à été massacré au montage en Amérique : le film à été remis dans son ordre chronologique, ce qui ne fait aucun sens, presque 2 heures de métrage ont été amputées et le bouquet, Ennio Morricone n'a même pas été crédité au générique pour sa musique! La honte, encore un bel exemple de l'ouverture d'esprit des Américains et de leur volonté de mettre main basse sur tout : que ce soit pour le pétrole ou pour le cinéma, partout ou ils passent ils foutent la merde mais je ne pense pas vous apprendre grand chose... A ce jour, la version de 3h40 visible en DVD du film n'est pas la version intégrale de celui-ci... Le syndrome Une balle dans la tête en somme. Et il n'y a pas de contenu ultra-violent ou ultra-sexuel dans ce film pour justifier de telles coupes, juste une volonté de couper la moitié du film pour faire le double de recettes... Messieurs les Américains, vous êtes des enculés, je doute que grand monde se sente ici visé par cette accusation mais peu importe, c'est la colère qui parle.

AMERICA3
La première chose qui interpelle avec Il était une fois en Amérique (et pour être interpellé par ça suffit de lire les noms sur la boite.) c'est son casting : Robert De Niro, James Woods, Richard Bright ainsi que Joe Pesci et Burt Young dans des rôles très secondaires, rien que ça. Avec un tel casting, inutile de dire que du point de vue "acteurs" Il était une fois en Amérique est une totale réussite, tous les acteurs se donnant à fond : inutile de parler de la qualité de la prestation de Robert De Niro qui tient ici un de ses meilleurs rôles, par contre James Woods lui tient très clairement le rôle de sa vie, il est tellement investi dans son rôle qu'il parvient même à tenir la mesure avec De Niro et Pesci, qui fait une apparition qui bien fait plaisir aux côtés de... Burt Young! Qui je le rappelle joue le rôle de Paulie dans Rocky, oui je sais voir ce mec dans un film de mafieux est assez inattendu mais peu importe puisque sa courte apparition est complètement géniale, quoi qu'il en soit, ici les acteurs ont un rôle très important dans la mesure ou l'on suit les deux même personnages pendant 3h40, 3h40 constituées de flashbacks, flashbacks qui commencent pendant l'enfance du personnage de De Niro (à ce titre, les gamins qui jouent les protagonistes enfants sont génialissimes) et qui remontent jusqu'a l'époque contemporaine... Une véritable fresque cinématographique en somme, le genre de film qui laisse présager un brise-coeur comme fin et Il était une fois en Amérique ne déroge pas à cette règle sacro-sainte du genre, puisque le film est de loin l'un des plus émouvants qu'il m'ait été donné de voir, à la fin de ce chef d'oeuvre retenir ses larmes est chose difficile... Et ceux qui pensent ne jamais pleurer devant un film de mafieux, je dirai simplement que c'est pas parce que y a De Niro et Pesci dans le même film que celui-ci ressemblera aux Affranchis, non, dans Il était une fois en Amérique le personnage principal est nostalgique, en proie aux remords et est très loin des personnages des bad mother fuckers impitoyables et opportunistes dépeints dans les films de Scorsese, en somme, à tous les détracteurs des Affranchis et de Casino, vous pouvez vous jeter les yeux fermés sur Il était une fois en Amérique qui se rapproche en réalité plus d'un drame que d'un film de gangsters pur souche. La vision particulière du milieu de Leone fait ainsi d'Il était une fois en Amérique une oeuvre aussi nostalgique que son protagoniste, et Leone s'investit tellement dans son film qu'on pourrait presque le sentir vieillir en même temps que les personnages dont il dresse le portrait... Émouvant? Carrément oui, surtout quand on sait que Leone est mort quelques années après ce film, personnellement à l'époque ou j'ai vu ce film j'avais 9 ans et je n'étais pas au courant que Leone était décédé, mais à la vision d'Il était une fois en Amérique j'ai tout de suite senti qu'il avait quelque chose de spécial... Et ce quelque chose de spécial, c'est quelque chose de très simple : Il était une fois en Amérique est le chant du cygne de son auteur.

AMERICA4
C'est donc une oeuvre hors pair que nous livre Sergio Leone avec Il était une fois en Amérique. Et ceux qui ne l'ont pas encore vu comprendront très facilement ma colère envers ces chers Américains pour avoir charcuté ce chef d'oeuvre après l'avoir vu... Tout est absolument brillant : les acteurs sont géniaux cela va sans dire mais le reste l'est également. Et que pour la première fois Leone quitte le western ne change rien à la qualité de sa mise en scène : même si elle est ici bien plus sobre on trouve quelques moments qui se démarquent du reste par leur mise en scène magistrale, ce moment de suspense en début de film dans le bar de Fat Moe est un brillant exemple, en somme Leone en restant plus sobre que dans ses précédentes oeuvres réussit tout de même le pari de livrer une mise en scène immersive à souhait et loin d'être démunie de purs moments de gloire, la classe. Et puis cette mise en scène s'étend même dans le scénario, encore une fois et pour la troisième fois, Leone soulève le doute sur son personnage principal, et ce par le biais de flashbacks, la différence par rapport a ses deux précédents films c'est que ces flashbacks ne font ici pas office de retournement de situations mais permettent d'amener le retournement de situation, au passage, ce dernier vous laissera sur le cul et vous foutra les larmes aux yeux... Mais je m'en voudrais de spoiler donc je n'en dis pas plus : une chose est sure, Il était une fois en Amérique n'est pas un film qu'il faut remettre dans son ordre chronologique tant il perd de son sens... Par ailleurs, non content de faire de son personnage principal un personnage ambigu, et de livrer un retournement de situation plus qu'inattendu, Leone laisse aussi planer le doute sur deux des éléments les plus importants de la conclusion de son oeuvre... Il était une fois en Amérique est donc une oeuvre scénaristiquement intelligente, soutenue par une mise en scène génialissime et par une musique sublimissime du légendaire Ennio Morricone, mais ses qualités ne s'arrêtent pas la.

AMERICA5
Et oui, car au milieu des vedettes que sont De Niro et Woods on retrouve aussi des acteurs secondaires génialissimes... Les quelques apparitions d'Elizabeth McGovern (qui tient ici un rôle majeur.) sont géniales, celles de Danny Aiello (qui donne son nom à son personnage.) sont très savoureuses, Richard Bright, un des acteurs fétiches, affiche ici une sale gueule incroyable et livre une très bonne prestation, Treat Williams est très bon et James Hayden, William Forsythe, Larry Rapp et Tuesday Weld malgré leurs peu de répliques font preuve d'une présence étonnante et s'intègrent parfaitement au récit, récit dôté d'un rythme d'une rare qualité, en effet, sur les 3h40 de métrage il n'y a pas une seule seconde qui soit chiante, le tout se suit et s'enchaine avec une aisance et un confort déconcertant, 3h40 qui servent au développement de personnages attachants et charismatiques et qui mènent à un dénouement fatidique qu'on préférerait tous éviter une fois qu'on le connait tant il est déchirant... Et pourtant, paradoxalement, ceux qui sont comme moi ne pourront s'empêcher de mater le film 5 fois d'affilée tant il est sublime. Leone fait le récit d'une histoire difficile et sans faire preuve de violence graphique excessive, d'un autre côté, Il était une fois en Amérique sera choquant pour certains et particulièrement pour les femmes, je m'explique, des trois femmes qu'il y a dans le film, une est une pute et les deux autres se font violer. Mais doit-on interpréter Il était une fois en Amérique comme une oeuvre machiste pour autant? Non et à la limite même si la réponse à cette question était oui, peu importe dans la mesure ou Il était une fois en Amérique est le récit de la vie de Noodles tel que celui-ci la voit...

AMERICA6
Niveau dialogues, Il était une fois en Amérique est un film d'exception, en même temps avec Leone et Gastaldi sur le même film pas de quoi s'étonner, d'ailleurs l'écriture du film à pris 12 ans, donc en soit le fait que celui-ci soit bien écrit est loin d'être surprenant mais il vaut tout de même le coup d'être noté : des répliques cultes, y en a un paquet, et toutes servent une fonction précise, Leone préférant exprimer ce qu'il à a exprimer par sa mise en scène plutôt que par des dialogues, un exercice difficile mais que Leone réussit sans mal (challenge qu'il avait déja relevé et réussi avec son western Il était une fois dans l'ouest, ce mec était un génie.). Le scénario d'Il était une fois en Amérique, parfait? Certainement, le scénario de ce film en plus d'être superbement écrit étant génialement structuré, rajoutez à cela des acteurs de génie, une mise en scène de génie et une musique à pleurer et vous tenez un chef d'oeuvre absolu, maintenant si vous êtes assez fort pour me trouver un autre défaut à ce film que le faux grain de beauté du gosse qui joue Noodles enfant, je vous félicite... Car Il était une fois en Amérique est clairement à mes yeux un des meilleurs films de tous les temps, et dire que Leone en plus de rentrer dans la légende avec ce film tire sa révérence avec une classe incroyable est peu dire... En somme, vous allez vous depêcher d'acheter le film et de le mater avant que je m'énerve. :-D

-ZE RING-

AMERICA7

16 mai 2012

THE BUTTERFLY MURDERS

Jaquette

RÉALISÉ PAR | TSUI HARK.
ÉCRIT PAR | FAN LIN ET CHI-MING LAM.
MUSIQUE COMPOSÉE PAR | FRANKIE CHAN.

SIU-MING LAU | Fong Hong-Ye.
SHU TONG WONG | Tian Feng.
MICHELLE YIM | Ombre Verte.
KUO-CHU CHANG | Shem Qing.

Une nuée de papillons meurtriers envahit un château féodal.

1


A la fois dans l'histoire du cinéma hong-kongais et dans la filmographie du très grand Tsui Hark, THE BUTTERFLY MURDERS s'impose comme une date très importante. Premier film de son réalisateur, qui depuis s'est avéré être un véritable maître avec des oeuvres magnifiques comme THE BLADE, PEKING OPERA BLUES ou DANS LA NUIT DES TEMPS, THE BUTTERFLY MURDERS marque un tournant dans l'histoire du cinéma HK dans la mesure ou il s'agit très certainement du premier de la nouvelle vague hong-kongaise, composée de réalisateurs comme Patrick Tam, Ann Hui, et bien sur Tsui Hark. THE BUTTERFLY MURDERS est un film véritablement intéréssant, d'autant plus intéréssant aujourd'hui qu'il témoigne de l'évolution formelle des oeuvres du cinéaste le plus important de l'histoire de Hong Kong, mais en plus, s'avère être une alternative hardcore au dernier film en date du monsieur... DETECTIVE DEE. Alternative hardcore que l'on doit d'ailleurs entièrement à l'éditeur HK VIDEO, qui à réuni dans un superbe coffret ce film et deux raretés, HISTOIRES DE CANNIBALES et L'ENFER DES ARMES, quasiment introuvables en dehors de la France... Je doute que les gens dont il est question puissent me lire, mais un merci est la moindre des choses, d'autant plus que leurs éditions sont d'une grande qualité.

10

Dès les premières images, THE BUTTERFLY MURDERS s'annonce comme un pur film de jeune énervé. En effet, Tsui Hark, en 1979, n'a que 28 ans. Il ne sait pas comment il va faire son film, ni même ce qu'on attend de lui. THE BUTTERFLY MURDERS est le résultat étonnant de ces frustrations. Tsui Hark fait dès son premier film preuve d'une inventivité que l'on retrouvera par la suite dans toutes ses oeuvres... Plaçant pour commencer son oeuvre dès le départ dans un univers visuel violent et craspec (par ailleurs renforcé involontairement par la mauvaise qualité de la copie originale... D'aussi bonne qualités soient les éditions d'HK VIDEO, on ne peut pas tout restaurer.) et dans un contexte novateur dans la mesure ou il comporte autant d'éléments historiques avérés que d'éléments relevant limite de la science-fiction. Tsui Hark le dit lui-même, ne sachant pas quoi faire, il s'est laissé aller sur ce film, le résultat est un mélange des genres extravaguant mais cohérent et solide, une relecture radicale du Wu Xia Pian classique ou se mélangent combats de sabre, enquête policière, et scènes d'horreur renvoyant inévitablement aux OISEAUX d'Alfred Hitchcock. Toutefois, Tsui Hark ne se base pas sur le suspense pour faire fonctionner, bien que ce soit très certainement ce qui est attendu de lui, mais signe en réalité une fable subversive ultra-violente dont l'univers visuel particulier à vite fini de faire de THE BUTTERFLY MURDERS un ovni des plus fous. Sans aucune retenue, Tsui Hark balance tout ce qu'il a avec panache dans la gueule du spectateur, que ce soit sa hargne ou ses frustrations ou bien son amour évident du cinéma.

14

En effet, il faudrait être le roi des bigleus ou le dernier des cons pour ne pas se rendre compte très vite que THE BUTTERFLY MURDERS est avant tout une véritable déclaration d'amour au cinéma, rendant hommage à moults classiques, à commencer par LES OISEAUX, et détournant sans aucun complexe le Wu Xia Pian dans le seul but de le révolutionner et donc, par conséquent, de le renouveler, Hark fout tout ce qu'il a revendre dans cet ovni surréaliste... Il en va de même pour sa colère, par conséquent, THE BUTTERFLY MURDERS s'avère être une oeuvre méchamment subversive dans laquelle tout le monde se prend sa petite baffe. Dénoncant l'hypocrisie et, bien évidemment, la violence de l'être humain, il n'y va pas de main montre pour montrer son propos simple mais virulent. Ultra-violent, THE BUTTERFLY MURDERS l'est assurémment, ici pas de bouffons qui se tapent à coups de feuilles mortes et d'écharpes mais de la violence qui claque et pète a la gueule d'un spectateur démuni... A ce titre, si le film fut très bien reçu par la critique hong-kongaise de l'époque, il en demeura un bide commercial, et pour cause! On connait sans doute tous la sensibilité exacerbée du peuple hong-kongais, rien de bien étonnant du coup, à la vision de ce BUTTERFLY MURDERS, à ce qu'il se soit méchamment mangé... Car cette oeuvre n'est ni plus ni moins le premier pas vers la révolution si longtemps voulue par Tsui Hark, jusqu'a ce qu'il finisse par retourner sur sa gueule toute l'industrie du cinéma hong-kongais, notamment avec l'aide de son vieux pote John Woo, et ce n'était qu'un début. HISTOIRES DE CANNIBALES et L'ENFER DES ARMES, les deux oeuvres suivantes du monsieur, vont encore plus loin que THE BUTTERFLY MURDERS, qui n'y va déja pas avec le dos de la cuillère!

11

Vous l'aurez compris, THE BUTTERFLY MURDERS est un film subversif et hardcore, mais ce n'est pas la sa seule qualité. Et oui, car avant tout, ce qui est magnifique avec Hark, c'est sa capacité à réinventer perpétuellement le cinéma tout en fournissant des oeuvres particulièrement divertissantes. Cette première oeuvre ne fait pas exception. Si THE BUTTERFLY MURDERS reste une oeuvre étrange et singulière, elle demeure très accessible et surtout très agréable à regarder... On s'en prend plein la gueule pendant 1 heure et demi. Que ce soit au travers de bastons majestueusement chorégraphiées et reposant sur des artifices classes et novateurs, ou d'une enquête policière magnifiquement écrite et narrée, THE BUTTERFLY MURDERS ne cesse de surprendre et de divertir le spectateur. On ne s'y ennuye jamais une seule seconde, il y a toujours quelque chose pour capter l'attention. L'histoire, construite en "tiroirs" multiplie les enjeux et les mystères, et si le tout peut parfois s'avérer assez confus, en soit peu importe, THE BUTTERFLY MURDERS reste très compréhensible. Pourtant, l'enquête policière du film est assez étrange, et complexe, et n'est pas sans rappeler, comme je le disais, la dernière oeuvre de Tsui Hark, DETECTIVE DEE. Les deux films sont d'ailleurs assez comparables, leurs histoires ont pas mal de points communs, mais surtout, ils partagent le même mélange des genres complètement loufoque... Dee est ici remplacé par Fong Hong-Ye, personnage aux motivations floues mais au large intellect dont il est toujours agréable de suivre les raisonnements et les déductions. Par ailleurs, concernant les personnages, si les interprétations des divers acteurs du film sont honnêtes, elles sont toutefois loin d'être transcendantes, mais les personnages demeurent crédibles et vivants, merci a un scénario bien conçu et très bien écrit qui n'échappe malheureusement pas, par courts instants, aux éceuils de longueurs, dont on se serait sans doute bien passés...

7

Dans tout cela, la mise en scène de Tsui Hark est aussi magistrale que d'ordinaire. Celle-ci se distingue et ce malgré tous les défauts d'images clairement visibles sur la copie et le manque de moyens évidents... Si la narration du film est innovante, ce n'est rien en regard de son visuel, Hark enchaîne les trouvailles qui dégomment et signe des plans absolument sublimes (comme le plan final, sans doute l'un des plus beaux qu'il m'ait été donné de voir). Mais son génie éclate avant tout dans des scènes de baston renversantes, magnifiquement chorégraphiées par ailleurs, dans lesquelles Hark s'amuse, comme à son habitude, à semer le chaos à l'écran. Le résultat : THE BUTTERFLY MURDERS est un film plus ou moins bordélique mais ou tout est lisible et les scènes d'action se suivent sans aucune difficulté. Le film avance d'idées loufoques en idées encore plus loufoques, comme c'est bien souvent le cas chez Tsui Hark, jusqu'au final, qui vous trouera assurément le cul par son nihilisme et les idées visuelles délirantes qui y sont développées...

3

Dans la catégorie "premiers films de réalisateurs renommés", THE BUTTERFLY MURDERS place la barre très haut. On y ressent déja la patte de Tsui Hark, qui expérimente, détourne, cherche et le plus souvent trouve des idées complètement délirantes et magnifiques... Le tout a vieilli, bien sur, notamment au niveau de l'image mais cela n'entâche jamais le génie visuel du maître, de paire avec un scénario solide... THE BUTTERFLY MURDERS est un film suffisamment novateur et important pour qu'on s'y attarde, d'autant plus que Hark y développe un propos subversif intéréssant... Hark prendra d'ailleurs le bide commercial du film comme un échec personnel et ira encore plus loin dans la provocation et la subversion avec les très controversés HISTOIRES DE CANNIBALES et L'ENFER DES ARMES... Mais ceux-la, on y reviendra plus tard. En l'état, THE BUTTERFLY MURDERS reste un excellent film, loin d'être dépourvu de défauts certes, mais pourvu de suffisamment de qualités pour qu'on jette un coup d'oeil attentif. A voir!

6

SI VOUS AVEZ AIMÉ CE FILM, VOUS AIMEREZ...

  • L'ENFER DES ARMES de Tsui Hark.
  • HISTOIRES DE CANNIBALES de Tsui Hark.
  • THE BLADE de Tsui Hark.
  • DETECTIVE DEE de Tsui Hark.

-ZE RING-

15

15 juin 2012

TURKISH STAR WARS

turkish star W

RÉALISÉ PAR | CETIN INANC.
ÉCRIT PAR | CÜNEYT ARKIN.

CÜNEYT ARKIN | Murat.
AYTEKIN AKKAYA | Ali.
FÜSUN USAR | Bilgin'in Kizi.

L'humanité vit paisiblement et possède une technologie avancée. Mais des méchants hommes veulent utiliser cette technologie pour devenir immortels. S'opposent alors l'Empire Tyrannique et les gentils humains. Pour se protéger des méchants, les gentils créent un bouclier autour de la Terre. Les méchants veulent alors s'emparer du cerveau des humains pour conquérir notre planète.

turkish_star_wars2


Oliver revient avec une critique de nanar en plus.... Sans doute la dernière... Alors autant finir en beauté! Après cela viendra une nouvelle critique, d'un nouveau rédacteur dont je ne dévoilerai pas l'identité maintenant... Et peut-être un cycle sur la trilogie STREET FIGHTER avec Sonny Chiba! A bientôt! -ZE RING-


Attention, vous avez devant vous le nanar ultime ! J'ai nommé TURKISH STAR WARS, réalisé par Cetin Inanç en 1982.
Pour l'anecdote, TURKISH STAR WARS est considéré comme le film le plus nul de toute l'histoire du cinéma, un titre qu'il partage avec la bisserie réalisée par Ed Wood, PLAN 9 FROM OUTER SPACE.
A noter qu'il existe une suite, donc, TURKISH STAR WARS, sorti en 2006, que je n'ai hélas pas vu, mais qui semble parodier les films de science fiction à succès, tout en effectuant quelques clins d'oeil à son prédécesseur.

Avec TURKISH STAR WARS, Cetin Inanç retrouve son acteur (enfin... acteur...) fétiche, Cüneyt Arkin, qui s'est surtout distingué dans des productions douteuses aux titres évocateurs.

TSW

Au hasard, nous citerons TURKISH FIRST BLOOD, plus connu sous le nom de VAHSI KAN. Difficile de résumer un film tel que TURKISH STAR WARS.
L'introduction de cette série Z a le mérite de présenter les hostilités via un montage épileptique, brouillon, totalement incompréhensible et reprenant certaines séquences spatiales de STAR WARS : LA GUERRE DES ÉTOILES.

turkish_star_wars_01

C'est aussi ce montage complètement foireux qui va contribuer à rendre ce nanar populaire sur la Toile. L'air de rien, avec les années, TURKISH STAR WARS s'est taillé une solide réputation sur le net.
Pour bien comprendre de quoi il en retourne, il est nécessaire de dévoiler les grandes lignes du scénario.
Donc, attention, ça risque de faire mal au plus profond du trou de balle !
Dans le futur, l'Humanité vit paisiblement et possède une technologie très avancée. Toutefois, le vil Sorcier de l'Empire Tyrannique, une sorte de Dark Vador à la sauce kebab, veut s'emparer du cerveau humain pour devenir immortel.
Murat et Ali, deux pilotes de vaisseaux spatiaux, s'écrasent sur une planète inconnue. Sur place, ils doivent faire face à un territoire hostile et dominé par la dictature du Sorcier galactique. Voilà pour les hostilités d'un scénario définitivement à la ramasse !
Pour ceux qui auraient compris quelque chose, merci de m'écrire de toute urgence !

turkish_star_wars_5
Le Dark Vador turc...

Vous l'avez donc compris: TURKISH STAR WARS est une série Z fauchée qui doit composer avec les moyens du bord, soit la totalité du SMIC albanais (enfin... le SMIC turc en l'occurrence). L'image est parfois très floue, saccadée et le film passe souvent d'une séquence à une autre sans établir de liens logiques.
La bande originale du film reprend la musique du long-métrage original, ainsi que celle d'INDIANA JONES mais en mode cacophonique et inaudible.


Pour le nanardeur averti, il faudra donc se boucher les oreilles, sans compter que parfois, sans que l'on comprenne pourquoi, un homme masqué (un monstre peut-être?) apparaît sans crier gare, les scènes étant régulièrement entrecoupées par des séquences spatiales totalement incompréhensibles.
Pour le reste, TURKISH STAR WARS contient de nombreuses séquences d'anthologie. Enfin... d'anthologie... Tout du moins, sur le baromètre du nanar !


Plus qu'un film de science fiction, TURKISH STAR WARS est aussi un film d'arts martiaux à la sauce harissa. Il faudra donc se contenter de combats totalement surréalistes avec des monstres moisis, des bonhommes en mousse, des squelettes enrobés dans une sorte de papier toilette... et la liste est longue !
A cela, rajoutez quelques séquences de trampoline durant lesquelles le héros, Murat (Cüneyt Arkin) effectue des sauts périlleux, et des bonds sur le sol pour mieux atterrir sur la tronche de ses ennemis en carton !

Les exemples sont hélas nombreux. Toujours est-il que le spectacle est totalement indescriptible et dépasse les limites de la connerie filmique ! Tout nanardeur digne de nom se doit d'avoir vu TURKISH STAR WARS!
Encore une fois, c'est la réalisation totalement bordélique de Cetin Inanç qui fait la différence ! Ed Wood et son PLAN 9 FROM OUTER SPACE peuvent aller faire un petit tour ! Encore une fois, TURKISH STAR WARS est le nanar ultime.


Ne cherchez plus, vous avez devant vous le film le plus nul de toute l'histoire du cinéma. Pourtant, malgré tous ses défauts (et ils sont extrêmement nombreux), TURKISH STAR WARS reste un film hors norme dans le noble septième art et un bijou de nanardise dans le monde du cinéma.
D'ailleurs, peut-on encore réellement parler de cinéma ? Telle est la question. Je vous laisse donc apprécier les photos et les diverses vidéos. Toutefois, faites gaffe, on ne s'en remet vraiment pas facilement !

SI VOUS AVEZ TELLEMENT RI DEVANT CE NANAR QUE VOUS EN AVEZ EU MAL AUX MUSCLES ABDOMINAUX, ALORS VOUS DEVEZ VOIR...

  • PLAN 9 FROM OUTER SPACE d'Ed Wood.
  • DEATH WARRIOR de Cetin Inanç et Cüteyn Arkin.
  • TURKISH FIRST BLOOD de Cetin Inanç.
  • LES RATS DE MANHATTAN de Bruno Mattéi.

-ALICE IN OLIVER-


Publicité
Publicité
25 septembre 2011

ZOMBI 2

ZOMBI2 JAQ

L'ENFER DES ZOMBIES A.K.A ZOMBI 2 A.K.A ZOMBIE FLESH EATERS A.K.A ISLAND OF THE LIVING DEAD A.K.A ZOMBIE

RÉALISÉ PAR | LUCIO FULCI.
ÉCRIT PAR | ELISA BRIGANTI ET DARDANO SACCHETTI.
MUSIQUE COMPOSÉE PAR | FABIO FRIZZI.

TISA FARROW | Anne Bowles.
IAN McCULLOCH | Peter West.
RICHARD JOHNSON | Dr. David Menard.
AL CLIVER | Brian Hull.
AURETTA GAY | Susan Barrett.
STEFANIA D'AMARIO | L'assistante de Menard.
OLGA KARLATOS | Paola Menard.

ZO1
Le plus beau zombie de l'histoire du cinéma?


ATTENTION, ÂMES SENSIBLES!

Bon avant de commencer à parler de ce qui nous intéresse ici, je tiens à dire deux choses. premièrement, L'ENFER DES ZOMBIES est bien connu pour son côté gore outrancier (qui lui a valu le rang de Video Nasty en Angleterre.). En gros, âmes sensibles, grands-mères, enfants et auteuristes intellos, il est mieux que vous ne voyez pas ce film et donc que vous ne perdiez pas de temps à lire cette critique. La deuxième chose, et je m'en excuse profondément, c'est que je ne serai pas capable de vous fournir pour cet article en images de qualité pour la bonne et simple raison que mon DVD ne fonctionne pas sur mon ordinateur! C'est le risque des occasions, mais je me dis qu'heureusement que ma PS3 fait abstraction des rayures géantes se trouvant dessus... Pour en revenir à L'ENFER DES ZOMBIES, c'est un film important, pour une raison simple : il a apporté la gloire a Lucio Fulci, grand réalisateur qu'une bande de critiques visiblement abrutis n'a cessé de descendre durant ses années actives et qui avant ce premier film de zombies s'était imposé comme un grand nom du cinéma d'exploitation italien avec des oeuvres comme LA LONGUE NUIT DE L'EXORCISME, BEATRICE CENCI, LE VENIN DE LA PEUR, L'EMMURÉE VIVANTE et même un western assez étrange, LES 4 DE L'APOCALYPSE, toutes des oeuvres que l'on peut aisément qualifier de hardcore (les deux premiers que j'ai cité sont méchamment subversifs, le spaghetti de Fulci est vraiment bizarre et les deux autres sont graphiquement loin d'être piqués des vers). Malgré tout, aussi hardcore soient-elles les premières oeuvres du grand Fulci ne sont rien en regard de L'ENFER DES ZOMBIES, première incursion du maître dans le gore qui tache outrancier et dans le genre qui lui à apporté sa renommée internationale : le film de zombies.

ZO2
En effet, si ses gialli et ses westerns lui ont valu des critiques horriblement négatives, L'ENFER DES ZOMBIES à carrément permis aux oeuvres de Fulci de se diffuser dans le monde. Premier grand succès de Fulci, c'est aussi son premier film d'horreur, genre qu'il n'affectionnait pas particulièrement et qu'il aborda avec L'ENFER DES ZOMBIES pour la première fois par pur besoin financier (ce qui n'est pas étonnant au vu du personnage.), L'ENFER DES ZOMBIES est également bien connu pour son titre original : ZOMBI 2, collé au film par des producteurs peu scrupuleux pour surfer sur le succès du chef d'oeuvre de George A. Romero, ZOMBIE... C'est donc avec soulagement et bonheur qu'on se rend compte que L'ENFER DES ZOMBIES n'a rien à voir avec le film de Romero, en effet en jetant à la poubelle toute forme de propos politique ainsi que tout le côté visionnaire qui caractérisent l'oeuvre de Romero, et surtout en adoptant un univers visuel à l'opposé de celui de ZOMBIE, Fulci peut se permettre de faire un pur film d'horreur hardcore, et force de constater que de ce point de vue L'ENFER DES ZOMBIES est une grande réussite, véritable chef d'oeuvre qui avec FRAYEURS à définitivement imposé Fulci comme l'un des plus grands cinéastes de genre italiens de sa génération aux Etats-Unis mais également en France... Inutile de vous attendre ici à un rip-off de DAWN OF THE DEAD, car vous seriez surpris... L'ENFER DES ZOMBIES est un film à ambiance, une oeuvre organique, oppressante et sanglante mais c'est également une des oeuvres les plus abouties techniquement de Fulci.

ZO3
C'est d'ailleurs sans doute une des premières choses qui frappent dans ce cru de Fulci. Ce dernier fait preuve d'une maitrise technique absolument incroyable et livre des plans absolument magnifiques (comme ce plan mythique final sur New York envahi par les zombies que tout le monde connait sans doute déja.) mais surtout fait preuve de talents de mise en scène sidérants, mieux, la mise en scène du maitre du gore permet même d'installer un suspense juste mortel, faisant de L'ENFER DES ZOMBIES une de ses oeuvres les plus tendues (avec L'EMMURÉE VIVANTE). Fulci marie à ce suspense des scènes gorissimes toutes plus loufoques les unes que les autres, que ce soit l'énucléation mythique d'Olga Karlatos (Miss KEOMA) qui à valu au film de se faire interdire au Royaume-Uni ou encore cette baston légendaire entre un zombie et un... REQUIN, toutes restent dans les mémoires de par leur côté outrancier mais s'avèrent surtout être des monuments de tension qui aboutissent systématiquement sur des explosions de gore toujours bien craspec. L'ENFER DES ZOMBIES, racoleur? Carrément oui, mais en soit peu importe, il me semble que ZOMBI 2 est avant tout un film d'exploitation qui à pour but d'exploiter un filon, chose que Fulci réussit mais sans oublier de donner une dimension artistique à son bébé, ainsi si à chaque instant L'ENFER DES ZOMBIES tombe dans la pure exploitation notamment en raison de scènes qui bien que géniales et jouissives n'ont rien à foutre la (la baston entre le zombie et le requin, faut être honnête, ça sert à rien), ce côté vendeur est en permanence contrasté par un univers visuel incroyable, jetant le spectateur dans l'ambiance humide, putride, oppressante et inquiétante de la jungle ou Fulci développe son oeuvre, cette même jungle d'ou sortent des zombies carrément flippants, à l'opposé direct des morts-vivants bleus de Romero... Ici ils sont tous à l'état de décomposition, rongés par les vers et apparaissent davantage comme des fantômes que comme de véritables morts-vivants (à ce titre il y a dans ZOMBI 2 mon zombie préféré... Celui de la bannière.). Les maquillages, absolument incroyables, font de ces zombies de véritables abominations ambulantes et inquiétantes, et la mise en scène de Fulci les magnifie à chaque instant... Chaque zombie de cette merveille du bis ont droit à leur moment de gloire et chaque apparition de ces derniers est un pur plaisir cinéphile!

ZO4
Mais ce que l'on retiendra avant tout dans L'ENFER DES ZOMBIES, c'est son ambiance sublimissime. Fulci délaisse le côté grandiloquent presque baroque de ses anciens films ainsi que ses éclairages de folie et remplace cet aspect par l'humidité et la crasse de l'ile de Matul et de sa jungle... Tout y est visqueux, végétal et le soin particulier que Fulci accorde à l'ambiance de son long-métrage fait de la jungle un véritable personnage à part, un personnage vivant mais qui paradoxalement confère une ambiance mortifère à cet objet insolite qu'est L'ENFER DES ZOMBIES... Tout participe à donner au décor du film une véritable dimension unique, que ce soit les éclairages (impeccables au passage) ou la caméra de Fulci, tout participe à donner vie à ce décor étrange qui lui-même donne un cachet carrément unique et, que ce soit dit, incroyable, à L'ENFER DES ZOMBIES, à cela se rajoute la partition carrément mortelle du dieu de la musique du genre italien de l'époque, j'ai nommé Fabio Frizzi dont la bande-son, composée avec brio, aide beaucoup à rendre ZOMBI 2 encore plus glauque qu'il ne l'est déja! Fulci, qui est à l'époque au sommet de son talent, se sert à chaque instant de l'ambiance glauque de son film pour tétaniser le spectateur et le clouer à son siège avec des mouvements de caméra et des plans absolument incroyables, il fait preuve d'une maitrise technique qui se marie avec brio avec le scénario concocté par Dardano Sacchetti et Elisa Briganti.

ZO5
En effet, si ce dernier n'est pas démuni de défaut, notamment une légère longueur en début de film et des dialogues pas toujours géniaux, il est indéniable que sa structure permet à L'ENFER DES ZOMBIES de bénéficier d'un très bon rythme, qui sans être mou n'est pas nécessairement endiablé, Sacchetti et Briganti trouvent ici un équilibre parfait et parviennent à faire de L'ENFER DES ZOMBIES un divertissement qui se suit tranquillement mais qui ne perdra personne par un rythme trop fort... En effet, ceux qui seront perdus par le film seront ceux qui n'arriveront pas à adhérer au côté outrancier du film ou ceux qui n'arriveront pas à aller au-dela des prestations moisies des acteurs du film... En effet, soyons clair, c'est ici le seul réel point noir du film : les acteurs sont vraiment pourris, mais en soit, comment être surpris? Fulci n'a jamais accordé de soin particulier à ses acteurs et se concentrait sur ce qui l'intéréssait : la mise en scène, et ici on peut dire qu'il à carrément réussi son coup... L'ENFER DES ZOMBIES est un film impeccable techniquement qui sans être original ou inventif scénaristiquement réussit toutefois le pari d'intriguer et d'intéresser nimporte quel spectateur, à condition qu'il adhère, car comme d'habitude avec Fulci, on aime ou on aime pas...

ZO6
En conclusion, L'ENFER DES ZOMBIES est un vrai chef d'oeuvre, une des plus belles réussites du maitre du macabre. Lucio Fulci réussit ici le pari difficile de s'éloigner de ZOMBIE de Romero, auquel son film est pourtant fortement rattaché par un titre moisi, et réussit à se détacher de son univers visuel habituel pour en trouver un autre tout aussi réussi et qu'il exploite avec brio... On retrouve comme d'habitude l'onirisme et l'érotisme de ses films mais pour la première fois on retrouve sa trademark qui à fait son succès, le gore qui tache, qui confère à ce ZOMBI 2 un aspect jouissif indéniable faisant de ce film un indispensable du bis et certainement le meilleur film de la Trilogie des morts-vivants de Fulci en plus d'être un des meilleurs films de ce dernier... L'ENFER DES ZOMBIES, un chef d'oeuvre? FUCK YEAH!

Si vous aimez ce film, vous aimerez aussi...

-ZE RING-

ZO7

1 mai 2012

PEKING OPERA BLUES

Jaquette

RÉALISÉ PAR | TSUI HARK.
ÉCRIT PAR | RAYMOND TO.
MUSIQUE COMPOSÉE PAR | JAMES WONG.

BRIGITTE LIN | Tsao Wan.
CHERIE CHUNG | Sheung Hung.
SALLY YEH | Pat Neil.
MARK CHENG | Ling Pak-Hoi.
KWOK KEUNG CHEUNG | Tung Man.
KENNETH TSANG | General Tsao.
FENG KU | Commandant Liu.

En 1913, la fille d'un seigneur de guerre (Brigitte Lin) rejoint un mouvement de liberation clandestin et rencontre une chanteuse cupide (Cherie Chung).

1


On assimile bien souvent Tsui Hark a des oeuvres violentes et nihilistes comme THE BLADE ou L'ENFER DES ARMES. Toutefois, c'est un cinéaste a la carrière bien plus variée qu'elle n'y parait puisqu'au milieu de ces oeuvres violentes se tiennent d'autres, en contraste total avec ces dernières. C'est notamment le cas de PEKING OPERA BLUES, film on ne peut plus déconcertant, même dans la carrière d'un cinéaste comme Tsui Hark, puisque ce dernier s'amuse (et prend son pied, à la vision du film cela en devient évident) à mélanger les genres sans aucun complexe ou retenue... PEKING OPERA BLUES est une comédie mélangeant élément du film d'espionnage, d'arts martiaux, mais aussi d'importants hommages à tout un pan de la culture populaire chinoise, à commencer par l'opéra de Pékin, comme son titre l'indique... Mais la ou PEKING OPERA BLUES s'avère être une oeuvre véritablement exceptionnelle, c'est que tout ce pot pourri narratif fonctionne à merveille et ce, en permanence, mais en plus, Tsui Hark fait preuve d'une inventivité sans égal en détournant sans aucune limite les règles inhérentes a son genre et son sujet.

2

En effet, si PEKING OPERA BLUES est une oeuvre profondément comique, c'est indéniable, c'est également une oeuvre qui s'avère surprenante dans la mesure ou en réalité elle ne tranche pas radicalement avec les films antérieurs de Tsui Hark... En effet, elle demeure une oeuvre ultra-violente qui ne lésine pas sur l'hémoglobine, ou ça se bastonne sans arrêt et sans aucune pitié (à ce titre, les chorégraphies de Ching Siu-Tung sont aussi fluides qu'elles sont brutales) mais qui ne manque pas de moments hilarants et de situations cocasses... Jouant avec sa narration dans le seul but de créer les situations les plus drôles possibles, Hark n'oublie cependant pas de rester fidèle à la grande force de son film : la façon dont il mélange des genres qui pourraient sembler radicalement opposés... Ainsi, dans la logique interne a PEKING OPERA BLUES, il n'est guère surprenant de trouver une scène profondément dramatique au milieu d'une autre profondément comique. Tsui Hark l'a compris, le seul moyen de faire marcher tout cela, c'est en dressant de manière précise le portrait de plusieurs personnages, tous aussi loufoques qu'ils sont différents, afin de jouer par la suite avec leurs personnalités et états d'âmes. De cette façon, Hark peut se permettre très facilement de jouer avec des registres très différents, chaque personnage ayant des enjeux dramatiques (ou comiques, c'est selon) qui lui sont propres. Les personnages sont indéniablement la grande qualité de ce PEKING OPERA BLUES, et tous ont droit a leur heure de gloire, aucun n'étant laissé en retrait, ce qui au vu du nombre de personnages dans le film, est un véritable exploit.

3

L'exploit narratif se poursuit lorsqu'une première partie hilarante laisse place à une deuxième partie qui recentre de manière explicite les enjeux les plus dramatiques du film... Ainsi la cocasse histoire d'espionnage de la première partie laisse place a une deuxième partie bien plus violente et tendue, ou la vengeance tient une place évidente. Qui plus est, dans tout ce mélange de genre, Hark détourne avec brio tous les codes inhérents a l'opéra de Pékin, -suffisamment explicités dans le film pour être compris par un public occidental-, au travers d'un tour de force narratif dont je tairai les détails, bien trop ingénieux et drôles pour que je les dévoile ici sans aucune finesse... La narration, c'est sans doute une des plus grandes qualités de PEKING OPERA BLUES, le screenplay de Raymond To multipliant les personnages et les enjeux pour mieux les faire converger vers un point précis. Le film, brillament construit en crescendo, fait preuve d'un rythme non-stop absolument incroyable. De temps morts, PEKING OPERA BLUES est absolument exempt, tout s'enchaine avec une fluidité qui inspire et a laquelle la mise en scène fait énormément honneur. En effet, à la vision du film, il est évident que peu de metteurs en scène auraient pu réaliser PEKING OPERA BLUES, Tsui Hark s'avère être un choix on ne peut plus judicieux dans la mesure ou sa gestion de l'espace et du temps hors du commun lui permettent de donner vie a des moments de bravoure cinématographique relevant purement et simplement du jamais vu, c'est notamment le cas de la deuxième scène "d'opéra" ou les enjeux se multiplient en même temps que les genres présents dans la même scène... Le tout s'avère tellement fou mais aussi tellement maîtrisé que cela inspire forcément le respect. Tsui Hark perd littéralement le spectateur dans tout ce florilège de genres et de situations dingues mais ce dernier ne perd jamais ses marques. Une fois de plus, le chaos propre a Tsui Hark s'avère tout aussi renversant et fou qu'il est organisé et minutieusement pensé (je vais devoir arrêter de chroniquer des Tsui Hark, j'ai vraiment l'impression de radoter.).

4

Dans tout ça, on retrouve un trio d'actrices tout bonnement exceptionnel, donnant vie a des personnages pas nécessairement faciles à interpréter de façon toujours différentes et inventives, le trio Lin - Yeh - Chung participe activement à la réussite qu'est PEKING OPERA BLUES, donnant une intensité dramatique ou comique, encore une fois c'est selon, aux scènes qu'elles animent. Toutefois, la palme revient très clairement à Kenneth Tsang, excellent acteur bien trop souvent rélégué a l'arrière plan, qui ici livre le portrait magnifique d'un personnage bourru et touchant, le bonhomme vole la vedette a chaque apparition et fait preuve d'un charisme pour le moins insolite. Tsang trouve ici l'un de ses meilleurs rôles, voire, tout simplement, son meilleur... A tout ce beau monde se rajoutent des seconds couteaux tous aussi talentueux les uns que les autres qui donnent vie a l'univers déjanté de ce PEKING OPERA BLUES pour le moins exceptionnel.

5

Vous l'aurez compris, PEKING OPERA BLUES est un grand film... Mais, car il y a un mais, c'est un grand film qui demeure difficilement trouvable. Il n'y a pas d'édition disponible en France et le film n'existe sans doute qu'en VO sous-titrée anglais, disponible sur le Blu-Ray chinois (qu'il est possible "d'acquérir" sur le net.). Mais ce PEKING OPERA BLUES vaut la peine et l'effort. En effet, il s'agit d'une des meilleures oeuvres de Tsui Hark, tour à tour drôle, émouvant, ahurissant, violent... Une alchimie des genres et des registres absolument incroyable, qui, si vous avez la chance, vous laissera a coup sur un souvenir indélébile et vous marquera a vie la rétine. Un chef d'oeuvre, tout simplement.

CLIQUEZ ICI POUR ACCÉDER A LA GALERIE COMPLETE DU FILM

6

SI VOUS AVEZ AIMÉ CE FILM, VOUS AIMEREZ...

  • THE LOVERS de Tsui Hark.
  • IL ÉTAIT UNE FOIS EN CHINE de Tsui Hark.
  • IL ÉTAIT UNE FOIS EN CHINE II de Tsui Hark.

-ZE RING-

7

 

14 juillet 2012

THE GREAT DICTATOR

Jaquette
RÉALISÉ PAR
|
CHARLIE CHAPLIN
.
ÉCRIT PAR | CHARLIE CHAPLIN.
MUSIQUE COMPOSÉE PAR | CHARLIE CHAPLIN ET MEREDITH WILSON.

CHARLIE CHAPLIN | Adenoid Hynkel / Le barbier juif.
JACK OAKIE | Benzino Napoléoni.
REGINALD GARDINER | Schultz.

Dans le ghetto juif, vit un petit barbier qui ressemble énormément à Adenoid Hynkel (Charlie Chaplin), le dictateur de Tomania qui a décidé l'extermination du peuple juif. Au cours d'une rafle, le barbier est arrêté en compagnie de Schultz (Reginald Gardiner), un farouche adversaire d'Hynkel.

 1


 Avant toute chose, il est nécessaire de rappeler le contexte dans lequel a été réalisé THE GREAT DICTATOR, de et avec Charlie Chaplin, et sorti en 1940.
L'acteur-réalisateur produit le film juste avant la Seconde Guerre Mondiale. THE GREAT DICTATOR se veut être une satire du régime nazi.
D'ailleurs, le gouvernement d'Hitler fera pression pour que Charlie Chaplin abandonne la réalisation.
Mais le cinéaste ira jusqu'au bout de ses intentions. Mieux encore, THE GREAT DICTATOR reste le plus gros succès de son auteur.
A l'époque, la Grande-Bretagne résiste encore et toujours aux assauts nazis et lutte au nom de la liberté et de la démocratie.
Avec THE GREAT DICTATOR, Charlie Chaplin dénonce les dangers du nazisme, un régime autoritaire et meurtrier, qui menace non seulement les juifs mais également l'Humanité.
Au niveau du casting, on retrouve évidemment Charlie Chaplin dans un double rôle, celui d'un barbier juif et celui d'Adenoid Hynkel, le dictateur de Tomanie.
Mais Charlie Chaplin joue également la carte de la confusion puisque son personnage du barbier, donc encore une fois, un juif, ressemble à s'y méprendre à Hynkel. Le propos du film est pour le moins engagé et terriblement insolent.
Viennent également s'ajouter Jack Oakie, Paulette Goddard, Reginald Gardiner, Henry Daniell, Billy Gilbert et Grace Hale.
Jack Oakie interprète un certain Benzino Napoléoni, le dictateur de Bactérie. Son nom est la contraction de Benito Mussolini et de Napoléon.
Vous l'avez donc compris. THE GREAT DICTATOR n'est pas qu'une critique des régimes nazis et de sa menace grandissante à travers l'Europe et le monde.
D'une façon générale, le film dénonce les dangers des dictatures et des idéologies prônant la haine, la guerre et la supériorité de la race.
La Croix Gammée, symbole du parti nazi, n'apparaît pas dans le film, mais est remplacée par une double croix.
Pour l'anecdote, THE GREAT DICTATOR est le tout premier film du cinéma à évoquer explicitement le mot "juif". Inutile alors de préciser que THE GREAT DICTATOR sera interdit en Allemagne jusqu'à la fin de la Seconde Guerre Mondiale.
Le long-métrage ne sortira qu'en 1958. Même remarque pour l'Espagne qui projette le film en 1975 dans les salles.

2
Autre anecdote : Charlie Chaplin et Adolf Hitler sont nés à quatre jours d'intervalle et deviendront les deux moustachus les plus importants du XXème siècle.
Que retenir de THE GREAT DICTATOR ? Difficile de répondre mais la fin du film, qui se conclut par le discours de Charlie Chaplin, est sans aucun doute le moment le plus important. "Je suis désolé, mais je ne veux pas être empereur, ce n'est pas mon affaire. Je ne veux ni conquérir, ni diriger personne. Je voudrais aider tout le monde dans la mesure du possible, juifs, chrétiens, païens, blancs et noirs…"
Vous l'avez donc compris : THE GREAT DICTATOR reste avant tout une oeuvre profondément humaniste. En vérité, Charlie Chaplin avait compris avant tout le monde le danger que representait le nazime pour le monde entier et pour l'Humanité.
Pour son réalisateur, THE GREAT DICTATOR marque également la rupture avec son personnage favori, donc, Charlot.
Il s'agit également du premier film parlant de Charlie Chaplin qui rompt avec le cinéma muet.

3
Pourtant, sur la forme, THE GREAT DICTATOR ressemble beaucoup aux films muets de Chaplin. Plus que jamais, le réalisateur reste fidèle à son cinéma.
Charlie Chaplin s'approprie totalement le personnage de Hynkel, non seulement à travers des discours de haine et d'intolérance, mais également à travers une gestuelle travaillée, volontairement exagérée, le but étant de manipuler une foule sous le charme d'un dictateur zélé et moustachu.
Chaplin a donc parfaitement cerné la personnalité perverse, psychopathe et mégalomane de son dictateur. En même temps, le cinéaste s'en prend également à Napoléon et Benito Mussolini. Les dictateurs de notre monde moderne n'ont qu'à bien se tenir ! Mais pour en revenir à la séquence finale, Chaplin n'est plus le barbier juif ni Hynkel.
Chaplin devient juste lui-même le temps de quelques minutes pour signer un discours politiquement engagé. L'un des plus importants du XXème siècle et de toute l'histoire du cinéma. Immense film (et c'est peu de le dire) et une oeuvre magistrale.

SI VOUS AVEZ AIMÉ CE FILM, VOUS AIMEREZ...

  • LES TEMPS MODERNES de Charlie Chaplin.
  • LE KID de Charlie Chaplin.
  • LA RUÉE VERS L'OR de Charlie Chaplin.

-ALICE IN OLIVER-

4

 

21 novembre 2012

SEX AND FURY

Jaquette
RÉALISÉ PAR | NORIFUMI SUZUKI.
ÉCRIT PAR | NORIFUMI SUZUKI, MASAHIRO KAKEFUDA ET TARÔ BONTEN.
MUSIQUE COMPOSÉE PAR | ICHIRÔ ARAKI.

REIKO IKE | Ocho.
CHRISTINA LINDBERG | Christina.
TADASHI NARUSE | Shunosuke.

15
Ca fait six mois que sur ZE LORD OF THE RING, le cinéma hong-kongais a eu une place d'honneur. Aujourd'hui, ce dernier se fait détroner. Il est en effet temps de parler un peu d'autre chose et le cinéma d'exploitation japonais n'étant absolument pas représenté sur ce blog... Pourquoi pas celui-la? Et on commence d'ailleurs en force avec l'un des meilleurs films que le cinéma d'exploitation nippon ait produit : bien meilleur que la saga subversive HANZO THE RAZOR, bien plus beau que la saga culte BABY CART, et sans doute au moins aussi magnifique les deux premiers volets de LA FEMME SCORPION... Je parle bien évidemment du superbe SEX AND FURY, grand film s'il en est, mais qui ne manquera néanmoins pas de diviser. Rien d'étonnant en soi, si l'on part du principe que cette oeuvre du grand Norifumi Suzuki (a ne pas confondre avec Seijun Suzuki, autre réalisateur japonais bien niqué du cerveau) est aussi réussie artistiquement qu'elle est racoleuse. Ainsi, la ou certains y verront un spectacle déviant et pervers pour des spectateurs tout aussi déviants, d'autres y verront, à juste titre en ce qui me concerne, une oeuvre atypique certes mais d'une grande qualité artistique et d'une grande importance. Quelques explications...

22
En effet, si le cinéma d'exploitation japonais n'a jamais été connu pour sa subtilité, il l'a cependant toujours été, tout comme les réalisateurs qui le représentent, pour sa capacité et sa propension a faire se cotoyer judicieusement le racolage le plus fou avec l'esthétique la plus magnifique artistiquement. SEX AND FURY ne fait pas exception, et si Suzuki ne rate jamais une occasion de rajouter une scène de cul au milieu de son film, il ne rate jamais l'occasion non plus de filmer celles-ci avec grâce et poésie. Le générique, dans lequel Reiko Ike se tient, un sein dévêtu, un sabre a la main, au milieu d'un décor baroque plein de couleur, est fort représentatif de cette volonté de faire une oeuvre d'exploitation s'assumant entièrement comme telle et surfant totalement sur les tendances de l'époque, tout en imposant des canons esthétiques d'une rare beauté. Ce n'est pas un hasard, d'ailleurs, si les deux actrices principales sont deux des plus belles actrices de leur temps. C'est au contraire un choix qui continue d'inscrire SEX AND FURY dans une logique toute aussi racoleuse qu'elle est esthétique. Pour cette raison, impossible d'être surpris par les propos de ceux qui n'ont pas compris l'intérêt d'une telle oeuvre, mais pour autant, s'arrêter à cela est une vilaine erreur dans le sens ou c'est aussi passer a côté de l'une des plus belles oeuvres jamais réalisées. Suzuki s'y déchaine et se laisse aller à toutes les exubérances : décors baroques, couleurs chaudes a foison, éclairages vifs, bastons sanglantes et ralentis lyriques... Impossible de ne pas voir derrière ce déchainement de beauté visuelle l'influence évidente du giallo italien, que ce soit au travers des éclairages dignes d'un Dario Argento ou de l'érotisme constamment présent évoquant inévitablement des oeuvres telles que LIZARD IN A WOMAN'S SKIN. Suzuki pousse ses influences a bout, en particulier de l'érotisme, qu'il filme avec une grâce inégalée mais qu'il intègre également a la narration avec brio. Dans SEX AND FURY, comme l'indique le titre, le sexe procure autant de plaisir que de douleur, arme grâce à laquelle les femmes peuvent imposer leur puissance sur les hommes, dont le contrôle sur ces dernières est limité dès lors qu'il concerne la sexualité. Les personnages d'Ocho et de Christina sont tous deux très représentatifs du propos du film, l'une utilisant a son avantage cette dernière pour se venger des meurtriers de son père et l'autre se montrant complètement insensible aux punitions sexuelles que lui infligent la société machiste dans laquelle elle vit. Impossible de ne pas voir dans SEX AND FURY un propos profondément féministe, qui n'est d'ailleurs pas sans évoquer les deux chefs d'oeuvres de Shunya Ito (LA FEMME SCORPION & ELLE S'APPELAIT SCORPION).

43
Dans un film ou le corps et la chair sont autant des dispositifs de plaisir qu'ils peuvent être des armes (une fois de plus, le générique préfigure également cet aspect du film), il n'y a rien d'étonnant a les voir si ouvertement filmés, sans aucun complexe ou timidité, d'autant plus que le genre lui-même l'exige. Néanmoins, si l'on pourrait voir un défaut au film dans ces scènes érotiques fréquentes et parfois a la limite un vulgos, c'est en réalité la grande force de SEX AND FURY, puisque Norifumi Suzuki les magnifie au travers d'un traitement tantôt poétique du sexe, tantôt très brutal. La mise en scène virtuose de ce dernier met clairement en valeur chaque aspect du sexe mis en évidence par le film. Ainsi, même les scènes de viol les plus terribles sont montées autour d'une musique agréable et poétique. Voir derrière une scène de ce type de la perversion et de la bétise serait facile, mais en réalité, ce traitement du sexe témoigne au contraire d'une volonté de revaloriser la femme dans une société profondément machiste. Celles-ci ont un pouvoir incommensurable sur les hommes et les tiennent par les couilles dès lors que le sexe est impliqué, mais impossible de ne pas y voir aussi une volonté de revaloriser le sexe lui-même. N'oublions pas que nous sommes au Japon en 1973, et qu'a l'époque, le sexe est la-bas le tabou ultime et est sujet à des règles (implicites) rigoureuses, ainsi impossible de ne pas voir derrière SEX AND FURY (et tout un pan du cinéma japonais) une volonté d'assouplir ces mêmes règles (tout en racolant un maximum, oui le cinoche d'exploitation nippon est fait de paradoxes), même si en même temps il est difficile de ne pas y voir aussi l'oeuvre de toute une bande de frustrés (mais ce n'est rien a côté de la cultissime saga HANZO THE RAZOR). Cette volonté de réformer la société japonaise en revalorisant la place de la femme et du sexe se manifeste également par la place de celui-ci dans la narration, qui avance quasiment exclusivement jusqu'a son standoff final sanglant grâce à celui-ci. En faisant de celui-ci une part intégrante de la narration, la volonté de l'équipe responsable de SEX AND FURY est très clairement posée... Mais soyons honnêtes, ce n'est pas pour l'intelligence et l'audace de son propos que l'on regarde un film SEX AND FURY mais davantage pour voir des gens se bastonner, des femmes nues et une histoire viscérale se dérouler... D'une certaine façon, ceux qui considèrent les amateurs de cinéma d'exploitation n'ont pas tort : nous sommes des geeks un peu pervers peut-être mais en ce qui me concerne je jetterais 20 ANTICHRIST pour un SEX AND FURY. Les deux films sont similaires : ce sont des monuments de racolage et de provocation, la différence c'est que l'un se cache derrière des pseudo-réflexions intellectuelles la ou l'autre assume entièrement son statut de film d'exploitation vulgaire pour livrer un propos pas si con que ça déja, mais aussi pour faire preuve de talent et de générosité.

27
En effet, a partir du moment ou vous mettez SEX AND FURY dans votre lecteur DVD, préparez-vous à une heure et demi des plus généreuses. Les bastons barbares s'enchainent a un rythme infernal qui n'a d'égal que celui auquel s'enchainent les scènes érotiques stylisées, le tout avec un enthousiasme évident de la part de son réalisateur. Le film est un monument de fun, qui, malgré sa noirceur, divertit de bout en bout, notamment grâce à son rythme non-stop et frénétique. Les choses s'enchainent avec une vitesse incroyable mais toujours avec soin. Suzuki privilégie en effet la précision a la précipitation et transcende chacune de ses scènes grâce à sa mise en scène, tout bonnement incroyable. On compte d'ailleurs dans SEX AND FURY une des plus belles scènes de bastons au sabre jamais réalisées, d'un lyrisme incroyable, qui en plus d'être esthétiquement incroyable préfigure le cultissime LADY SNOWBLOOD avec quelques mois d'avance et le très référentiel KILL BILL avec 30 ans d'avance... Un prodige? Carrément oui, mais cela ne fait qu'illustrer le talent visionnaire d'un réalisateur de grand talent, qui s'il n'a pas eu la carrière qu'il méritait, est quand même le responsable de nombreux classiques (LE COUVENT DE LA BÊTE SACRÉE, SHAOLIN KARATÉ... Que je n'ai a mon regret pas vus.). Son talent visuel explose littéralement ici. De la gestion de l'espace à la façon dont la chair et le sang y sont mélangés pour mieux être stylisés et magnifiées, le film de Norifumi Suzuki s'impose très vite comme une oeuvre non seulement exemplaire mais aussi exceptionnelle dans la mesure ou, par son audace et son originalité, elle constitue une avancée artistique considérable, et si beaucoup de culs serrés prétendant représenter l'intelligencia crachent a la gueule de tels films, finalement, qu'est-ce qu'on a a foutre? Les faits sont les mêmes et qu'ils crachent dessus ou non, SEX AND FURY reste aussi magnifique qu'il l'a toujours été, par ailleurs soutenu par un casting excellent. Reiko Ike et Christina Lindberg y sont magnifiques (dans tous les sens du terme) et donnent vie avec brio a leurs personnages, magnifiquement écrits et constamment magnifiés par la caméra de Suzuki, elle-même soutenue habilement par une bande originale orchestrée d'une main de maître par Ichirô Araki (qui avait déja travaillé avec Norifumi Suzuki sur CARESSES SOUS UN KIMONO.).

41
SEX AND FURY est un chef d'oeuvre, tout simplement. On fait difficilement plus racoleur, certes, mais en soi, peu importe, on fait difficilement plus beau aussi et c'est ce que les détracteurs de tout le pan du cinéma qu'il représente semblent volontairement oublier. Pourtant, à bien des égards, SEX AND FURY est une oeuvre majeure, au propos féministe fort et a l'audace incroyable. Subversif, SEX AND FURY peut prétendre l'être et ce sur bien des points, notamment dans la mesure ou son propos va complètement à l'encontre de tout un aspect de la société japonaise, à savoir le sexe et les tabous rigides qui l'entourent. Pour autant, ce qui nous marquera le plus dans ce grand film de Suzuki, c'est sa beauté visuelle et la grâce de la mise en scène, qui renvoie autant au cinoche d'exploitation italien qu'elle préfigure de nombreux films contemporains. Suzuki magnifie chaque plan, fait preuve d'une maîtrise technique irréprochable et poétise constamment la violence et le sexe avec un talent quasiment jamais égalé dans le genre. Rajoutez à cela deux actrices principales de toute beauté, des personnages haut en couleur et un protagoniste féminin badass a souhait, et vous tenez un chef d'oeuvre, tout simplement. Un classique a voir absolument!

CLIQUEZ ICI POUR ACCÉDER A LA GALERIE COMPLETE DU FILM

50
SI VOUS AVEZ AIMÉ CE FILM, VOUS AIMEREZ AUSSI...

  • LA FEMME SCORPION de Shunya Ito.
  • ELLE S'APPELAIT SCORPION de Shunya Ito.
  • LADY SNOWBLOOD de Toshiya Fujita.
  • LADY SNOWBLOOD 2 : LOVE SONG OF VENGEANCE de Toshiya Fujita.
  • HANZO THE RAZOR : SWORD OF JUSTICE de Kenji Misumi.
  • HANZO THE RAZOR II : L'ENFER DES SUPPLICES de Yasuzo Masumura.
  • HANZO THE RAZOR III : LA CHAIR ET L'OR de Yoshio Inoue.

-ZE RING-

60

3 février 2012

DIRTY HARRY

DH JAQ

RÉALISÉ PAR | DON SIEGEL.
ÉCRIT PAR | HARRY JULIAN FINK, RITA M. FINK, DEAN REISNER, JOHN MILIUS ET JO HEIMS.
MUSIQUE COMPOSÉE PAR | LALO SCHIFRIN.

CLINT EASTWOOD | Harry Callahan.
ANDY ROBINSON | Le Scorpion.
JOHN VERNON | Le Maire.
RENI SANTONI | Chico Gonzalez.
HARRY GUARDINO | Lt. Al Bressler.
JOHN LARCH | Le chef de la police.

DH1


Entre cinéphiles, on en vient souvent à parler du Nouvel Hollywood et des grands noms qui en ont fait la gloire : Sam Peckinpah, Clint Eastwood, Martin Scorsese, William Friedkin... Toutefois, l'un d'eux est trop souvent oublié, Don Siegel, et à tort. En effet, il s'agit très certainement du pilier principal du Nouvel Hollywood, en effet, non content d'être le mentor de Sam Peckinpah (rien que ça), il a également donné ses premiers grands rôles américains à Clint Eastwood et a influencé ce dernier dans ses propres réalisations, et ce que ce soit du point de vue de la mise en scène que du point de vue purement thématique. Des 5 collaborations entre ces deux grands hommes, une ressort plus que toutes les autres, DIRTY HARRY. En effet, il s'agit ni plus ni moins d'une des oeuvres les plus importantes de l'histoire du cinéma, ayant provoqué un scandale incroyable à sa sortie (j'y reviendrai, c'est en grande partie pour ça que j'écris cet article) mais surtout clairement représentatif de la démarche de Siegel et d'Eastwood. Siegel, lui, avait déja oeuvré dans un genre similaire et avec un personnage plus ou moins similaire à DIRTY HARRY avec COOGAN'S BLUFF (enfin disons que Coogan annonçait avec brio ce qu'allait être Harry Callahan), Eastwood, quand à lui, à soutenu Siegel a chaque fois et s'est par la suite attaqué de manière corrosive à la justice actuelle avec des oeuvres telles que L'HOMME DES HAUTES PLAINES, L'ÉCHANGE, ce qui lui a valu d'être taxé de fasciste à l'époque de la sortie de ce fameux DIRTY HARRY.

DH2

Pourtant, pas besoin de porter de lunettes pour savoir qu'Harry Callahan est loin d'être un facho. Un flic aux méthodes peu orthodoxes certes, mais c'est également et surtout un flic qui a compris que le seul moyen d'obtenir des résultats dans un système judiciaire incompétent et régi par la politique, était de répondre au mal par le mal. En l'occurence, Callahan n'hésite pas une seconde à utiliser la violence contre ceux qui la pratiquent, toutefois c'est également une personne raisonnable et capable de discernement (en témoigne le braqueur au début, a qui il laisse le choix entre la vie et la mort de manière implicite) et faisant preuve d'une justice dans ses actes dont il est le seul dans cette oeuvre à posséder le secret. Ses méthodes sont violentes, certes, mais quel est le plus noir finalement? Les méthodes d'Harry Callahan ou bien les méthodes du Maire et de ses associés, étant davantage préocuppés par l'opinion publique à leur égard (cet aspect est d'ailleurs encore plus poussé dans L'ÉCHANGE de Clint Eastwood) que par la santé de ceux dont ils ont la responsabilité? Il semble clair que le choix ne se pose pas, et si Harry Callahan est une véritable enflure, il reste néanmoins le meilleur d'entre tous. La noirceur du film, qui lui a longtemps été reprochée avant qu'il ne devienne un véritable objet de culte, vient davantage de ce paradoxe atroce que des façons de faire d'Harry Callahan, qui se pose d'ailleurs davantage comme un vigilante que comme un policier, allant outre les lois dans le seul but de faire régner une justice que ces dernières ne parviennent pas à imposer. Siegel, avec DIRTY HARRY, soulève donc avec brio ce problème précis de notre société, toutefois il le fait avec l'ambiguité la plus incroyable et la plus subtile, plaçant d'une part son personnage principal comme un noble chevalier en croisade et de l'autre comme un enfoiré de première classe. Le scandale, qui visait à déterminer si oui ou non Eastwood et Siegel étaient des fachos, est sans doute venu de ce point précis de l'oeuvre, pourtant, ce que beaucoup de gens n'ont pas réussi à voir a force de gueuler au lieu de regarder le film, c'est que Siegel ne fait que poser des questions et ne donne pas de réponse, réponses qu'Eastwood ne manquera pas de donner dans le 4ème volet des aventures de l'Inspecteur Harry, SUDDEN IMPACT, après le très horriblement politiquement correct MAGNUM FORCE (sur lequel je reviendrai un de ces jours, histoire de me faire lapider sur place par les fans.).

DH3

Le politiquement incorrect, Siegel et Eastwood le poussent a son paroxysme avec DIRTY HARRY, en allant jusqu'a remettre en cause les lois fondamentales de notre système judiciaire tout en bousculant les conventions du cinéma de l'époque. Rappelons-le, nous ne sommes à l'époque qu'en 1971, le Nouvel Hollywood à a peine vu le jour et nous entrons petit à petit dans une période importante de liberté artistique, Don Siegel en profite et signe ce qui peut très certainement être considéré comme l'un des premiers westerns urbains. En effet, le personnage principal y est un personnage solitaire, dont l'arme, par sa mythologie, et dont l'aspect impitoyable ne sont pas sans rappeler les vieux westerns. Ce côté "western urbain" est d'autant plus renforcé par COOGAN'S BLUFF, du même Don Siegel, -dont le titre français, UN SHÉRIF A NEW YORK, en dit long sur l'oeuvre du bonhomme- et est confirmé implicitement par Threlkiss dans SUDDEN IMPACT ("Callahan est le seul objet immuable dans un univers perpétuellement changeant"), ... Siegel détourne les codes du genre qu'il exploite avec brio, et si j'ai mis cet article dans la catégorie POLAR j'avoue avoir longtemps hésité entre WESTERN et VIGILANTE, tant DIRTY HARRY s'approche de tous ces genres d'une façon à chaque fois différente. En apparence, ce n'est rien de plus qu'un film policier lambda, finalement, pourtant, d'autres éléments le rapproche des autres genres suscités... Rien de bien étonnant finalement, dans la mesure ou chambouler les conventions, dans le Nouvel Hollywood, se faisait souvent par le détournement total des codes d'un genre voire la transposition des codes d'un genre dans un autre (voir pour s'en convaincre CROSS OF IRON de Sam Peckinpah.). Don Siegel finit de chambouler les conventions cinématographiques par l'usage d'une violence utilisée avec parcimonie mais percutante, par ailleurs indispensable au propos dans la mesure ou c'est par son biais que se développent les personnages et les questionnements qui y sont inhérents.

DH4

Ces questionnements, Don Siegel les met en scène avec brio, livrant un objet cinématographique très bien photographié (et ce malgré un DVD qui est loin de lui rendre justice, vivement que je me chope le Blu-Ray.) mais surtout superbement filmé et monté, plaçant dès les premiers plans le personnage de DIRTY HARRY dans une mythologie qui lui est propre, capturant à chaque instant le charisme et la classe incroyable de Clint Eastwood, qui livre ici une de ses meilleurs performances. Totalement investi dans son rôle, Eastwood transpire la sincérité et retranscrit avec brio l'ambiguité du personnage qu'il incarne. Soyons clair, Eastwood vole la vedette à chaque instant, toutefois, DIRTY HARRY reste soutenu par un casting de seconds couteaux talentueux, avec notamment John Vernon que l'on retrouvera plus tard dans JOSEY WALES et Andy Robinson, dont l'interprétation d'un tueur psychopathe est elle aussi pleine d'ambiguité... Sans en dire trop (je pense en avoir déja trop dit), sachez simplement que le personnage du Scorpion soulève lui aussi d'importants questionnements et que la légimité ou l'illégimité sont perpétuellement remises en doute par son personnage... A vrai dire, tout dépend de quel côté on se met, DIRTY HARRY étant un film reposant énormément sur l'interprétation dont le spectateur en fera, expliquant l'absence totale de réponses vis-à-vis des questions que Siegel pose à ce dernier.

DH5

DIRTY HARRY, finalement, ne peut pas être jugé objectivement. Une péloche fasciste pour certains, une série B fendard pour d'autres, ou un chef d'oeuvre absolu et subversif pour les autres... Je pense que vous savez de quel côté je me range, à mon sens, DIRTY HARRY est un très grand film, jouant avec les genres et les registres et faisant preuve d'une subversion et d'un politiquement incorrect qui ferait un paquet de bien au cinéma actuel... En tout cas, il est sur qu'avant de tenter l'expérience, vous ne saurez jamais de quel côté vous ranger. Peut-être qu'Harry Callahan n'est pas aussi facho que sa réputation sous-entend, et peut-être qu'Harry Callahan n'est peut-être pas aussi juste que ce que je laisse sous-entendre... Allez savoir!

DH7

Si vous avez aimé ce film, vous aimerez aussi...

  • COOGAN'S BLUFF, de Don Siegel.
  • UN JUSTICIER DANS LA VILLE, de Michael Winner.
  • SERPICO, de Sidney Lumet.
  • L'ÉCHANGE, de Clint Eastwood.
  • L'HOMME DES HAUTES PLAINES, de Clint Eastwood.

-ZE RING-

DH8

3 avril 2013

IRON MONKEY

titre
RÉALISÉ PAR ... YUEN WOO-PING.
PRODUIT PAR ... TSUI HARK.
ÉCRIT PAR ... TSUI HARK, ELSA TANG, TAI-MUK LAU, ET TAN CHEUNG.
MUSIQUE COMPOSÉE PAR ... WAI WAP LU ET JOHNNY NJO, CHOW GAM-WING.

DANS UNE PROVINCE CHINOISE DÉVASTÉE PAR LES INONDATIONS, LA FAMINE ET LA PAUVRETÉ, UN VOLEUR NOMMÉ IRON MONKEY SÉVIT ET VOLE AUX MANDARINS CUPIDES POUR DONNER AUX PAUVRES. UN DE CES MANDARINS, EFFRAYÉ DE PERDRE SON POSTE A L'IDÉE QUE LE LÉGAT IMPÉRIAL DÉCOUVRE L'EXISTENCE D'IRON MONKEY AVANT QUE CELUI-CI NE SOIT ARRÊTÉ, FORCE WONG KEI-YING, UN ARTISTE MARTIAL RÉPUTÉ, A ARRÊTER LUI-MÊME IRON MONKEY. POUR CELA, IL EMPRISONNE SON FILS : WONG FEI-HUNG.


perso1 perso2
perso3 perso4
perso5


Wong Fei-Hung a quasiment toujours été le personnage cinématographique le plus important du cinéma hong-kongais. Petite leçon d'histoire : Wong Fei-Hung était un artiste martial et un médecin extrêmement réputé, qui aurait, selon certains mythes et légendes, combattu l'armée japonaise pendant l'invasion de Taïwan de 1895. Il est très rapidement devenu le personnage le plus populaire de toute la culture cinématographique hong-kongaise, grâce, notamment, aux succès monstrueux des 89 films dont il est le personnage principal. Pour la culture générale, le premier acteur à l'avoir interprété fut Kwan Tak-Hing, qui n'a joué presque que ce rôle, et ce, dans des films comme STORY OF WONG FEI-HUNG (1949), le moyen THE SKYHAWK (1976) ou encore le culte LE HÉROS MAGNIFIQUE (1979). Parmi ces 89 films, on en trouve de très connus, comme par exemple DRUNKEN MASTER de Yuen Woo-Ping, le chef d'oeuvre DRUNKEN MASTER II de Liu-Chia Liang, et bien évidemment la saga IL ÉTAIT UNE FOIS EN CHINE de Tsui Hark. C'est après le succès de celle-ci que ce dernier se décide à explorer un aspect jamais vu auparavant de la vie de ce personnage mythique : son enfance, et sa relation avec son père, Wong Kei-Ying, un autre héros important de la culture populaire chinoise et hong-kongaise. Le résultat est l'une des plus grandes réussites du Kung Fu Pian et un indispensable du cinéma hong-kongais : IRON MONKEY de Yuen Woo-Ping.

32
Véritable succès international à sa sortie en 1993, IRON MONKEY est un film extrêmement important dans le sens ou il aborde avec un regard nouveau une facette jamais explorée auparavant d'un des personnages les plus majeurs de toute une culture. Pour ceux qui connaissent Tsui Hark, impossible de ne pas comprendre immédiatement dans quelle optique celui-ci se lance dans la production d'IRON MONKEY : une fois de plus, c'est un film dont l'ambition première est de renouveler le genre, et par la même occasion, le cinéma, en proposant quelque chose de constamment nouveau et inattendu, et donc de profondément novateur. Au-delà du fait que placer IRON MONKEY durant l'enfance de Wong Fei-Hung renouvelle un personnage qui, à l'époque, s'embourbe d'ores et déjà dans ses nouveaux standards de qualité que sont les IL ÉTAIT UNE FOIS EN CHINE, soit un manifeste évident de la démarche subversive et transgressive de Tsui Hark et de Yuen Woo-Ping, avoir fait de Wong Fei-Hung un personnage secondaire en regard de Wong Kei-Ying et Iron Monkey est une prise de risque d'une audace sans qualification possible à Hong Kong. En effet, le cinéma y a longtemps été littéralement monopolisé par Wong Fei-Hung (Kwan Tak-Hing en a sorti plus d'un par an pendant 20 ans), et placer ce dernier en second plan dans un film, c'est prendre le risque de larguer la moitié du public... Mais c'est aussi un autre manifeste évident de la volonté novatrice des créateurs du film, qui, d'un bout à l'autre du métrage, tentent de renouveler le genre par tous les moyens possibles. Wong Fei-Hung n'est en cela qu'une excuse dans le film, puisqu'il est de toutes façons évident que ce qui intéresse le plus Tsui Hark et son co-équipier Yuen Woo-Ping, c'est le dilemne moral auquel se confronte Wong Kei-Ying et aux relations que tissent les personnages du film avec Iron Monkey. Véritable Robin des bois chinois, c'est un personnage que Woo-Ping et Hark utilisent, une fois de plus, pour briser complètement les attentes : son identité est révélée au bout de cinq minutes, et bien que la quête de Wong Kei-Ying pour le retrouver et l'arrêter soient le point de départ et le moteur du film, en réalité, cette intrigue est abandonnée très rapidement au profit d'une histoire de combat épique contre un gouvernement corrompu à la dimension ouvertement populaire.

51
La narration d'IRON MONKEY s'acharne donc à briser constamment les attentes et les conventions. Mieux encore, la narration d'IRON MONKEY s'acharne constamment à briser les attentes et les conventions amenées à Hong Kong par les productions Film Workshop telles qu'IL ÉTAIT UNE FOIS EN CHINE et SWORDSMAN II... Au-delà d'une volonté évidente de renouveler le cinéma hong-kongais et les films d'arts martiaux, IRON MONKEY, comme à peu près tous les films produits/écrits/réalisés par Tsui Hark, témoignent de la volonté évidente de celui-ci de se renouveler lui-même avant toute chose... En ce sens, et si vous ne l'aviez pas encore compris (ce dont je doute très fortement), IRON MONKEY est une chance de plus de vous rendre compte que pendant près de 20 ans, Tsui Hark à été le moteur de toute l'industrie cinématographique hong-kongaise, un véritable fou furieux capables d'influencer par son génie créateur les modes et les tendances cinématographiques et de remettre au gout du jour des légendes, des personnages, des mythes populaires oubliés ou délaissés par le cinéma HK. Wong Kei-Ying ne fait pas exception, et si Hark et Yuen Woo-Ping laissent Wong Fei-Hung un peu de côté dans IRON MONKEY, c'est seulement pour rétablir la popularité du père de ce dernier... Ce n'est pas un hasard si, des quelques oeuvres sur Wong Kei-Ying, IRON MONKEY soit la seule à nous être parvenue en Occident, et encore une fois, ce n'est sans doute pas un hasard non plus si, la même année, Tsui Hark réalisait IL ÉTAIT UNE FOIS EN CHINE 3, ou Wong Kei-Ying apparait... dans un rôle extrêmement secondaire. Impossible de ne pas voir les parallèles, et on pourrait continuer longtemps sur cette lancée. Reste qu'en ce qui concerne IRON MONKEY, il témoigne à chaque seconde d'une volonté de proposer un regard frais et neuf sur des sujets usés et rendus banals par une industrie qui les a trop longtemps et trop fréquemment exploité. Quoi de mieux, dans le cas de Hong Kong, que Wong Fei-Hung? C'est un choix d'autant plus judicieux qu'il permet à Tsui Hark et à Yuen Woo-Ping de faire usage de leurs compétences la ou elles brillent le plus : le cinéma d'arts martiaux.

72
S'il me parait extrêmement important d'analyser et de disséquer les ambitions narratives de toutes les productions Film Workshop (et des grands films hong-kongais en général) dans la mesure ou elles regorgent d'innovations, de transgressions passionnantes et d'avancées artistiques importantes, avant tout, il me semble que la raison principale pour laquelle le nouveau cinéma hong-kongais amené par la bande à Tsui Hark est si populaire, c'est parce qu'avant il propose de sacrés morceaux de divertissement et à permis au cinéma d'arts martiaux de trouver ses plus grands aboutissements artistiques. Soyons clairs, IRON MONKEY est l'un d'eux, et si sa narration est intéréssante, ses visuels et ses scènes d'action relèvent, quand à eux, du tout bonnement monumental. On tient ici une des oeuvres les plus spectaculaires livrées par le cinéma hong-kongais, un film qui, une fois de plus, repoussent toutes les limites en apportant à ses chorégraphies déjà monumentales (toutes orchestrées par Dieu Yuen Woo-Ping) des éléments spectaculaires complètement surréalistes tous droits tirés de mangas... L'exubérance des combats n'a d'égal que leur inventivité, et si les deux fous furieux derrière le film permettent à leurs personnages de se tuer à coups de raisins ou de se balancer des cheminées à grands coups de savate, c'est autant pour en balancer un maximum dans la gueule des spectateurs que pour tenter d'apporter au genre une espèce de facette surréaliste et mangaesque afin de trancher avec d'autres oeuvres plus réalistes (dans une certaine mesure) réalisées à la même époque comme FIST OF LEGEND ou PEDICAB DRIVER de Sammo Hung. Ainsi, dans ses ambitions, IRON MONKEY rejoint les deux premiers SWORDSMAN, qui revisitaient le Wu Xia Pian, retournaient à ses sources et y apportaient des éléments complètement fous et excessifs... IRON MONKEY fait de même avec le Kung Fu Pian : c'est un retour aux sources fondatrices du genre (Wong Fei-Hung et Wong Kei-Ying), et un dynamitage en règle de tous les codes qui y sont inhérents. Inutile de chercher du réalisme dans l'oeuvre de Yuen Woo-Ping : il n'y en a pas, et c'est justement ça qui en fait un monument cinématographique complètement jouissif. Comme il était de coutume à l'époque dans les productions de la Film Workshop, plusieurs "fantasmes cinéphiles" sont aboutis avec brio ici, et la seule limite à laquelle se heurte le film est celle de l'imagination de ses créateurs, particulièrement connus pour être deux des cinéastes hong-kongais les plus imaginatifs et les plus créatifs de leur époque... Dois-je en rajouter?

83
Finalement, la seule limite à laquelle se heurte IRON MONKEY et qui l'empêche de se hisser au niveau des plus grands Kung Fu Pian (IL ÉTAIT UNE FOIS EN CHINE 2, indéniablement), c'est la mise en scène de Yuen Woo-Ping, ingénieuse, mais à des lieues d'atteindre le génie d'un Tsui Hark voire d'un Sammo Hung... Mais franchement : et alors? Difficile d'égaler le niveau de deux tels génies, et la mise en scène de Yuen Woo-Ping est déjà magnifique telle qu'elle est. Outre le fait qu'il parvienne à rendre lisible et limpide des combats d'une intensité, d'une rapidité et d'une frénésie presque inimaginable, il réussit aussi à styliser, par l'usage de sa caméra, ces grands moments de folie, et gère l'espace avec virtuosité. Au-delà de ça, on sent derrière la caméra le talent d'un homme qui a passé sa vie à magnifier ses artistes martiaux, et ici, ils sont de taille : Rongguang Yu est absolument excellent, Shi Kwan-Yen, comme à son habitude, est terrible, mais c'est surtout Donnie Yen qui est impressionnant ici... C'est simple, ce bonhomme est un des plus grands artistes martiaux de tous les temps, et chaque scène ou il apparait est rendue d'autant plus intense par son talent martial absolument magnifique. Mais le film réserve d'autres surprises, à savoir la petite Tsang Sze-Man, qui interprète brillamment le jeune Wong Fei-Hung, et s'illustre avec brio lors de scènes de combat brillament chorégraphiées par le maître Yuen Woo-Ping, dont l'inventivité, l'absence totale de limites et la gestion magnifique du rythme de l'action font d'IRON MONKEY une très grande réussite formelle et un divertissement de la plus grande qualité, par ailleurs enrichie par la beauté esthétique indéniable du film. Mais ce n'est pas tout, car IRON MONKEY, c'est aussi une galerie de personnages profondément attachants et charismatiques... Outre les géniaux Wong Kei-Ying, Wong Fei-Hung et Iron Monkey, qui sont, sans surprise, attachants et touchants, c'est surtout le personnage d'Orchidée qui réserve des surprises. Personnage touchant, voire bouleversant, elle est magnifiquement animée par Jean Wang, et ensuite par la caméra de Yuen Woo-Ping, qui sublime sa beauté et son charisme et en fait constamment un personnage surprenant et attachant. Impossible également de ne pas voir l'obsession de Tsui Hark pour les femmes derrière ce personnage, mais ce serait me répéter que de le dire encore une fois, non?

87
IRON MONKEY s'impose comme un indispensable pour quiconque apprécie le cinéma d'arts martiaux : outre ses qualités évidentes en tant que Kung Fu Pian excessivement spectaculaire, c'est un film d'une grande importance qui renouvelle à chaque instant les figures iconiques et populaires qu'il aborde et qui donne une dimension nouvelle au personnage fétiche de toute l'industrie cinématographique hong-kongaise : l'excellent Wong Fei-Hung, ici représenté dans un des meilleurs films l'ayant abordé, de près ou de loin... IRON MONKEY est assurémment un grand film, qui renverse les codes du Kung Fu Pian, s'impose comme un divertissement sans égal mais aussi comme une oeuvre touchante mettant constamment ses personnages en avant et faisant preuve d'une grande maîtrise de ces derniers... IRON MONKEY, c'est tout ça. C'est drôle, c'est beau, c'est spectaculaire, ça envoie du lourd et ça s'arrête jamais. Un chef d'oeuvre? Oui. Un indispensable? Deux fois oui. Un des plus grand Kung Fu Pian? Mille fois oui, oui, oui.

CLIQUEZ ICI POUR ACCÉDER A LA GALERIE COMPLETE DU FILM.

71
SI VOUS AVEZ AIMÉ CE FILM, VOUS AIMEREZ AUSSI...

  • SWORDSMAN DE CHING SIU-TUNG, TSUI HARK, KING HU, RAYMOND LEE, ANDREW KAM ET ANN HUI.
  • SWORDSMAN II DE CHING SIU-TUNG.
  • TAI-CHI MASTER DE YUEN WOO-PING.
  • DRUNKEN MASTER DE YUEN WOO-PING.
  • DRUNKEN MASTER II DE LIU-CHIA LIANG.
  • IL ÉTAIT UNE FOIS EN CHINE DE TSUI HARK.
  • IL ÉTAIT UNE FOIS EN CHINE 2 DE TSUI HARK.
  • IL ÉTAIT UNE FOIS EN CHINE 3 DE TSUI HARK.
  • ZU, LES GUERRIERS DE LA MONTAGNE MAGIQUE DE TSUI HARK.

-ZE RING-

 

66

27 mai 2011

LE BON, LA BRUTE ET LE TRUAND

LBLBLT1

RÉALISATION | SERGIO LEONE
ÉCRITURE | SERGIO LEONE, LUCIANO VINCENZONI, AGENORE INCROCCI, FURIO SCARPELLI ET
MICKEY KNOX.
MUSIQUE | ENNIO MORRICONE

CLINT EASTWOOD | Blondin
LEE VAN CLEEF | Angel Eyes
ELI WALLACH | Tuco

LBLBLT2


Le bon, la brute et le truand est troisième et dernier segment de la trilogie de l'homme sans nom de Leone. Considéré par beaucoup comme le meilleur western spaghetti de tous les temps, Le bon, la brute et le truand est en effet une valeur sure puisque c'est le film qui marque définitivement l'age d'or de Sergio Leone, et donc du cinéma italien. Et pour quelques dollars de plus était déja impressionnant : Leone pousse ici les choses encore loin en signant Le bon, la brute et le truand, une des oeuvres les plus épiques et les plus abouties de son temps. Il n'y a pourtant ici rien de bien oiginal : une chasse au trésor et trois mecs qui se foutent sur la gueule pour le trouver, c'est du déja vu, malgré tout Le bon, la brute et le truand est un chef d'oeuvre, la raison est bien simple et s'applique aux 5 westerns de Leone : le film brille plus par sa forme que par son fond et si le fond est bien traité dans son ensemble c'est davantage la forme qui attire l'attention dans ce récit de 3 heures sur la loyauté et la trahison (les thèmes fétiches de Sergio Leone.) ou les punchlines mythiques (-Hé amigo, tu sais que t'as une tête qui vaut 2000 dollars? -Et toi t'as pas la tête de celui qui les encaissera.) et les duels s'enchainent jusqu'a un final épique qui restera encore longtemps dans les mémoires. Le bon, la brute et le truand, une oeuvre culte.

LBLBLT3

Troisième et dernière collaboration du duo mythique Sergio Leone-Clint Eastwood, celui-ci s'habille pour la dernière fois de son poncho dans ce western pour jouer le rôle de Blondin, "le plus gros dégueulasse que la Terre ait jamais porté.", salopard sournois, égoïste et bien évidemment, un tireur d'élite, à côté de lui se trouve l'impressionnant Lee Van Cleef, qui joue ici un bad mother fucker comme on les aime, cupide, égoïste, violent, manipulateur et charismatique, le bonhomme tient ici le rôle de sa vie, tout comme Eli Wallach, truand sans prétention qui se retrouve embarqué dans une chasse au trésor colossale et dont le personnage rappelle étrangement Juan Miranda, le personnage de Rod Steiger dans Il était une fois la révolution. Comme d'habitude, les acteurs sont géniaux, les personnages auxquels ils donnent vie le sont également : profonds et travaillés, l'un d'eux en deviendrait presque attachant mais ça reste un salaud... C'est le seul problème de Leone à l'époque du bon, la brute et le truand : ses personnages sont des salopards opportunistes auxquels on ne s'attache vraiment, problème qu'il parviendra à régler avec brio dans sa trilogie américaine (sur laquelle je travaillerai très bientôt, patience!!), qui, au passage, pète mille coudées au-dessus de cette trilogie de l'homme sans nom qui est déja un standard de qualité très élevé!

LBLBLT4

A partir d'un postulat de base simple, Leone signe avec Le bon, la brute et le truand la fin d'une trilogie épique : il est donc logique que ce dernier volet soit le plus épique des trois, pari difficile à tenir mais réussi puisque le film, qui dure 3 heures, c'est bon de le préciser, enchaine des scènes d'anthologie sans aucun temps mort (le tout non pas sans trait d'humour.), merci à des scénaristes de talent et aux dialogues croustillants que les acteurs récitent comme si leur vie en dépendait, scénaristiquement le film est génial et Leone prouve une fois de plus qu'en termes de mise en scène il pétait, en son temps, à mille coudées au-dessus de tout le monde (à part peut-être Peckinpah... Mais c'est pas le même genre de mise en scène.) et livre donc un CHEF D'OEUVRE visuel, ou chaque scène fait oublier la précédente, chaque baston, chaque duel est plus épique que le précédent, par sa mise en scène Leone toucherait presque à la perfection (et ce n'est qu'un aperçu de la qualité cinématographique qu'il parviendra à atteindre avec ses trois films suivants.), mise en scène qui est une fois de plus magnifiquée par la musique culte d'Ennio Morricone, la classe!

LBLBLT5

En somme, un autre western spaghetti à la Leone. La formule ne change donc pas : des acteurs classes, qui interprètent tous des badass motherfuckers, des bastons épiques, une musique qui déchire sa race et des répliques à tour de bras... Seulement Leone est bien connu pour ne jamais avoir sorti un film moins bon que le précédent, Le bon, la brute et le truand est donc un chef d'oeuvre épique, qui enterre ses deux ainés les doigts dans le nez. Une oeuvre culte, un tournant dans l'histoire du cinéma et si par la suite Leone à abandonné Eastwood (même si ça me semble plutôt etre le contraire, mais j'y reviendrai dans un article prochain) ce n'est que pour mieux changer de formule et créer des oeuvres bien plus importantes, car soyons clair si la trilogie de l'homme sans nom fut un évènement dans l'histoire du cinéma, de par la ressemblance importante entre les trois films il est difficile de les qualifier les trois d'oeuvres importantes... Mais peu importe ça reste du pur plaisir jouissif et aucun des trois westerns présentés ces derniers jours n'est aussi bon que ce que Leone à fait par la suite... Comment ça, ça donne envie?

-ZE RING-

LBLBLT6

10 février 2013

UNE BALLE DANS LA TÊTE

Jaquette
RÉALISÉ PAR
|
JOHN WOO
.
ÉCRIT PAR | JOHN WOO, PATRICK LEUNG ET JANET CHUN.
MUSIQUE COMPOSÉE PAR | JAMES WONG ET ROMEO DIAZ.

TONY LEUNG CHIU WAI | Bee.
JACKIE CHEUNG | Fai.
WAISE LEE | Wing.
SIMON YAM | Lok.
FENNIE YUEN | Jane.
YOLINDA YAM | Yan Sau Ching.

En 1967, trois amis d'enfance fuient Hong Kong après avoir tué involontairement un chef de gang et tentent de faire leur fortune au Viet-Nam.

31
Ca fait un bout de temps que je veux réécrire certaines de mes chroniques. En l'occurence, il m'a toujours semblé que John Woo a sur ce site toujours souffert d'une grande injustice : ses oeuvres sont reléguées au second plan, celles-ci ayant été chroniquées dès la création du blog, et surtout, les articles qui leurs sont destinés manquent clairement de maturité et d'analyse cinématographique. Ce n'est pourtant pas faute de vénérer littéralement le bonhomme, qui est ni plus ni moins que mon deuxième réalisateur hongkongais préféré, juste derrière Tsui Hark, et ceux qui connaissent ma passion immodérée pour le cinéma hong-kongais des années 80 et 90 savent ce que cela signifie. John Woo est un très grand réalisateur, et les grands réalisateurs méritent des critiques toutes aussi géniales. Et si je ne pense pas être un critique génial, je vais néanmoins tenter de vous donner envie de jeter un coup d'oeil a un film bien injustement ignoré : UNE BALLE DANS LA TÊTE, chef d'oeuvre maudit et injustement mal aimé de John Woo... Mais aussi son plus grand film. Un film que je regarde en boucle depuis que j'ai 9 ans et qui, même maintenant, se range haut la main dans mes 10 "all time favourites".

51
Un peu d'histoire pour commencer. En 1986, John Woo s'est heurté à plusieurs reprises, déjà, à la rigidité de l'industrie cinématographique hong-kongaise de l'époque. Il est coincé dans un schéma artistique qui ne lui plait pas, puisqu'en tant que réalisateur pour la Golden Harvest, il est contraint de réaliser de nombreuses comédies dans lequel il ne parvient pas à imposer son style, ainsi qu'un film de guerre, LES LARMES D'UN HÉROS, dans lequel il balance toutes ses frustrations de l'époque, elles-mêmes atténuées par les studios, qui imposent à un autre réalisateur d'ajouter au film des scènes de sexe inutiles et des passages comiques d'un faible niveau. A cette époque, la créativité de John Woo est au plus bas, mais c'est à la même époque qu'il rencontre Tsui Hark, qui est au même point : de tous les films qu'il à fait, malgré leur qualité, tous ont méchamment bidé. Hark prend néanmoins John Woo sous son aile, dans son studio, le FILM WORKSHOP, ou il réalise LE SYNDICAT DU CRIME, film fondateur de l'heroic bloodshed qui va a lui seul révolutionner et rendre célèbre d'un point de vue international le cinéma hong-kongais. Les deux grands fous que sont Woo et Hark continuent leur collaboration, jusqu'a ce que Woo arrive un jour avec l'idée à la base d'UNE BALLE DANS LA TÊTE... Tsui Hark lui pique comme un malpropre, et avec cette dernière, réalise LE SYNDICAT DU CRIME 3. John Woo coupe tout lien et interrompt sa collaboration avec Tsui Hark, mais son envie de réaliser UNE BALLE DANS LA TÊTE et son ambition est plus grande que jamais. Après les succès du SYNDICAT DU CRIME 1 & 2, John Woo a le champ libre pour faire ce qu'il veut. Il met donc au point un projet colossal : un film de 3 heures sur la guerre du Viet-Nam, comportant également un aspect très personnel pour John Woo, puisqu'il y aborde son enfance difficile à Hong Kong et la misère qui y régnait à cette époque. Tout laisse alors présager un chef d'oeuvre, jusqu'aux premières projections du film... C'est un échec MONUMENTAL.

12
La raison est simple : UNE BALLE DANS LA TÊTE aborde de manière très frontale la violence des manifestations pour la paix au Viet-Nam, et celles-ci ne sont pas sans évoquer, pour le public hong-kongais, les massacres de la place Tian'anmen, survenus un an avant la sortie du film. Le film est un énorme échec, et John Woo est contraint de remonter son film... Avec l'aide improbable de 12 monteurs, il raccourcit son film d'une heure, mais le remontage est une catastrophe et la version originale part aussitôt a la poubelle. On ne la verra donc malheureusement jamais, et nous devrons donc nous contenter de la version de 2 heures actuellement disponible en DVD (le DVD n'est d'ailleurs pas très beau, mais c'est sans doute plus un problème de copie qu'autre chose... Les hong-kongais et la conservation des films, ça n'a jamais fait bon ménage.). Le résultat est un chef d'oeuvre raté. Un film qui aurait pu être bien mieux, et qui est bourré de failles : des passages manquent, des faux raccords s'y trouvent (c'est inévitable quand on découpe un film comme ça)... Tout chef d'oeuvre raté qu'il est, UNE BALLE DANS LA TÊTE reste néanmoins un vrai chef d'oeuvre, un film dont l'ampleur n'est même pas étouffée par son remontage, dont la puissance émotionnelle est toujours intacte et qui témoigne d'une maîtrise formelle que peu de réalisateurs peuvent prétendre avoir. N'écoutez pas la majorité : aussi magnifique soit-il, THE KILLER, souvent considéré comme le chef d'oeuvre de John Woo, se fait exploser sur place par UNE BALLE DANS LA TÊTE, un grand film, qui, malgré sa production difficile, se range haut la main au côté des chefs d'oeuvres du film de guerre comme APOCALYPSE NOW, CROSS OF IRON ou THE DEER HUNTER.

58
UNE BALLE DANS LA TÊTE
est d'ailleurs à bien des égards un remake à peine déguisé de ce dernier. Seulement, la ou Michael Cimino abordait la guerre de manière très intimiste, et proposait une étude psychologique poussée de ses personnages, John Woo préfère livrer une oeuvre épique et très shakespearienne, s'inspirant autant d'HAMLET que des oeuvres épiques de Sam Peckinpah et de Chang Cheh. Ainsi, John Woo tranche ici clairement avec la subtilité inhérente aux grands films du genre en proposant un regard baroque, parfois même excessif sur la guerre du Viet-Nam et sur l'influence de cette dernière sur les rapports humains. Dans THE KILLER et LE SYNDICAT DU CRIME, Woo proposait un regard très romancé sur l'amitié et la loyauté, que même la violence et la mort ne pouvaient pas briser, mais dans UNE BALLE DANS LA TÊTE, il démolit littéralement l'amitié et va donc la ou on ne l'attend pas. Partant d'un récit d'amitié extrêmement romancé, John Woo brise ensuite toutes les illusions naïves d'un coup pour confronter ses personnages à la dureté de la réalité et de la vie. Le monde est en plein chaos, et c'est une période de trouble social pour tout le monde, et Woo n'hésite pas à le montrer frontalement et sans concession... Ceux qui le pensaient naïf et niais seront ici surpris tant UNE BALLE DANS LA TÊTE transpire la noirceur, le nihilisme, mais c'est aussi un film qui brille par le réalisme de son fond. Si la forme est baroque, folle et excessive à souhait, le fond, lui, reflète avec force l'horreur et la violence humaine ainsi que le chaos social qui secoue nos sociétés depuis des siècles, le même chaos dans lequel les personnages principaux du film évoluent constamment, dont ils sont autant les victimes que les acteurs, et qui finissent inévitablement par être influencé par le manque de société convenable qui les entoure... Les séquelles sont physiques et morales, mais aucun ne revient le même des épreuves présentées ici, même les personnages les plus forts et les plus préparés à ce qui les attend.

37
N'épargnant rien à ses personnages, UNE BALLE DANS LA TÊTE se présente dès le départ comme une expérience viscérale mais surtout comme une baffe émotionnelle d'une rare intensité. Outre la violence et la noirceur de son propos, le film s'impose comme une oeuvre véritablement bouleversante de par son aspect très shakespearien. L'amitié étant ici la valeur fondamentale et primordiale, la seule supposée résister aux atrocités de la guerre et de la violence, le film s'avère être extrêmement émouvant lorsque la trahison s'impose comme la seule capable de survivre et de dominer. Outre la noirceur du propos, UNE BALLE DANS LA TÊTE doit sa puissance émotionnelle à la maîtrise incroyable de John Woo de ses personnages. Ceux-ci peuvent sembler caricaturaux, pourtant, leur portrait est toujours très subtil, cohérent et intelligent. John Woo restant John Woo, néanmoins, impossible de ne pas voir dans les personnages du film des incarnations modernes de véritables paladins ou de chevaliers de wu xia pian, et cela contribue à les rendre tous doublement attachants. Mais ce sont surtout les relations qu'ils entretiennent entre eux qui constituent le coeur émotionnel de l'oeuvre. En effet, tous les personnages sont représentatifs de "l'amitié virile" présenté dans les wu xia pian épiques de l'illustre Chang Cheh, c'est-à-dire que leurs rapports s'apparentent presque à des relations ouvertement homosexuelles, la distinction entre le compagnon d'armes et le compagnon tout court étant, comme d'habitude chez John Woo, extrêmement floue. Une fois de plus, on pourrait facilement voir de la niaiserie et de la naïveté derrière une telle démarche mais en réalité elle témoigne davantage d'une volonté d'amplifier l'épique et le baroque de chaque situation. Toujours est-il que cette dimension quasi-homosexuelle est ici fortement contrebalancée par le personnage de Wing, dont l'évolution dramatique et nihiliste, à défaut d'être subtile, est bien amenée et est surtout déchirante pour le spectateur comme pour les autres personnages. En faisant du pétage de plomb inévitable de ce personnage déséquilibré l'élément central de tension, Woo place d'office son film sous le joug de la fatalité, une fatalité, qui, lors de sa concrétisation physique, risque de vous envoyer une des baffes morales et émotionnelles les plus mémorables que vous vous soyez pris devant un film.

24
En effet, à l'aune de sa conclusion (voire avant), UNE BALLE DANS LA TÊTE risque bien de vous bouleverser ou en tout cas de vous marquer durablement, mais cela, le film ne le doit pas uniquement à sa force émotionnelle. Celui-ci ne serait pas le même sans la maîtrise de John Woo, qui signe ici un de ses films les mieux mis en scène. Moins baroque et moins maniériste dans la forme que THE KILLER, UNE BALLE DANS LA TÊTE reste une oeuvre très stylisée qui doit beaucoup à la mise en scène monumentale du maître... Outre les innovations visuelles qu'on lui connait déjà (et qui trouvent leurs plus grands aboutissements dans le monumental A TOUTE ÉPREUVE), Woo se montre ici tout à fait capable de calmer ses ardeurs pour livrer une oeuvre moins folle, moins inventive, et donc, moins marquante visuellement, mais aussi plus crue, plus dure et surtout plus forte dans son traitement de la violence. Que ce soit dit, UNE BALLE DANS LA TÊTE est l'une des oeuvres les plus violentes qu'il m'ait été donné de voir, non pas parce qu'il est visuellement ultra-violent, mais avant tout parce qu'au travers de sa mise en scène, Woo balance des morceaux de violence morale dans la gueule du spectateur avec une force rare et une absence totale de concession et de limites... La scène du camp de prisonniers en témoigne bien. Véritable écho de THE DEER HUNTER, elle défonce littéralement son modèle au niveau de la violence morale, et torture autant ses personnages que son spectateur... La mise en scène de Woo finit de faire d'UNE BALLE DANS LA TÊTE une oeuvre profondément hystérique, capturant avec pêche et puissance la folie de l'époque qu'il représente et offrant un spectacle formel d'un excellent niveau : la photographie est somptueuse, la reconstitution historique incroyable, et la façon dont Woo oppose la façon presque naturaliste avec laquelle il filme Hong Kong avec le baroque et l'excès du Viet-Nam inspire clairement le respect. Qui plus est, on retrouve une fois de plus la maîtrise incomparable qu'a John Woo de la musique... Omniprésente, celle-ci est utilisée comme dans un opéra pour marquer avec force les émotions, rythmer l'émotion et la graduer. La cohésion entre la bande-son et l'image est ici presque parfaite, d'autant plus qu'elle est composée par le meilleur compositeur hong-kongais : le grand James Wong, dont je ne peux dire que du bien.

59
Au-delà de ça, c'est également à la maîtrise visuelle du grand John que revient le mérite du charisme de ses personnages... D'office, dès le premier plan ou les personnages sont comme gravés dans la roche, ceux-ci apparaissent comme des icônes, représentant en une image toutes les valeurs qu'ils incarnent. L'amitié, la loyauté, la famille, la trahison sont autant de valeurs chères à John Woo (et l'obsédant, pour être honnête) qui sont représentées de manière presque explicite par chaque personnage. Mais surtout, chaque personnage fait preuve d'un charisme visuel incroyable, qui est dû autant à la maestria visuelle de John Woo qu'aux acteurs qui animent avec brio les protagonistes du film. S'il semble clair que Tony Leung Chiu-Wai livre, comme à son habitude, une très grande prestation et anime avec grâce le rôle principal, il ne faudrait pas oublier Jackie Cheung et Waise Lee, acteurs la plupart du temps relégués aux seconds couteaux, qui trouvent ici tous deux leurs meilleurs rôles et s'investissent à fond dans des performances irréprochables au potentiel émotionnel viscéral. Mais c'est surtout Simon Yam qui vole la vedette ici, dans le rôle de Lok, tueur à gages profondément héroïque qui n'est pas sans évoquer le protagoniste principal de THE KILLER... Celui-ci vole complètement le show de par la classe, le charisme et la puissance de sa performance, mais en somme, tous brillent ici pour les mêmes raisons, et si UNE BALLE DANS LA TÊTE est un "film d'hommes", il ne faudrait également pas oublier que Fennie Yuen et Yolinda Yam, deux des plus belles actrices hong-kongaises, irradient l'écran de par leur charme et leur beauté. Tous donnent vie avec brio à ce qui est probablement le film le mieux écrit de John Woo : on y retrouve le même souffle épique et la même force viscérale, mais en même temps, les dialogues parfois ratés des précédents opus Wooiens sont ici complètement évités et on se retrouve donc face à un film qui évite donc constamment la naïveté ou la niaiserie pour balancer des grosses baffes dans la gueule du spectateur.

15
UNE BALLE DANS LA TÊTE
est un chef d'oeuvre raté, c'est un fait. Impossible de ne pas se dire, à la vision du film, que ça aurait pu être encore mille fois mieux. Mais en l'état, combien de films arrivent-ils à être aussi bouleversants et aussi viscéraux? Car soyons clair, UNE BALLE DANS LA TÊTE est le film de guerre ultime. C'est une oeuvre qui transcende complètement les attentes et assène sans aucune concession, limite ou retenue de gros uppercuts moraux dans la baffe du spectateur, démuni face à tant de chaos, d'hystérie, de folie et de violence si magnifiquement représentés à l'écran par la caméra d'un maître au sommet de son art. John Woo n'a jamais fait mieux, et ne fera jamais mieux. La raison est simple : UNE BALLE DANS LA TÊTE est une oeuvre universelle, qui parlera à tout le monde et qui décrit un chaos social plus actuel que jamais, et qui, par conséquent, s'inscrit et reste inévitablement dans la mémoire de ceux qui ont la chance de l'avoir vu. C'est un chef d'oeuvre raté, oui, mais c'est aussi un chef d'oeuvre tout court, et à défaut d'atteindre le degré de puissance qu'il aurait pu avoir, UNE BALLE DANS LA TÊTE enterre néanmoins la très grande majorité des films. C'est une des oeuvres les plus viscérales et les plus bouleversantes jamais créées, et aussi maudit soit-il, UNE BALLE DANS LA TÊTE reste l'un des meilleurs films tournés à Hong Kong, et à titre personnel, un des meilleurs films au monde.

CLIQUEZ ICI POUR ACCÉDER A LA GALERIE COMPLETE DU FILM

46
SI VOUS AVEZ AIMÉ CE FILM, VOUS AIMEREZ AUSSI...

-ZE RING-

60

9 juillet 2011

L'ÉVENTREUR DE NEW YORK

ENYJAQ
RÉALISÉ PAR | LUCIO FULCI.
ÉCRIT PAR | LUCIO FULCI, DARDANO SACCHETTI, GIANFRANCO CLERICI ET VINCENZO MANNINO
.
MUSIQUE COMPOSÉE PAR | FRANCESCO DE MASI.

JACK HEDLEY | Lt. Fred Williams
ALMANTA SUSKA | Fay Majors
HOWARD ROSS | Mickey Scellenda
ANDREA OCCHIPINTI | Peter Bunch
ALEXANDRA DELLI COLLI | Jane Forrester Lodge
PAOLO MALCO | Dr. Paul Davis

New York est en état de choc. Une vague de crimes abominables s'est abbatue sur la ville. Des jeunes femmes sont retrouvées mortes et multilées. Le policier Fred Williams, chargé de la douloureuse enquête, est bientot contacté par un homme parlant avec une voix de canard, et prétendant être l'assassin. Une voix qui défie Williams de le retrouver. Alors que tout va être mis en place pour arrêter l'immonde maniaque, les crimes les plus atroces vont se succéder.

ENY1


ATTENTION FILM EXTRÊME!

Avec tout le respect que j'ai pour Fulci, acheter ses films pose un majeur souci : il y a toujours une chance sur 2 de tomber sur une grosse merde. Car cet homme, considéré comme un des maitres de l'horreur italienne par beaucoup (moi le premier), à bel et bien une filmographie en demi-teinte : ayant commencé sa carrière à la fin des années 50 avec des comédies apparemment très dispensables (I LADRI), il s'est ensuite orienté vers le giallo (DON'T TORTURE A DUCKLING, plus connu en France sous le nom déconcertant de LA LONGUE NUIT DE L'EXORCISME.), le western spaghetti (LE TEMPS DU MASSACRE, LA SELLA D'ARGENTO et LES 4 DE L'APOCALYPSE.) puis vers l'horreur pure et dure, le genre qui à fait son succès avec notamment sa Trilogie des morts-vivants (L'ENFER DES ZOMBIES, FRAYEURS, L'AU-DELA.) Par la suite, il réalisera un poliziettesco (LA GUERRE DES GANGS), de l'héroic fantasy (CONQUEST), et même de la science-fiction (2072, LES MERCENAIRES DU FUTUR.). Sa carrière est alors en déclin : inutile de dire que la plupart des films de cette période sont assez moisis, du moins selon les critiques que j'ai pu lire. C'est entre sa période horreur pure et dure et sa période moisie que Lucio Fulci signe un autre giallo : L'ÉVENTREUR DE NEW YORK. Soyons clair : la subjectivité est de mise (ça arrive de plus en plus souvent sur ce blog.) car ce film échappe à toute analyse critique objective.

ENY2

La raison à cela est simple : L'ÉVENTREUR DE NEW YORK souffre des mêmes défauts que tous les films de Fulci, autant dire donc qu'il est très nanardesque sur les bords, en cela que non seulement les acteurs sont moisis, mais en plus le film est un film à très petit budget, la musique au synthé est très laide (mais perso j'adore.) et le côté loufoque de tous les personnages pourra déranger certains. C'est ce qui vaut à Fulci la réputation de grand nanardeux, et autant dire que je serai d'accord si à côté de ça Lucio Fulci n'était pas un des meilleurs metteurs en scène de tous les temps doublé d'un grand scénariste. S'arrêter aux défauts des oeuvres de Fulci est une chose à ne pas faire donc, tant beaucoup d'entres elles brillent sur bien d'autres points. C'est le cas de L'ÉVENTREUR DE NEW YORK, pur giallo dont la qualité globale ferait rougir tous les grands maitres du genre et certainement le meilleur des Fulci que j'ai vu (j'ai vu celui-la, L'ENFER DES ZOMBIES, L'AU-DELA et les très moisis ZOMBI 3 (même si c'est plus un Mattéi qu'un Fulci.) et AENIGMA pour ceux que ça intéresse.), d'ailleurs aux grands grands fans du maitre, tout ce que je pourrai dire c'est : arrêtez de vous branler sur L'AU-DELA car aussi génial soit-il jamais une seconde il n'égale L'ÉVENTREUR DE NEW YORK. EXPLICATIONS.

ENY3

Le premier truc qui frappe dans L'ÉVENTREUR DE NEW YORK, c'est son côté loufoque. Entre le tueur qui parle comme u canard (What the fuck?), le flic qui aime les putes, le légiste qui prend un plaisir non dissimulé dans ses autopsies ou le docteur qui se booste aux magazines homos, inutile de dire que L'ÉVENTREUR DE NEW YORK délivre des personnages atypiques, du moins, atypiques pour nous, tant ce genre de personnages est standard dans le cinéma transalpin de cette époque. C'est donc un film très étrange que livre Lucio Fulci, non seulement par ses personnages mais également par son ambiance, qui prend un tournant carrément fantastique lors de certaines scènes. La scène du cinéma ou Almanta Suska fait sa première apparition atteint des sommets d'étrangeté, visuellement comme scénaristiquement, tant cette scène ne fait aucun sens au moment ou on la voit, et visuellement dans la mesure ou Fulci manipule l'environnement qu'il exploite pour les besoins de son oeuvre : New York est ici une ville sombre, opressante, glauque, l'éclairage du film est particulièrement étrange et n'est d'ailleurs pas sans rappeler le travail de Dario Argento, bref, Fulci filme son giallo comme un film fantastique, en témoigne les scènes de meurtre ou chaque plan mystifie le tueur, dont l'identité n'est jamais révélée avant la fin, à ce titre, Lucio Fulci exploite les codes du genre avec brio et se révèle même plus en cohésion avec les codes du giallo qu'Argento, pourtant considéré comme le maître du genre, car ce qui manque chez Argento et qu'il y a dans les giallis de Fulci c'est cette dose d'érotisme que l'on retrouve dans L'ÉVENTREUR DE NEW YORK, car tout le film tourne autour du sexe. En conséquence, Fulci signe des scènes érotiques cradingues (en témoigne la scène ou Alexandra Delli Colli se fait tripoter par deux inconnus dans un bar.). Très malsaines, celles-ci provoquent aisément le malaise, en partie grâce aux qualités de metteur en scène et de monteur de Fulci. Au cours de ces scènes, tout le glauque du film atteint son paroxisme, autant dire que ça n'aidera pas ceux qui n'aiment pas le film à l'apprécier plus... Mais que c'est génialissime pour qui apprécie!

ENY4
Et puis évidemment les qualités de L'ÉVENTREUR DE NEW YORK ne s'arrêtent pas la. Lucio Fulci fait preuve de talents de mise en scène impressionnants, sa caméra en disant plus sur l'histoire que ses personnages, on retrouve donc toutes les trademarks du maitre : zoom sur les éléments importants de chaque scène, jeux de lumière... Tout ceci aide Fulci à construire avec brio des morceaux de tension incroyables quand il en vient à supprimer un protagoniste, ainsi les meurtres sont de grands moments de suspense et de sursaut qui se terminent inéluctablement sur la véritable marque de fabrique de Lucio Fulci : des effets gores incroyablement réalistes malgré le côté cheap du film, et autant dire que le gore n'a jamais été aussi insoutenable, mais jamais une seconde Fulci ne tombe dans le côté indéniablement grand guignol de L'AU-DELA, au contraire, il se montre ici capable de montrer avec un oeil fasciné des scènes gorissimes (Fulci à fait des études de médecine avant de faire du cinéma.), mais aussi capable de calmer cinq minutes le bain de sang et de livrer des scènes à la violence sobre mais incroyable, en témoigne cette scène de violence finale qui se solde sur une explosion de tête furtive mais puissante. Malheureusement voila, si les moments de violence de L'ÉVENTREUR DE NEW YORK ont un punch incroyable c'est paradoxalement le problème le plus important du film tant beaucoup seront rebutés par un aspect gore craspec complètement gratuit, inutile de dire que pour ma part je m'en fous et que chaque sévice dans ce film est pour moi un pur bonheur cinéphile!!

ENY5

Fulci, avec ce film, prouve donc qu'il est capable de tout : suspense, violence, peu importe... Mais L'ÉVENTREUR DE NEW YORK est aussi la preuve indéniable des talents d'écriture incroyables de ce dernier, car soyons clair, si les dialogues frisent parfois le ridicule (notamment grâce à des acteurs très moisis qui n'aident jamais à les rendre crédibles, exception faite pour Jack Hedley qui se démerde très bien dans son rôle d'inspecteur de police.), ce serait oublier la qualité de la structure et de la construction de la tension du film, en effet, comme dans tout bon giallo qui se respecte, Fulci ne montre pas l'identité de son tueur avant la fin mais surtout il déroute le spectateur, le mène sur des fausses pistes et construit, au travers du personnage pivotal du récit qu'est Mickey Scellenda, un suspense incroyable concernant la suite des évènements. Car si Howard Ross n'a en tout et pour tout qu'une ligne dans le film (c'est-à-dire "Bitch!"), ce n'est pas un hasard, car c'est autour de ce personnage inquiêtant que Fulci construit son suspense, c'est très certainement le personnage qu'on voit le plus et le personnage qu'on entend le moins, par le silence de ce dernier Fulci sème le mystère. Et les qualités d'écriture de L'ÉVENTREUR DE NEW YORK ne s'arrêtent pas la : Fulci n'est pas Audiard et il en était très certainement conscient, ce pourquoi il ne cherche pas à foutre des dialogues toutes les deux secondes, bien au contraire, la plupart des éléments scénaristiques du film sont délivrés par la caméra et par la mise en scène, chaque détail visuel et sonore à ici son importance. Fulci semble avoir tout compris au rôle et à la fonction de la mise en scène et utilise ce savoir pour faire de L'ÉVENTREUR DE NEW YORK un film très bien écrit et donc jamais lourdingue tout en étant très prenant, puisque soyons clair : il n'y a aucun temps mort, pas une seconde d'ennui et ce malgré la relative lenteur de chaque scène, lenteur qui crée un contraste intéréssant avec des explosions de violence et de gore beaucoup plus dynamiques et agressives.

ENY6

Malheureusement voila : des défauts, il y en a un paquet. A commencer par la musique assez moisie de Francesco De Masi (mais je le répète, j'adore.), les acteurs qui ne savent pas réciter une réplique correctement et le petit budget qui fait que certains effets spéciaux font un peu rigoler, mais, en soit, quelle importance? Car à mes yeux, ces défauts témoignent davantage d'une volonté de se passer du superficiel pour aller droit à l'essentiel que de talents de direction d'acteur limités. Fulci semble se foutre complètement de ses acteurs, ce qui est assez raisonnable dans la mesure ou à part Hedley ils sont tous doublés en anglais, par ailleurs, si ceux-ci livrent des prestations assez mauvaises, force est de constater qu'ils ont tout de même tous un physique qui correspond parfaitement à leur rôles. Bien évidemment, je cite ce qui constitue pour moi des lacunes à cette oeuvre, mais pour ceux qui n'apprécient pas Fulci, je pense qu'il y a possibilité d'en trouver bien plus, mais en tant que fan, j'ai pas envie. Car L'ÉVENTREUR DE NEW YORK est un pur chef d'oeuvre à mes yeux, un grand film et mon Lucio Fulci préféré à ce jour, enterrant le génialissime L'AU-DELA mille fois, qui, je le rappelle, est considéré par beaucoup comme le meilleur film d'horreur italien de tous les temps... Personnellement je n'irai pas jusque la même s'il est clair qu'il fait partie des meilleurs!

ENY7

Je crie au chef d'oeuvre mais depuis le début de ma critique, mon bilan semble mitigé. La raison est simple : L'ÉVENTREUR DE NEW YORK est un film qui échappe à toute analyse critique objective, malgré tout j'essaye tout de même de l'être, objectif, ça donne cet article. Si je suis le premier à admettre que les acteurs de Fulci sont toujours moisis, si je suis le premier à admettre que les musiques de Fabio Frizzi ou de Francesco de Masi sont horriblement laides, et bien malgré tout je suis aussi le premier à me vautrer sur mon canapé devant un petit Lucio Fulci et à m'en foutre complètement... Parce qu'une mise en scène de ce putain niveau de qualité c'est chose peu courante maintenant et que y a pas mal de réals actuels qui feraient mieux de prendre quelques leçons chez pépé Fulci. L'ÉVENTREUR DE NEW YORK est à mes yeux un putain de chef d'oeuvre, un film que vous allez donc vous dépecher de voir avant que je me mette à parler comme un canard et que je devienne dangereux, et pour que cette critique contienne son lot de vulgarité : L'ÉVENTREUR DE NEW YORK encule L'AU-DELA mille fois!

Si vous aimez ce film, vous aimerez aussi...

-ZE RING-

ENY8

3 avril 2011

BAD LIEUTENANT

bad_lieutenant

Réalisé par Abel Ferrara en 1992.
Ecrit par Abel Ferrara, Paul Calderon, Victor Argo et Zoe Lund.
Avec Harvey Keitel, Victor Argo, Paul Calderon et Frankie Thorn.
Musique composée par Joe Delia.

Alors qu'il enquête sur le viol d'un jeune nonne (Frankie Thorn), un flic corrompu (Harvey Keitel) essaye de se repentir.

Bad Lieutenant, en voila un film intéréssant. Partant d'un postulat vu 150 fois au cinéma (un flic pourri essaye de se repentir, on a vu plus original) et somme toute simple, voire simpliste, Bad Lieutenant ne ressemble pourtant à aucun film que vous ayez pu voir (à part peut-être si Abel Ferrara à réalisé d'autres films plus ou moins similaires dans leur ambiance, j'attends de voir King of New York pour le confirmer.), d'une part parce qu'ici on touche au glaucque pur et dur et on sombre au bout de deux minutes dans la subversion la plus pure, deux choses qui sont rarement vues dans les nombreux films qui adoptent la même trame, et si il est clair que l'on a vu des films bien mieux foutus techniquement et mieux réalisés, force est de constater que la force de Bad Lieutenant se trouve ailleurs, mais ou? Et bien c'est ce qu'on va voir, EXPLICATIONS.

BL1
Un nom suffirait à justifier la qualité de ce Bad Lieutenant : Harvey Keitel. A mes yeux, un des meilleurs acteurs de tous les temps, le bonhomme fait ici tout le travail, anime un film que la réalisation par moments bancale d'Abel Ferrara ne parvient pas à animer, donne de l'humanité à un personnage en tous points inhumains, opportuniste, salaud, accro à toutes sortes de drogues, voleur, le Lieutenant est l'incarnation même du pourri, pourtant Keitel de par son jeu parvient à donner une humanité à ce salaud sans coeur, toujours crédible, toujours génialissime, il n'y a pas un seul instant ou le bonhomme, qui est sans doute en permanence à l'écran, assure grave, effacant par sa présence un casting pourtant composé d'acteurs secondaires de talent comme Victor Argo (Taxi Driver) ou Paul Calderon (Pulp Fiction), Harvey Keitel de par son charisme animal et sa présence constitue à lui seul une grande partie de l'interêt du film, qui que ce soit dit, n'est pas nécessairement très prenant, il y a à ce titre quelques longueurs mais en soit peu importe, car la force du film réside ailleurs : dans son ambiance glaucque et sa subversion, car si la réalisation est loin d'être géniale elle contribue à rendre les décors et l'ambiance de ce Bad Lieutenant plus cradingue qu'elle ne l'est déja, Abel Ferrara réussit ici la ou il avait lamentablement échoué dans son tout pourri Driller Killer, à faire de New York une ville étouffante, plongée dans l'obscurité la plus noire et dans la crasse, ou la police est pire que les criminels qu'elle est supposée poursuivre (en témoigne cette scène ou Harvey Keitel menace de son revolver deux petits cons pour qu'ils lui donnent l'argent qu'ils venaient de voler.), et force est de constater que cela fonctionne plutôt bien, rajoutez à cela une bande-son tout sauf agréable et vous avez un film crado, ultra-glaucque, dont l'ambiance évoquerait même parfois le Série noire d'Alain Corneau grâce aux décors entièrement constitués d'appartements miteux et la bande-son se basant entièrement sur la radio, par ailleurs, le film enchaine les hommages, on en notera notamment un au Mean Streets de Martin Scorsese au travers d'une scène d'anthologie, cette scène ou Harvey Keitel danse complètement à poil, complètement bourré sur exactement la même musique sur laquelle il avait dansé (habillé cette fois) dans Mean Streets en 1973. Ici vraiment grandiose, Harvey Keitel enchaine les punchlines (en témoigne ma bannière flashy.), par ailleurs, le film est très bien écrit, même si malheureusement on note quelques problèmes de construction puisque Bad Lieutenant est loin d'être dépourvu de longueurs, longueurs compensée par une subversion à toute épreuve.

BL2
Car c'est la que se trouve tout l'interêt de Bad Lieutenant, qui comme je l'ai dit est loin d'être divertissant, dans sa charge subversive et sa propension à brosser le spectateur à rebrousse-poil, ici, Harvey Keitel est un flic pourri oui mais pas un flic pourri comme on en voit d'habitude, ici il joue un flic pourri qui abuse sexuellement de jeunes filles, qui vole de la cocaïne des cadavres de criminels, drogué jusqu'aux oreilles (d'ailleurs à ce titre, la consommation de drogues d'Harvey Keitel est réélle dans le film, je vous l'avais dit, ce mec est fou.) mais surtout c'est un flic pourri qui dans des élans hallucinatoires traite Jésus d'enculé dans un monologue d'anthologie... Ah oui alors évidemment à ce moment-là on comprend tous pourquoi Bad Lieutenant à été coupé dans certains pays, attention toucher à la religion c'est pas bien... Mais Abel Ferrara, s'il n'est pas un excellent réalisateur à une chose que peu de réalisateurs ont : des grosses couilles, alors il s'en fout, il le fait quand même, livrant une critique acerbe de la religion chrétienne au travers de cette nonne qui pardonne ses violeurs de l'avoir volé alors que le Lieutenant n'arrive pas à trouver le pardon... Subversif à mort, la se trouve tout l'interêt de Bad Lieutenant, film couillu à mort, faisant de Bad Lieutenant un film, à défaut d'être divertissant, intéréssant pour sa charge subversive et le jeu d'acteur d'un des meilleurs acteurs de tous les temps... D'ailleurs bon pour une fois je vais être gentil avec Ferrara, sans avoir vu ses films force est de constater qu'en jetant un oeil au casting de ces derniers le bonhomme à vraiment l'oeil pour trouver des acteurs principaux qui déchirent... Christopher Walken, Harvey Keitel... Des acteurs tous plus mortels les uns que les autres, ici on saluera la prestation du grand Keitel et le côté hardcore de ce Bad Lieutenant, son ambiance glaucque et sa subversion.

BL3I
Alors en somme, si Bad Lieutenant est très loin d'être divertissant ou agréable à regarder, c'est un film à voir pour sa démarche couillue, pour sa subversion et Harvey Keitel... Loin d'être un chef d'oeuvre, Bad Lieutenant demeure une tuerie, un film à voir, même si c'est clairement le genre de films qu'on aime, ou pas, il faut tenter pour se faire un avis, certains se feront chier royalement et d'autres seront charmés par la subversion du film : c'est plus mon cas. Je ne saurai trop vous le conseiller, à vous de voir, personnellement j'adore, et j'espère que si vous décidez de le mater vous adorerez aussi! Sinon le Bad Lieutenant risque de vous exploser la gueule :P

-ZE RING-

23 mai 2011

POUR UNE POIGNÉE DE DOLLARS

POURUNEPOIGNEE1
RÉALISATION
| SERGIO LEONE
ECRITURE | SERGIO LEONE,
à partir du film Yojimbo, le garde du corps d'Akira Kurosawa.
MUSIQUE | ENNIO MORRICONE

CLINT EASTWOOD | Joe
MARIANNE KOCH | Marisol
GIAN MARIA VOLONTÉ | Ramón Rojo

POURUNEPOIGNEE4


Nous sommes en 1964. Les westerns américains affluent, John Wayne passe des mois dans le désert et bute des salauds d'indiens à tour de bras, le tout sans tacher sa chemise. C'est à ce moment-là qu'arrive Pour une poignée de dollars, présentant des personnages mal rasés, mal fringués, solitaires, égoïstes, à la gachette facile et avides d'argent. Les femmes y sont traitées comme de la merde et le film est bercé dans une violence discrète mais belle et bien présente la ou elle était complètement absente chez les films de notre "ami" John 'Marion' Wayne (et oui les amis, pour ceux qui ne le savaient pas, avant de prendre le nom terriblement viril de John Wayne, ce dernier s'appelait Marion Robert Morrison... Le pauvre.), bref c'est une vision bien plus réaliste de la vie dans l'Ouest que nous offre ce qui est reconnu comme le premier grand western spaghetti. Et oui, Sergio Leone, considéré comme le meilleur réalisateur de westerns spaghettis de tous les temps (et c'est certainement pas moi qui vais dire le contraire.), est aussi le précurseur du genre, et si l'on ne remerciera jamais assez celui-ci pour ses oeuvres mais aussi pour celles qu'il a engendré comme les géniaux Django et Companeros de Sergio Corbucci, il ne faut pas oublier qu'il y a un revers à cette médaille. En effet, pour faire son film, Sergio Leone s'est simplement contenté de reprendre le Yojimbo d'Akira Kurosawa (que je n'ai pas encore vu) et de le porter dans l'Ouest. Bien évidemment, il y a toujours la touche du maitre Leone mais le problème est bien la : du coup, voila quand certains abrutis viennent me dire que Django est un vulgaire copier-coller de Pour une poignée de dollars, je leur répondrais que, non seulement ils pètent portnawak puisque l'univers de Corbucci est bien plus hardcore, mais qu'en plus ce n'est que justice partant du principe que Leone à lui-même ouvertement plagié Kurosawa.
Malgré tout, force est de constater que ce plagia est largement excusé. D'une part pour la vague de westerns spaghettis géniaux que Leone à engendré, de l'autre, parce que dans son plagia, Leone à tout de même révélé plusieurs personnalités majeures du 7ème art : Clint Eastwood, qui, je le rappelle, jouait dans des séries télés pourries avant ça, Ennio Morricone, un des plus grands compositeurs de tous les temps, mais aussi Gian Maria Volonté, un des plus grands acteurs italiens. Moi des plagias comme ça, j'en veux tous les jours... Mais venons-en au film, car c'est bien ça qui nous intéresse, alors Pour une poignée de dollars, qu'en est-il?

POURUNEPOIGNEE5
Pour une poignée de dollars est une véritable leçon de cinéma. En terme de rythme, d'acteurs, de personnages, de dialogues, de musique et surtout de mise en scène, tout est bon dans ce film. Pourtant à bien des égards Pour une poignée de dollars est très certainement le moins bon film de Sergio Leone (je n'ai jamais vu ses deux péplums et personnellement ça me branche pas particulièrement.) et la raison à cela est simple : le film est loin d'être aussi complet, profond et surtout aussi épique que les autres crus du monsieur, faisant de Pour une poignée de dollars un film majeur dans le sens ou Sergio Leone, pour la première fois se déchaine et lance une vague incroyable de westerns, mais un film mineur sur sa filmographie dans le sens ou par la suite ses autres films feront oublier ce dernier... A tort? Certainement pas, car la comparaison avec les autres films de Leone est inévitable tant la ressemblance entre ses 3 premiers westerns (La trilogie du dollar, pour les incultes, aussi appelée la trilogie de l'homme sans nom) est frappante et tant ceux-ci atomisent 150 fois ce premier opus, mais en soit peu importe puisque malgré les comparaisons Pour une poignée de dollars demeure un western de très bonne facture et un pur plaisir filmique, la raison? Sergio Leone maitrise en tous points son film et plus particulièrement sa mise en scène, livrant un western spaghetti stylisé et épique, imposant toutes les trademarks qu'on lui connait, utilisant la force du regard de ses acteurs comme personne, livrant des gros plans purement et simplement magnifiques (voir les deux images au-dessus), chaque plan est étudié dans les moindres détails faisant de Pour une poignée de dollars un film techniquement parfait (mais c'est une habitude avec Sergio Leone), et puis par sa mise en scène et son montage, Sergio Leone livre tout de même quelques passages d'anthologie (une autre habitude de Sergio Leone.) comme ce duel final inventif, long et épique, porté par la partition d'un des plus grands génie de la musique cinéma... J'ai nommé Ennio Morricone.

POURUNEPOIGNEE2
La partition du monsieur, qui va même plus loin que le film lui-même, illustre à merveille les moments épiques de ce dernier tout comme le caractère de ses personnages, personnages portés par des acteurs au charisme incroyable, je pense bien évidemment à Clint Eastwood (à mes yeux, le meilleur acteur de western, derrière Franco Nero et Lee Van Cleef.) mais aussi au rare mais génial Gian Maria Volonté, grand acteur qui eut un succès tellement fou suite à ce film que Melville l'a engagé pour jouer le rôle de Vogel dans son Cercle Rouge! Ces deux acteurs interprètent à merveille leur personnage, deux bad mother fuckers en puissance qui se battent pour le profit, et si l'un des deux, à un moment donné, agira dans un pur élan de vertu, c'est leur nature purement égoiste qui prime et qui en font des personnages solitaires et taciturnes, les deux éléments qui font des personnages de western spaghetti les personnages les plus classes de la planète, personnages que Sergio Leone prend du temps pour développer plus en profondeur malheureusement le principal problème de Pour une poignée de dollars est la puisque le film va bien trop vite pour donner une véritable profondeur et une véritable identité à des personnages qui n'en ont à la base aucune, et si l'interprétation, le charisme des acteurs et les dialogues génialissimes sont la pour cacher ce défaut, reste que ce défaut est bien la et que l'on sent suite à la vision du film un véritable manque de relief chez des personnages qui ont pourtant tout pour rester dans les esprits! Heureusement, les prochains films de Leone palieront à ce défaut et de loin, puisque Il était une fois en amérique est l'un des films les plus complets qu'il m'ait été donné de voir.

POURUNEPOIGNEE3
Alors voila en somme Pour une poignée de dollars est un excellent premier western spaghetti pour Leone. Très bien interprété, très bien écrit, très bien structuré, magnifiquement illustré musicalement et doté d'une mise en scène touché par la grace, il souffre malheureusement d'un manque de profondeur chez ses personnages... Mais bon, avec un aussi beau duel final, on ferme les yeux la-dessus. A voir pour quiconque cherche à approfondir sa culture western, pour les fans de Sergio Leone et pour tous ceux qui n'ont vu que les westerns du gros Marion!

-ZE RING-

25 novembre 2011

THE KING OF NEW YORK

KONY JAQUETTE
RÉALISÉ PAR | ABEL FERRARA.
ÉCRIT PAR | NICOLAS ST. JOHN.
MUSIQUE COMPOSÉE PAR | JOE DELIA.

CHRISTOPHER WALKEN | Frank White.
DAVID CARUSO | Dennis Gilley.
LAURENCE FISHBURNE | Jimmy Jump.
VICTOR ARGO | Roy Bishop.
WESLEY SNIPES | Thomas Flanigan.
JANET JULIAN | Jennifer.

Frank White (Christopher Walken), un gros bonnet du traffic de drogue, sort de prison. Afin de reprendre le contrôle du traffic de drogue à New York, il décide d'éliminer la concurrence.

KONY 1


Abel Ferrara est considéré par beaucoup comme un des plus grands réalisateurs des années 90. Son DRILLER KILLER à une réputation de film culte, son BAD LIEUTENANT, bien que très controversé, est beaucoup apprécié et à même donné lieu à un très bon remake (bien qu'a l'opposé de l'original), NOS FUNÉRAILLES, bien que très rare, est considéré un peu partout comme un chef d'oeuvre et finalement, KING OF NEW YORK, traine derrière lui une réputation absolument cultissime. Abel Ferrara ne m'avait jamais réellement touché jusqu'a présent : j'ai détesté DRILLER KILLER (qu'il faudrait que je revoie) et j'ai beaucoup aimé BAD LIEUTENANT mais certainement pas autant que je l'aurai voulu... Mais il faut être clair, avec KING OF NEW YORK, Ferrara tape à tout autre niveau. Sans tourner autour du pot, KING OF NEW YORK est un chef d'oeuvre, ni plus ni moins, EXPLICATIONS.

KONY 2

Partant d'un pitch de base qu'on a tous déja vu mille fois, KING OF NEW YORK s'avère dès le départ surprenant puisqu'au lieu de glorifier les flics et de donner une vision noire des gangsters qu'il présente, Ferrara réalise un film construit sur la base inverse. Frank White, véritable Robin des bois des temps modernes, apparait très clairement, et ce dès le départ, comme un gangster aux ambitions nobles et honorables, un meurtrier certes mais qui suit un chemin criminel dans le seul but d'aider son prochain. Ferrara, très vite, fait se heurter ce personnage abusivement glorifié aux policiers, bad mother fuckers aux méthodes violentes et sans réelles limites morales. Il faut être honnête : il faut des couilles pour faire ce genre de choses, or Ferrara le fait, et ce sans même le nuancer ou tenter de le cacher. Un peu comme avec BAD LIEUTENANT, Ferrara balance un bon gros coup de savate dans les valeurs morales de notre société et en glorifiant à outrance un personnage qui ne devrait pas l'être, signe le portrait d'un personnage finalement attachant, chose qu'il ne devrait pas être également... Pourtant tout s'embrique avec cohérence et efficacité et ce malgré l'espèce de "paradoxe moral" que Ferrara et St. John s'amusent à construire avec ce KING OF NEW YORK.

KONY 3
Bien évidemment, ce scénario aux bases subversives est largement soutenu par son casting incroyable. Christopher Walken, comme à son habitude, éclipse tous les autres à chaque apparition, mais on retrouve également un Victor Argo absolument excellent, un Lawrence Fishburne qui en fait des tonnes mais dont l'interprétation correspond parfaitement au personnage, mais également Wesley Snipes, David Caruso et Paul Calderon, tous sont géniaux dans leurs rôles respectifs et donnent vie à leurs personnages. Le casting de KING OF NEW YORK est impressionnant, toutefois Ferrara ne cède pas à la facilité et ne laisse pas ses acteurs tenir son film, au contraire, puisqu'il signe un film techniquement très réussi, donnant libre cours par moment à des idées visuelles dingues, à un éclairage complètement barjo mais surtout, comme à son habitude, il prend un soin tout particulier à l'installation d'une ambiance glauque et dérangeante, toujours sous l'influence évidente d'oeuvres comme SÉRIE NOIRE bien qu'il parvienne ici à s'en détacher.

KONY 4

La maitrise technique de Ferrara s'avère surtout utile lorsque ce dernier commence à balancer des scènes d'action dantesques toutes les cinq minutes, en effet, sous ses apparences de drame subversif, KING OF NEW YORK se révèle très vite être en réalité un gros polar d'action bien bourrin, qui, s'il n'oublie pas de développer son histoire et son sujet, laisse une place assez étonnante aux scènes d'action. Difficile par moments de se dire que c'est le réalisateur de DRILLER KILLER derrière la caméra, tant KING OF NEW YORK par son rythme et ses scènes d'action ressemble à peu près à tout sauf ce à quoi on s'attendait, le traitement de Ferrara s'avère en effet très surprenant en plus d'être de grande qualité, à défaut d'être virtuose. Chaque scène d'action fait oublier la précédente et Ferrara stylise chaque moment de violence pour le rendre chaque fois plus fort et plus percutant, procédé dont la force est parfaitement illustrée par une exécution au canon scié brève mais qui constitue un réel sommet de violence et d'intensité qui vous laissera le cul... Et ce n'est qu'un exemple parmi tant d'autres!

KONY 5

Servi par un rythme haletant, KING OF NEW YORK s'avère également être une oeuvre méchamment tendue, un clash ultra-violent entre deux camps que le scénario de St. John retranscrit avec brio par des dialogues subtils mais également jouissifs, interprétés avec brio par Christopher Walken, ici au meilleur de sa forme, jouant Frank White comme si sa vie en dépendait et balancant des punchlines explosives avec une classe pas possible, c'est bien simple, il trouve ici un de ses meilleurs rôles, et au vu de l'étendue du talent du bonhomme, cela me semble assez révélateur de la qualité de son interprétation. Le tout donne un film véritablement irréprochable, explosif, glauque, subversif et puissant. Un pur chef d'oeuvre en somme, un grand classique que tout cinéphile qui se respecte se doit de voir et ce malgré son côté jusqu'au boutiste méchamment appuyé... Si je dois admettre que Ferrara ne me semblait pas être un grand réalisateur, la vision de ce KING OF NEW YORK à profondément changé mon opinion à ce sujet : ce mec est un putain de fou dangereux, certes capable du pire comme du meilleur, mais dont les meilleurs, de ce que j'ai vu, valent clairement la peine d'être vus.

KONY 5 2

Si vous avez aimé ce film, vous aimerez aussi...

-ZE RING-


KONY 6

7 avril 2013

L'EXORCISTE CHINOIS

Titre
RÉALISÉ PAR ... SAMMO HUNG.
PRODUIT PAR ... RAYMOND CHOW.
ÉCRIT PAR ... SAMMO HUNG & HUANG YING.

LORSQUE CHEUNG LE BRAVE APPREND QUE SA FEMME LE TROMPE, IL DEVIENT OBSÉDÉ PAR L'IDÉE DE TROUVER AVEC QUI ELLE LE COCUFIE. CE DERNIER, QUI N'EST AUTRE QUE LE PATRON DE CHEUNG, LE CRAINT, ET DÉCIDE D'EMPLOYER UN "FATSI", UN EXORCISTE, POUR L'ÉLIMINER.


perso1 perso2perso3 perso4


Qui ne connait pas Sammo Hung? Encore aujourd'hui, il est une des figures les plus iconiques et les plus représentatives du cinéma hong-kongais. Acteur de grand talent, cascadeur et artiste martial aux capacités aussi incroyables que déconcertantes, personnage charismatique et singulièrement attachant, c'est un homme dont le talent à rayonné à travers le monde, notamment grâce à ses collaborations avec le tout aussi célèbre Jackie Chan... On pense notamment aux mythiques LE MARIN DES MERS DE CHINE 1 & 2, ou encore à DRAGONS FOREVER, tous trois des films renommés et cultes à travers le monde, et dont le rayonnement, encore aujourd'hui, illumine le cinéma. Une chose est sure : toute la troupe à Sammo Hung, Jackie Chan, Yuen Biao, Ricky Lau... ont indéniablement laissé une empreinte bien singulière sur le cinéma contemporain, et dans l'histoire du cinéma hong-kongais, ils sont aussi importants que les artistes de la colonie britannique les plus reconnus, comme les inévitables John Woo et Tsui Hark. Pourtant, malgré cette célébrité, on tend très souvent à oublier que si Sammo est un grand acteur, cascadeur et artiste martial, il est aussi et surtout un grand réalisateur, dont le talent technique et visuel n'a rien à envier à celui d'un Jackie Chan, dont la folie narrative égale largement celle d'un Tsui Hark et dont le talent comique est absolument incroyable. Lorsqu'en 1977, il réalise LE MOINE D'ACIER, son premier film, il aide à fonder un genre hong-kongais très important : la Kung-Fu Comedy. Après diverses expérimentations autour du genre, Sammo se décide, en 1980, à passer à la vitesse supérieure avec L'EXORCISTE CHINOIS.

76
Film fondateur de la Ghost Kung-Fu Comedy, le genre deviendra à Hong Kong très vite extrêmement populaire, notamment grâce à la saga culte des MISTER VAMPIRE, réalisé par Ricky Lau et, sans surprises, produite de bout en bout par le grand Sammo Hung. Si le succès et la popularité du genre est indéniable à Hong Kong, celui-ci ne vivra pas longtemps, puisque L'EXORCISTE CHINOIS 2, réalisé par Ricky Lau en 1990, mettra fin brutalement au rayonnement aussi vif que bref et complètement inattendu du genre. Peu importe finalement, puisqu'au-delà de son succès commercial, L'EXORCISTE CHINOIS est avant tout un succès artistique en tous points indéniable... Petit rappel : en 1979, Tsui Hark lance la nouvelle vague hong-kongaise avec le magnifique THE BUTTERFLY MURDERS. Les ambitions du mouvement sont très simples : révolutionner le cinéma hong-kongais, y apporter du neuf et ressusciter des genres depuis longtemps essoufflés par une industrie cinématographique trop rigide. Si L'EXORCISTE CHINOIS ne fait pas à proprement parler partie du mouvement, c'est bien étonnant, puisque leurs démarches se rejoignent complètement : Sammo, en créant à partir de rien un genre authentiquement nouveau, livre une oeuvre originale, innovante et unique dans lesquels s'oeuvre un dynamitage en règle de tous les codes cinématographiques imaginables. Les règles établies, L'EXORCISTE CHINOIS les bouleverse complètement et avec une telle audace qu'il apparait immédiatement comme une oeuvre absolument unique, qui ne ressemble à aucune autre et qui révolutionne en profondeur la place et l'usage du fantastique et de l'irréél dans le cinéma hong-kongais, jusqu'alors peu exploité, le public hong-kongais étant à l'époque aussi conservateur que superstitieux... C'est donc une chose étrange que le succès éclair de L'EXORCISTE CHINOIS, qui est d'autant plus étrange que le film est maintenant presque complètement oublié, et pourtant... Quel chef d'oeuvre.

64
Autant être clair d'entrée de jeu : L'EXORCISTE CHINOIS est un grand film qui regorge de qualités diverses, à commencer, justement, par la manière dont il détourne et bouscule les codes établis du cinéma pour acquérir sa propre identité cinématographique... Outre la folie totale du mélange entre la comédie, le fantastique, et le film de kung-fu, le parti pris par Sammo Hung est d'autant plus intéréssant et fascinant qu'il parvient réellement à donner forme à son film de sorte à ce que les genres cohabitent sans jamais se heurter, et sans jamais causer des problèmes de cohérence narratives ou visuelles... En ce sens, L'EXORCISTE CHINOIS préfigure largement le chef d'oeuvre absolu du maître, le magnifique PEDICAB DRIVER, puisqu'il se montre facilement capable de passer d'un genre à un autre, d'une tonalité dramatique à un ton plus comique en l'espace d'un plan ou deux sans jamais entacher la cohérence du film... Un prodige quand on sait que même les plus grands se sont heurtés parfois à la difficulté de mélanger les genres et de jouer avec les codes. Il parait évident à la vision du film que plutôt que d'essayer d'adapter son sujet à son dynamitage des codes, Sammo dynamite les codes uniquement parce que son sujet le lui permet. Ainsi, à plusieurs reprises, L'EXORCISTE CHINOIS enchaine une scène tétanisante et effrayante avec une scène hilarante, burlesque et cocasse, et y mêle parfois même du kung-fu et de l'action... Mais à la différence de beaucoup, Sammo sait sur quel pied danser, et son film devient donc très vite une mine de sensations pour son spectateur qui est, par contre, complètement déconcerté par le spectacle inoui et unique qui se développe sous ses yeux. Sa maîtrise des codes ne serait toutefois rien si Sammo n'avait pas de quoi suivre derrière, et s'il fait preuve d'une capacité incroyable pour détourner et s'affranchir des règles du cinéma, il se montre également capable d'appliquer sa maîtrise de ces dernières... L'intérêt ici est donc moins le fait que Sammo parvienne à enchainer une scène d'horreur avec une scène burlesque, mais plutôt qu'il arrive à faire marcher l'ensemble sans que la scène burlesque ne prenne le pas sur la tension nerveuse de la précédente ou inversement. Un peu comme Tsui Hark, me direz-vous?

38
Certes, sauf que même Tsui Hark n'a réussi que rarement à atteindre une alchimie aussi parfaite entre les genres et les registres que Sammo Hung avec son PEDICAB DRIVER ou L'EXORCISTE CHINOIS, et en l'occurence, la formule marche d'autant plus que ce dernier brise constamment les attentes du spectateur... Ainsi, si L'EXORCISTE CHINOIS est bel et bien un film de kung-fu, celui-ci n'arrive véritablement qu'assez tard dans l'intrigue, qui laisse davantage de place au fantastique et au burlesque des situations présentées par la narration qu'aux combats spectaculaires qu'on a l'habitude de voir chez un artiste comme Sammo Hung. Pari risqué, puisque procéder ainsi, c'est prendre le risque de larguer la moitié du public, et s'il y a toujours quelques exceptions, force est de constater que c'était un risque qui valait le coup d'être pris, puisque cela permet au film de pousser encore plus loin son délire narratif novateur et foutraque. Le résultat, c'est que lorsque les combats auxquels on s'attend face à un tel film arrivent enfin au sein de l'intrigue, la surprise est de taille puisqu'ils ne ressemblent à rien à ce qui a été fait avant (ou après, à part L'EXORCISTE CHINOIS 2, bien évidemment). Sans trop en dire, les combats ont constamment lieu sur plusieurs dimensions différentes, et Sammo promène pendant ses bastons virtuoses le spectateur dans des espaces et des situations aussi diverses que multiples... Le tout, au fur et à mesure que le film avance, devient inévitablement de plus en plus foutraque, de plus en plus inventif et de plus en plus fou, mais chaque combat, chaque situation reste d'une lisibilité et d'une limpidité incroyable. Le mérite de cela revient indéniablement à la mise en scène de Sammo Hung, qui trouve ici des aboutissements absolument incroyables et renvoie aux plus grands : longues prises, gestions de l'espace complètement virtuose, et esthétique naturaliste sublime constituent la mise en forme de L'EXORCISTE CHINOIS... Cela paraîtra surprenant à bien des gens, mais oui, Sammo Hung, tout comme son ami Jackie Chan, est bel et bien un grand metteur en scène, et L'EXORCISTE CHINOIS en est la preuve absolue et indéniable.

79
Il n'y a qu'a voir les quelques scènes d'action du film pour s'en convaincre : celles-ci sont chorégraphiées de manière complexe et l'action est rendue d'autant plus difficile à capturer qu'elle se passe toujours sur au moins deux dimensions spatiales complètement différentes et distinctes, mais Sammo Hung, grâce à sa caméra, la rend toujours lisible. Mieux encore : il la transcende et la magnifie... Chaque coup, chaque sort du "fatsi" est rendu encore plus brutal par la mise en scène de Sammo, et leurs impacts sur le spectateur s'en voient multipliés... Mais si la mise en scène est excellente, les chorégraphies, elles, sont à tomber par terre, et certaines des scènes d'action de L'EXORCISTE CHINOIS figurent parmi les mieux chorégraphiées du cinéma hong-kongais... Inventives, celles-ci sont puissamment rythmées et font preuve d'une folie visuelle constante. A travers celles-ci, Sammo Hung fait preuve et étalage de ses talents martiaux avec brio, et comme si cela ne suffisait pas, il livre également ici une grande performance d'acteur, composant avec consistance et intensité son personnage, donnant du rythme et de l'impact aux scènes les plus humouristiques du film et servant constamment, par son charisme polyvalent, la tonalité complètement lunatique du film. Les autres acteurs ne sont néanmoins pas en reste, et on retrouve ici une figure iconique et inévitable du cinéma hong-kongais. Je parle bien évidemment du grand Lam Ching-Ying, acteur décédé trop tôt, mais qui livra de grandes performances dans plusieurs films majeurs de la colonie britannique et s'imposa comme un grand acteur très vite... Comme à son habitude, il est, dans L'EXORCISTE CHINOIS, absolument excellent. Derrière ces deux géants, on retrouve toute une galerie de seconds couteaux tous aussi intéréssants les uns que les autres, et au final, la seule ombre au prestigieux tableau de L'EXORCISTE CHINOIS reste ce choix douteux d'avoir piqué quelques morceaux de la bande-son de THE SHINING pour illustrer un film tellement réussi esthétiquement qu'il n'en avait pas forcément besoin.

88
Vous m'aurez compris : L'EXORCISTE CHINOIS est un indispensable. Véritable chef d'oeuvre, c'est un film qui bouleverse complètement les règles établies de la production cinématographique hong-kongaise et s'extirpe du format pré-établi par cette dernière au travers d'idées visuelles et narratives dont la folie furieuse n'a d'égal que la virtuosité de leur application. Sammo Hung est un aussi brillant acteur, artiste martial, et cascadeur qu'il est un talentueux scénariste et réalisateur, et par conséquent, au travers de sa mise en scène, il se montre ici capable pendant une heure et demi, de produire une alchimie des genres et des registres parfaite à bien des égards, constamment efficace et cohérente en regard du film... Oeuvre transgressive et subversive, L'EXORCISTE CHINOIS s'impose surtout en tant que divertissement de grande qualité : drôle, généreux, mais aussi effrayant et perturbant, c'est un film complètement lunatique et audacieux qui s'impose dès les premières images comme un très grand film, mais aussi comme une oeuvre d'une importance cruciale. A découvrir d'urgence!

CLIQUEZ ICI POUR ACCÉDER A LA GALERIE COMPLETE DU FILM.

52

SI VOUS AVEZ AIMÉ CE FILM, VOUS AIMEREZ AUSSI...

  • L'EXORCISTE CHINOIS 2 DE RICKY LAU.
  • PEDICAB DRIVER DE SAMMO HUNG.
  • HISTOIRES DE CANNIBALES DE TSUI HARK.
  • THE SWORD DE PATRICK TAM.

-ZE RING-

35

23 novembre 2012

SUSPIRIA

jaq
RÉALISÉ PAR | DARIO ARGENTO.
ÉCRIT PAR | DARIO ARGENTO, DARIA NICOLODI A PARTIR DE L'OEUVRE DE THOMAS DE QUINCEY.
MUSIQUE COMPOSÉE PAR | GOBLIN.

JESSICA HARPER | Suzy Benner.
ALIDA VALLI | Miss Tanner.
STEFANIA CASINI | Sara.

59


Inutile de passer par quatre chemins : SUSPIRIA est ce que l'horreur européenne a produit de mieux. Il est pourtant rare qu'un film soit authentiquement parfait, mais avec SUSPIRIA, nous tenons véritablement une petite perfection, un chef d'oeuvre qui n'a d'égal dans le genre que les oeuvres les plus exceptionnelles qui l'ont façonné... SUSPIRIA se range dès les premiers instants dans les meilleurs films d'horreurs jamais faits, ce qui est d'autant plus éloquent lorsqu'on sait que c'est un genre qui a été le terrain de prédilection de nombreux auteurs talentueux l'ayant utilisé pour y poursuivre expérimentations visuelles et narratives et avancées cinématographiques... Parmi ceux-ci, on compte bien évidemment John Carpenter, George A. Romero, Lucio Fulci, mais aussi et surtout Dario Argento, pionnier du cinéma d'horreur italien, qui inventa tout avant tout le monde et façonna presque à lui seul l'horreur telle qu'on la connaît aujourd'hui. Et si la fin de carrière du monsieur est loin d'être aussi magnifique (c'est le cas de le dire), il est bon de se rappeler qu'il maestro a révolutionné au moins par trois fois le cinéma d'horreur contemporain : une fois avec PROFONDO ROSSO, une autre avec INFERNO, et pour finir, et pas des moindres, avec ce qui est à son jour son chef d'oeuvre absolu (et c'est pas prêt de changer) : SUSPIRIA.

2
Dès les premières minutes du film, il devient très clair que nous sommes face à une oeuvre qui atteint un niveau de perfection visuelle et auditive que rarement une oeuvre d'art a atteint avant. Ce n'est en rien éxagérer que de dire que SUSPIRIA est certainement l'un des plus beaux films jamais réalisés, tant chaque plan est une preuve supplémentaire du soin visuel incroyable apporté au film dans sa globalité... Impossible de ne pas voir l'influence du baroque et du maniérisme, mais Argento pousse ses influences tellement loin et tellement fort qu'il les détourne pour finalement rendre la grandiloquence et l'exubérance encore plus grandiloquente et exubérante qu'auparavant... Tout respire l'artifice dans ce film, pour notre plus grand plaisir, tant chaque plan, par ses éclairages rouges-bleus-verts complètement surréalistes, ses décors démesurés, colorés et imposants, ou même par le mouvement de caméra délirant qui le constitue, s'avère être un plaisir visuel d'une grande intensité. Vous l'aurez compris, la grande force de SUSPIRIA, c'est avant tout ses visuels, tous plus magnifiques les uns que les autres, tous prouvant encore plus à chaque instant la maîtrise incomparable d'un grand réalisateur au sommet de son art. Celui-ci, d'ailleurs, n'oublie jamais une seconde que des visuels ne suffisent jamais à faire un film, aussi beaux soient-ils, et se rappelle constamment de les utiliser dans un but précis, c'est-à-dire constituer une ambiance superbe, tantôt angoissante, tantôt onirique et poétique mais toujours surréaliste au possible. Dans SUSPIRIA, l'ambiance est étouffante, mais paradoxalement, chaque nouvel effet de lumière, chaque nouveau décor, constitue une bouchée d'air frais. En effet, SUSPIRIA est avant toute chose une oeuvre novatrice, qui réinvente constamment le genre par son visuel et redéfinit les standards qui le constitue toutes les dix secondes. Pour preuve, après 1977, seuls les très grands maîtres, tels que Carpenter (et encore), parviendront à se défaire de l'influence inévitable de la pièce maîtresse d'Argento, qui, avant d'être une expérience sensorielle incroyable, s'avère surtout être une leçon de cinéma d'une importance qui peut constamment être mesurée. Il n'y a qu'a voir les oeuvres, pourtant très récentes, de l'excellent James Wan (en particulier DEAD SILENCE) pour se convaincre que SUSPIRIA est une oeuvre capitale, sans laquelle le cinéma contemporain ne serait sans doute pas le même et dont l'influence peut encore être mesurée aujourd'hui.

43
Malgré cette influence, SUSPIRIA, dans son domaine, reste quasiment insurpassée. La raison est simple et explique également pourquoi Argento n'a jamais retrouvé le même niveau de génie par la suite, c'est parce qu'il a versé dans ce film tout son génie et tout son savoir faire. Le résultat est puissant : SUSPIRIA se range tout simplement dans les films à l'atmosphère la plus géniale. Celle-ci remue les sens, et ceci n'englobe pas seulement la vue mais aussi (et plus particulièrement) l'ouïe, mise à l'épreuve maintes fois pendant les 90 minutes de bobine mais se régale également constamment. Au-delà de la sublime bande-son des Goblin, que tout le monde connaît déja probablement par coeur, il y a dans SUSPIRIA un véritable travail sur le son, constamment surprenant mais surtout dérangeant et effrayant, qui s'avère d'autant plus efficace qu'il est perpétuellement en symbiose avec les visuels du film. C'est le principal aspect de SUSPIRIA qui en fait une des oeuvres les plus effrayantes de tous les temps : chaque scène de flippe s'avère en effet d'autant plus tétanisante que l'intelligence des visuels est souvent renforcée par une musique complètement surréaliste aux élans de barbarie et de terreur incroyables... Le tout s'avère une fois de plus d'autant plus efficace qu'il est doublé par la maîtrise du suspense incroyable d'Argento, qui, à ce niveau, s'inspire comme à son habitude du meilleur (à savoir Hitchcock, dont l'influence sur le cinéma d'horreur italien n'est plus à prouver.) pour produire le meilleur... A ce titre, il y a dans SUSPIRIA plusieurs des scènes les plus tendues et les plus tétanisantes qu'il m'ait été donné de voir. Celles-ci le sont encore plus une fois que l'on en arrive à la crystallisation de toutes les peurs accumulées pendant le film : cela donne lieu a l'un des climax les plus intenses et les plus flippants vus dans un film d'horreur, d'autant plus fort qu'il atteint un sommet d'inventivité incroyable et finit de faire définitivement de SUSPIRIA une oeuvre universelle.

54
En effet, aussi artificielle soit elle, la mise en scène de SUSPIRIA va bien au-dela de la vacuité et de la prétention que l'on pourrait facilement lui attribuer. Réalisateur maniériste en soi, Argento en fait constamment des tonnes certes mais toujours dans une optique précise, et ici, son traitement grandiloquent de son histoire s'inscrit dans une méthode de traitement très précise de l'histoire. En effet, Argento détourne habilement cette histoire, typique des conte de fées classiques (impossible de ne pas voir en la très mignonne Jessica Harper une représentation moderne de la fée), en l'inscrivant dès le départ dans une esthétique surréaliste et étrange. Ce n'est pas un hasard si cette esthétique ne quitte jamais les murs de l'école de danse ou se passe la majorité du film, mais bien parce que celle-ci est le berceau de toute cette magie propre aux contes de fées... Dès lors qu'on entre dans les murs de cet endroit maudit, SUSPIRIA prend une portée universelle, dans la mesure ou par son traitement surprenant du conte de fée traditionnel, il touchera tout le monde et restera dans la mémoire de tous... Dès lors que les sorcières oublient leurs pommes empoisonnées et décident d'employer des cadavres pour faire leur basse besogne, vous savez que vous êtes en train de regarder un conte de fée d'un genre nouveau. C'est une vision macabre d'oeuvres traditionnelles, qui, si elle laisse de la place à l'innocence et a la beauté (en témoigne son actrice principale), n'a aucune limite morale. Ici, la violence est tout aussi inventive qu'elle est atroce, et les personnages sont constamment sujet à un sadisme effrayant, qui en plus d'être inattendu, n'est pas toujours la ou on le croit et dépasse très largement les scènes de meurtre qui font le coeur de tout film d'horreur...

8
La ou SUSPIRIA inspire le respect, c'est également dans sa narration. Celle-ci est exceptionnelle dans la mesure ou l'histoire ne fait qu'un avec le reste du film. Les dialogues sont ici secondaires : c'est par la mise en scène et les visuels qu'Argento raconte son histoire, d'une simplicité exemplaire qui nécessitait un tel traitement pour demeurer intriguante. Il est à ce titre assez surprenant de constater que la narration est aussi maitrisée que la mise en scène, et en laissant cette dernière s'occuper de la majeure partie de l'histoire à elle toute seule, Argento laisse paradoxalement une encore plus grande place à l'intrigue. Cette banale histoire de sorcières préserve alors un sens du mystère exceptionnel et est intriguante du début à la fin... Si ce serait mentir que de dire qu'elle reste toujours imprévisible, tant les visuels sont évocateurs, et ce dès le début, de ce que l'on va voir, l'histoire de ce SUSPIRIA reste prenante et immersive, et demeure suffisamment intriguante pour garder le spectateur sur les nerfs pendant une heure et demi. Le tout est d'autant plus exceptionnel que les réponses souhaitées ne sont jamais réellement apportées, pour notre plus grand plaisir, tant cela laisse de place à l'interprétation et à l'imagination, qui ici joue également un rôle important dans la réception de la peur. En effet, ce qui fait de SUSPIRIA un film si terrifiant, c'est que la peur y est constamment invisible : on ne sait jamais d'ou elle va sortir, ni quand, ni comment, et rien ne peut être prévu. La démarche est d'autant plus prodigieuse qu'elle fonctionne pendant l'intégralité du film et gagne même en intensité au fur et à mesure que celui-ci avance. SUSPIRIA est terrifiant, et cela se voit sur le visage des actrices, qui n'y vont pas de main morte et se donnent corps et âme a leurs performances, et apportent un dernier atout de taille à ce qui est l'un des plus grands films des années 70.

25
SUSPIRIA est un film exceptionnel, mais c'est également, et surtout, un film d'une importante majeure qui a réinventé de bout en bout un genre alors à son apogée et qui continue d'influencer de nombreux cinéastes, encore aujourd'hui. En même temps, qu'y a t-il d'étonnant, face à cette démonstration de maîtrise et de beauté visuelle? SUSPIRIA est une oeuvre aussi novatrice et originale qu'elle est magnifique pour la vue et l'ouïe, et en plus, elle se range très facilement parmi les films les plus terrifiants jamais réalisés. Au-delà de l'investissement évident de Dario Argento dans ce film, on sent aussi un véritable génie dans la création d'ambiance et dans la narration. Toutes deux sont exceptionnelles et reposent constamment l'une sur l'autre, menant à une symbiose incroyable entre ce qui est vu et ce qui est raconté, qui se confondent aussi pour renforcer l'immersion auprès du spectateur, le prendre encore plus au dépourvu et lui envoyer un uppercut a travers la tronche d'autant plus fort qu'il est alors bien plus terrifiant et puissant. SUSPIRIA est une oeuvre majeure, autant d'un point de vue historique qu'artistique. C'est un chef d'oeuvre que seuls les très grands maîtres de l'horreur peuvent se vanter d'avoir surpassé, et encore. C'est le chef d'oeuvre de Dario Argento, c'est indiscutable, et si vous êtes encore la à lire cette critique, c'est que vous n'avez rien compris... Si vous n'avez jamais vu SUSPIRIA, vous n'avez rien vu.

CLIQUEZ ICI POUR ACCÉDER A LA GALERIE COMPLETE DU FILM

45
SI VOUS AVEZ AIMÉ CE FILM, VOUS AIMEREZ AUSSI...

-ZE RING-

57

3 mars 2011

L'AU-DELA

BEYOND1

Réalisé par Lucio Fulci en 1981.
Ecrit par Lucio Fulci, Dardano Sacchetti et Giorgio Mariuzzo.
Avec Catriona MacColl, David Warbeck et Cinzia Monreale.
Musique composée par Fabio Frizzi.

Extrait de la bande-son du film par Fabio Frizzi, un des seuls mecs à pouvoir rendre un bontempi épique :

Première incursion du cinéma d'exploitation italien sur le blog avec ce qui est à ce jour un de mes films préférés par un réalisateur que j'aime de plus en plus, un véritable pilier du cinéma d'exploitation italien, un des plus grands cinéastes d'horreur de l'histoire, j'ai nommé Lucio Fulci, à qui je rend hommage aujourd'hui avec cette critique de L'au-dela, oeuvre majeure autant dans sa filmographie que dans le cinéma en général. Pour rappel et pour apprendre à ceux qui ne savent pas ce qu'est le cinéma d'exploitation, le cinéma d'exploitation à pour but d'exploiter un filon : ce sont donc des films basés sur d'autres films à succès (L'enfer des Zombies de Lucio Fulci est un parfait exemple, nommé Zombi 2 par la production en Italie histoire de surfer sur le succès de Zombie de George A. Romero), généralement tournés le plus vite possible et avec peu de moyens, d'ou l'utilisation de doublages (afin de minimiser le temps de tournage) et la parfois piètre qualité des effets, mais le cinéma d'exploitation est également un regroupement de genre très divers : bikesploitation, blaxploitation, nazisploitation, cannibalsploitation et j'en passe, toutefois aussi kitsch et mauvais un film d'exploitation puisse paraitre à première vue, le cinéma d'exploitation comporte le pire (eelsolivier pourra sans doute vous parler plus en détail de Bruno Mattéi.) comme le meilleur, toutefois il faut se rappeler que bon nombre d'avancées cinématographiques se sont faites grâce au cinéma d'exploitation, bref, soyez surs d'une chose, c'est que ces temps-ci sur Ze Lord of the Ring, de l'exploitation vous allez en bouffer, car le blog prend désormais une autre orientation : désormais je compte davantage chroniquer des films moins connus afin de vous les faire découvrir, j'espère que ça vous intéressera et que l'aspect cheap, kitsch, naze à première vue des prochaines productions chroniquées ne vous fera pas fuir... ;) Quoiqu'il en soit, comme je le disais, le cinoche d'exploitation comporte le pire comme le meilleur, en l'occurence ce L'au-dela se rapproche plus du meilleur que du pire car il faut être clair : en 1981, malgré toutes les faiblesses du film, Lucio Fulci signe un véritable chef d'oeuvre.

BEYOND2
S'ouvrant d'entrée de jeu sur une séquence de torture choc extrêmement dérangeante, L'au-dela donne directement le ton, toutefois si Lucio Fulci est connu pour son usage abusif et outrancier d'effets gores complètement surréalistes, nous préférons dans L'au-dela, qui pour rappel est le troisième segment de la trilogie des zombies du monsieur (les deux premiers sont L'enfer des zombies et Frayeurs, pour ceux qui ne le savaient pas déja.), l'ambiance et l'atmosphère onirique du métrage, car si L'au-dela et très loin d'être démuni de défaut, généralement ceux-ci sont rattrapés par une ambiance sombre mais aussi très apaisante, ambiance apaisante qui disparait lors de tueries d'une rare intensité et surtout d'une crédibilité rare pour un film de ce budget, en témoigne cette scène d'ouverture ou un personnage secondaire du récit mais qui à son importance se fait éclater à coup de chaine puis crucifié et pour finir brulé à la chaux vive, d'un réalisme rare, L'au-dela s'impose comme un film qui à tout pour choquer, mais au fur et à mesure que Fulci fait avancer son film les séquences choc deviennent de plus en plus intense, ainsi on retiendra notamment la mythique scène de l'architecte qui se fait grailler vivant par des araignées, et ce même si les araignées constituent l'exception du film et sont très mal faites (mais en soit, ce sont ces défauts visuels qui font le charme des films tel que L'au-dela.) en passant par l'énucléation de la servante ou la femme bouffée par son chien, L'au-dela avance à un rythme infernal et sacrifie très vite la majorité de ses personnages, dont on ne connait pas grand chose mais qui ne sont pas insipides pour autant, car c'est la que Fulci réussit un coup de maître : basé sur un scénario de base très peu original et résumé en une ligne de dialogue au début, Lucio Fulci parvient malgré tout en une heure et demi à développer son scénario avec brio mais surtout à installer une ambiance glaucquissime, faisant de l'hotel, point central du récit, un personnage à part entière, un peu comme l'hotel de Shining ou la maison de Psychose, un procédé qui en renvoie aux plus grands et qui contribue grandement à la réussite de cette ambiance, et puis réussir à faire un film ultra-gore et en même temps onirique et planant est en soit un exploit, à ce titre, la scène des araignées aussi mal faite soit-elle est à la fois insoutenable et reposante, impossible me direz-vous? Et bien si, Lucio Fulci l'a fait, mais pour faire un truc comme ça il faut être un des plus grands réalisateurs de cinéma de genre italien.

BEYOND3
Mais L'au-dela ne serait rien dans son scénario génialement construit, comme je le disais enchainant les séquences chocs jusqu'a un final perturbant, un bad end en puissance dont vous allez vous souvenir longtemps, final en partie dérangeant grâce à la musique de Fabio Frizzi, absolument excellente, malgré tout c'est aussi dans son scénario que L'au-dela trouve ses premiers défauts, défauts d'ailleurs propres au cinéma d'exploitation, car en effet, les dialogues du film sont très mal écrits, enfin on a vu pire mais on a aussi vu beaucoup mieux, au même titre les acteurs, s'ils affichent un certain charisme sont tous intégralement doublés en anglais, certains pour le mieux, comme par exemple David Warbeck qui livre une prestation ici tout à fait correcte, d'autres pour le pire, ainsi si vous êtes comme moi vous vous rappellerez longtemps du doublage de Joe le plombier, à pisser de rire... Malgré tout ce ne sont que de légers défauts, pour autant qu'on ait pas de la merde dans les yeux et qu'on voit aussi les qualités du film, qui elle, sont beaucoup plus nombreuses, ainsi si L'au-dela est clairement un film qu'on aime ou on déteste du à son aspect gorissime entièrement gratuit, bon nombre de qualités peuvent lui être reconnues, notamment cette ambiance citée plus haut et la construction parfaite du film, et puis bon, ce qui est marrant avec ce genre de film c'est que dans le cas peu probable ou vous aussi vous aimiez partant du principe qu'on doit être une dizaine sur la planète à encore aimer ce genre de films les défauts du film deviennent des qualités et passent parfois même pour de l'auto-dérision...

BEYOND5
Alors voila, David Warbeck tire 12 balles de son revolver 6-coups dans le torse des zombies alors qu'il sait très bien que c'est la tête qu'il faut exploser et recharge ce dernier par le canon le temps d'un plan, mais comment ne pas prendre ça comme de l'auto-dérision ou tout simplement comme une volonté de Fulci de se concentrer sur l'essentiel, c'est-à-dire la mise en scène, domaine dans lequel il brille, et de ne pas se soucier du superflu, en l'occurence ce genre de détails sur lesquels seuls les détracteurs s'acharneront, et les détracteurs de Fulci étaient et sont d'ailleurs toujours légion, d'ailleurs je sais pas pourquoi mais je sens qu'une fois que j'aurai fini cette critique je vais me faire lapider virtuellement par une foule en colère... Mais si je devais résumer L'au-dela de manière concise et rapide, je dirais simplement qu'on tient un chef d'oeuvre oublié, qui équilibre des défauts terriblement lacunaires par une mise en scène et une ambiance hors-norme, évidemment ce n'est pas l'avis de tout le monde et je le conçois largement, maintenant j'attends que les détracteurs me convainquent que L'au-dela est aussi pourri qu'ils le disent, chose que personne n'a réussi à faire depuis que j'ai vu le film. Mais peu importe votre verdict final, en soit, L'au-dela est un film à voir, histoire de se faire un avis...

-Ze Ring-

BEYOND4

1 septembre 2011

BEATRICE CENCI - LIENS D'AMOUR ET DE SANG

BCJAQ

RÉALISÉ PAR | LUCIO FULCI.
ÉCRIT PAR | LUCIO FULCI ET ROBERTO GIANVITI.
PRODUIT PAR | GIORGIO AGLIANI
MUSIQUE COMPOSÉE PAR | ANGELO FRANCESCO LAVAGNINO
ET SILVANO SPADACCINO.

TOMAS MILIAN | Olimpo Calvetti
ADRIENNE LARUSSA | Beatrice Cenci
GEORGES WILSON | Francesco Cenci
MAVIE HÔRBIGER | Lucrezia
ANTONIO CASAGRANDE | Don Giacomo Cenci

A l'époque de l'inquisition, Francesco Cenci (Georges Wilson), un seigneur sanguinaire, terrorise son entourage. Beatrice (Adrienne Larussa), sa fille, tente d'échapper à son père. Se rendant compte des agissements de celle-ci, il décide de l'enfermer au donjon. La jeune femme commence alors un jeu de manipulations afin de se soustraire au joug de son bourreau.

BC1


Attention, baffe intergalactique qui risque de vous envoyer K.O. un bon coup. BEATRICE CENCI est un des Fulci les plus méconnus, au grand dam de ce dernier qui l'a toujours considéré comme son meilleur film. La raison à cela est simple : BEATRICE CENCI est le film le plus extrême du bonhomme, non pas parce que c'est insoutenable visuellement comme on en a l'habitude avec pépé Lucio, mais davantage parce qu'il offre une vision noire de l'humanité et plus particulièrement de la religion qui ne plaira pas à tout le monde, d'ailleurs personne ici ne s'étonnera du scandale qu'a fait BEATRICE CENCI à sa sortie en Italie en 1969, scandale qui à failli mettre un terme à la carrière de Lucio Fulci. Le film ne sortira jamais en salles en France et il faudra attendre des années pour que l'éditeur défunt Néo Publishing, dans sa générosité habituelle, l'édite en DVD (DVD qui est aujourd'hui disponible dans son édition simple pour 2€ sur priceminister), dans une édition qui déchire qui plus est, entièrement non-censurée et d'une belle qualité qui permet à cette perle subversive de faire péter tout son potentiel. BEATRICE CENCI, un scandale oui, mais surtout un chef d'oeuvre et l'oeuvre la plus jusqu'au boutiste d'un des cinéastes les plus jusqu'au boutistes et extrêmes de l'histoire du cinéma. J'ai découvert cette petite perle aujourd'hui et je ne m'en suis pas encore remis : d'une subversion incroyable et d'une rare sauvagerie, BEATRICE CENCI est un des films les plus importants de Lucio Fulci dans le sens ou les bases de la vision noire de l'humanité et de la décadence de cette dernière au travers du sexe (L'ÉVENTREUR DE NEW YORK) ou de la religion (dire le nom auquel je pense serait vous gacher un grand film...) sont ici posées. Fulci, qui à l'époque, n'avait fait que des comédies et un western avec Franco Nero (LE TEMPS DU MASSACRE), surprend tout le monde avec cette oeuvre sans concessions ou la religion catholique s'en prend méchamment la gueule, à partir de cet instant il sera pendant longtemps la tête de turc de critiques visiblement abrutis, c'est dire combien les italiens lui en voulaient...

BC2
La raison de ce scandale, inutile de la chercher. Fulci ne fait pas de détour et va droit au but. Présentant l'Eglise comme de véritables enculés avides de fric, celle-ci s'en prend plein la gueule pendant 1h30 de métrage, en effet, ici il n'y en a pas un qui soit mieux que l'autre, tous sont de véritables enfoirés sans pitié et sans aucun remords tant qu'ils arrivent à leur fins : dans BEATRICE CENCI, les personnages incarnant la religion catholique sont à la fois voleurs, assassin et tortionnaire, en effet BEATRICE CENCI contient son lot de scènes chocs en particulier lorsque celles-ci s'attardent sur les tourments infligés aux personnages principaux. Assez atroces, ces scènes sont d'autant plus difficiles à avaler lorsque les tortionnaires se donnent bonne conscience ("Moins vous serez riche, moins vous commettrez de scélératteries!" Autant dire que ça n'a pas plu à tout le monde...), autant le dire clairement : Fulci n'y va pas par 4 chemins et rend le message de son film très clair, message qu'il sera obligé de transmettre par le biais du cinéma d'exploitation en raison du scandale qu'a causé ce BEATRICE CENCI, ce même message qui atteint son apogée subversive lors d'un final intelligent et qui risque de vous foutre K.O. un petit moment... Evidemment, la subversion du film n'est pas sa seule force et on retrouve ici ce qui fait la force du cinéma de Fulci : premièrement, la photographie est IM-PE-CCABLE, soutenant avec brio des décors magnifiques qui renverraient presque au baroque par moments. Ces décors, au passage sobrement mais superbement éclairés, sont mis en scène par un Fulci au meilleur de sa forme dont on retrouve toutes les trademarks : léger érotisme, une ambiance légèrement onirique également et bien évidemment la violence.

BC3
La violence, si elle est bien présente ici, risque de décevoir les fans de Fulci qui ne se sont pas aventurés du côté de sa période giallo (LA LONGUE NUIT DE L'EXORCISME, LE VENIN DE LA PEUR, L'EMMURÉE VIVANTE...), en effet inutile de vous attendre à du gore grand guignol façon FRAYEURS ou L'AU-DELA, car BEATRICE CENCI, s'il contient son lot de scènes de violence est davantage construit autour d'une violence certes moins impressionnante visuellement mais beaucoup plus forte moralement tant elle ébranle le spectateur émotionnellement : chaque scène de torture, -dont le réel motif, explicité à la fin, risque de vous foutre le blues un bon coup-, fait mal. Fulci joue avec la sensibilité de ses spectateurs en construisant des personnages relativement attachants malgré l'interprétation et l'écriture loin d'être phénoménales, personnages qu'il détruit avec une froideur et une sauvagerie sans précédents lors de scènes de violence brillament orchestrées et mises en scène. En effet, si le film de Fulci ne brille pas par le jeu de ses acteurs (la faute au doublage italien, le seul disponible sur le DVD de Néo... Un doublage anglais aurait sans doute été mieux, puisque ça aurait signifié Tomas Milian avec sa vraie voix!) ni par son écriture (correcte toutefois, faut pas déconner, et suffisamment intelligente pour permettre de véhiculer un propos aussi violent que celui de BEATRICE CENCI.), ses défauts sont rattrapés par le talent de Lucio Fulci à orchestrer nimporte quelle scène avec brio, quelles que soient les circonstances, Fulci livre des plans absolument magnifiques et monte son film avec talent. L'addition de tout cela donne une grande intensité à BEATRICE CENCI et le choix de monter le film dans un ordre non-chronologique s'il peut rebuter est parfaitement justifié et donne un rythme intéréssant au film de Fulci.

BC4
Du côté des acteurs, on retrouve Tomas Milian (COMPANEROS, BRIGADE SPÉCIALE, LA LONGUE NUIT DE L'EXORCISME), doublé en italien malheureusement, ce qui est une hérésie dans la mesure ou ce dernier fait preuve de talents d'acteur considérables lorsqu'il utilise sa vraie voix, mais on retrouve également la assez mauvaise Adrienne Larussa et le pas très bon quand il se met à causer italien mais charismatique et imposant dans le rôle d'un bad mother fucker en puissance Georges Wilson (LA LONGUE NUIT DE L'EXORCISME), dont la carrière en Italie à été plus ou moins florissante en partie grâce à Fulci, mais je m'égare... Tous, s'ils ne brillent pas par des performances sidérantes, font preuve de présence et de charisme et maintiennent suffisamment de niveau dans leur interprétation pour que leurs répliques soient supportables à l'écoute, répliques qui, s'ils ne sont pas brillantes par leur écriture, ont le mérite de toutes faire passer leur message et d'aller droit au but, pour autant Fulci n'utilise jamais une quelconque forme d'écriture informative, bien au contraire, comme à son habitude, c'est la caméra qui parle le plus et c'est davantage sa mise en scène qui est informative, qualité que j'aime beaucoup chez ce cinéaste tant l'écriture informative à tendance à m'agacer...

BC5
A cela se rajoute une ambiance assez étrange, assez glauque que l'on retrouvera dans LA LONGUE NUIT DE L'EXORCISME (LE chef d'oeuvre de Fulci à mes yeux.), ambiance, comme je le disais, servie par des décors impressionnants de beauté et par une musique loin d'être mémorable mais qui illustre suffisamment bien BEATRICE CENCI musicalement... J'entends beaucoup me dire que ca tchatche un peu trop dans ce BEATRICE CENCI, je ne suis pas d'accord une seule seconde... Certes, il y a beaucoup de dialogues mais tous sont utiles à faire avancer un propos pas nécessairement facile à digérer pour tout le monde (Ce film n'est PAS pour les catholiques...) mais qui moi m'a fait violemment plaisir, alors oui peut-être ces scènes de dialogues ont tendance à nuire légèrement au rythme du film à la longue... Mais si ça amène un tel niveau de subversion, on peut pardonner non?

BC6
En somme, BEATRICE CENCI est un chef d'oeuvre, un véritable coup de poing dans la tronche qu'il est difficile d'oublier, certainement un des meilleurs films de Lucio Fulci et sans doute son oeuvre la plus subversive, le bonhomme, sans aucune concession, balance dans la gueule de son pauvre spectateur un message nihiliste au possible : le plus horrible des monstres, c'est nous! BEATRICE CENCI est le premier film d'une oeuvre inégale certes mais tellement passionnante... LUCIO FULCI IS GOD et BEATRICE CENCI est sans doute un de ses meilleurs films, une oeuvre puissante et sombre, à voir donc.

BC7
Si vous aimez ce film, vous aimerez aussi...

  • LA LONGUE NUIT DE L'EXORCISME, deLucio Fulci.
  • LE VENIN DE LA PEUR, deLucio Fulci.
  • L'EMMURÉE VIVANTE, de Lucio Fulci.

 -ZE RING-

BC8

 

3 juillet 2011

BULLET BALLET

BBJAQ

RÉALISATION | SHINYA TSUKAMOTO
ÉCRITURE | SHINYA TSUKAMOTO
MUSIQUE | CHU ISHIKAWA

SHINYA TSUKAMOTO | Goda
KIRINA MANO | Chisato
TATSUYA NAKAMURA | Idei
TAKAHIRO MURASE | Goto

31
Avec Tsukamoto, on s'attend toujours à voir un truc complètement fou, dans la veine d'un TETSUO. Même son film "réaliste", TOKYO FIST, est excessivement violent, voire gore, et, dans sa quête du réalisme, Tsukamoto ne peut s'empêcher de rendre hommage à ce qu'il fait le mieux : la science-fiction. Pourtant, avec BULLET BALLET, Tsukamoto signe non seulement son meilleur film mais il prouve aussi qu'il est capable de faire un film réaliste et crédible, même si tout de même un peu plus barré que la moyenne. Il signe donc un vigilante movie, au scénario à la base simple, voire simpliste mais y apporte sa philosophie nihiliste comme pilier de soutien et signe donc une oeuvre majeure. Cette philosophie, présente dans TETSUO I & II mais aussi dans TOKYO FIST est ici développée et mise en évidence, mieux, Tsukamoto en fait un élément pivotal de son récit, élément scénaristique qui prend tout son sens lors de la toute dernière scène. A grand coup d'ultra-violence et de nihilisme, Tsukamoto signe le film de sa vie, le TAXI DRIVER japonais.

52
C'est donc une oeuvre extrême que livre Shinya Tsukamoto caractérisée par l'usage absolument sensationnel du noir et blanc et une ultra-violence poussée. La subjectivité est donc de mise puisque BULLET BALLET ne s'arrête pas au nihilisme de son propos mais contient une forte dose de violence stylisée et sublime pour qui saura l'apprécier, qui plus est, dans son réalisme, Tsukamoto s'adonne tout de même à quelques dérives, faisant du revolver du personnage principal l'élément pivotal du film, mais filmant celui-ci non pas comme une simple arme mais comme une véritable extension du corps humain, extension du bras comme l'indique certains plans mais aussi une extension phallique. C'est donc le revolver que le personnage principal met si longtemps à trouver le personnage central de ce récit. De la même manière que pour le métal dans TETSUO et la boxe dans TOKYO FIST, l'arme centrale du récit est pour le personnage principal le moyen de parvenir à une nouvelle forme d'existence, une existence par la mort et la douleur, représentée par l'imagerie christique que Tsukamoto utilise souvent dans son oeuvre, en témoigne le premier screenshot de l'article, car qu'y a t-il de plus représentatif de la mort et de la douleur que la crucifixion du Christ? BULLET BALLET est le film le plus complet de Tsukamoto sur sa philosophie nihiliste, puisque non content de la représenter pour la quatrième fois avec brio, il la met en évidence et la charge de symboles très représentatifs tout en livrant une oeuvre stylisée, ainsi, la ou les dernières minutes, cette dernière poussée d'adrénaline pourrait sembler comme une non-fin (une des spécialités de Tsukamoto) c'est en réalité l'aboutissement ultime de cette philosophie nihiliste. Blessés, à moitié morts, les personnages se mettent à courir et ce n'est qu'a ce moment-là qu'ils se rendent compte qu'ils existent et qu'ils vivent. Au travers de cette scène, au passage superbe, Tsukamoto retranscrit toute ses obsessions et résume en 3 minutes toute sa filmographie, c'est simple, BULLET BALLET c'est Shinya Tsukamoto, on retrouve ainsi toutes les obsessions et toutes les caractéristiques des films du bonhomme : le personnage principal est un salarié, écrasé par l'environnement urbain dans lequel il vit, qui entre en contact avec un groupe de gens qui lui permettent de trouver une existence au travers de la douleur. Ici, ce groupe, c'est les jeunes, et le choix de ces derniers n'est pas un hasard dans la mesure ou la jeunesse au Japon est à ce jour un problème majeur (voir KIDS RETURN mais surtout le chef d'oeuvre de Kinji Fukasaku, BATTLE ROYALE), ainsi tout en transposant ses obsessions, Tsukamoto ancre son film dans la réalité et les problèmes de son époque et émet même une opinion dessus : on sent très bien que Tsukamoto hait les jeunes, en témoigne le personnage de Goto, trou du cul agaçant, qui dans la logique de Tsukamoto, à trouvé une existence par la douleur, mais qui tente de s'intégrer dans la société du travail (symbolisée par le costume-cravate, que le personnage principal ne porte jamais... Je doute que ce soit un hasard.) et dans un environnement urbain oppressant, pourtant, Tsukamoto se met du côté de ces jeunes dans leur recherche de la vie dans la mort, en cela, BULLET BALLET s'impose comme un véritable paradoxe qu'il est intéréssant d'étudier pour en comprendre la portée.

26
Avec BULLET BALLET, Tsukamoto travaille sur ses obsessions. Afin de les développer le plus possible, il ne perd pas une seconde et signe une introduction rapide, précise et efficace. En 5 minutes, les deux personnages principaux, l'élément pivotal du film, et tous les enjeux de ce dernier sont posés. Tsukamoto palie donc à ce qui était le plus grand défaut de son TOKYO FIST, le rythme. Ce dernier, ici, carrément infernal, voire par moments frénétique, donne une intensité incroyable à BULLET BALLET, enchainant les scènes qui tuent sans aucun répit et sans aucune concession, en témoigne cette scène ou dans un élan de colère, Goda se fabrique un flingue fait maison et attaque les jeunes qui l'ont racketté 3 minutes avant ou encore cette fusillade finale, déchainement de violence incroyable et monument de mise en scène. Stylisé, BULLET BALLET l'est assurémment, les impacts de sang font couler beaucoup plus de sang qu'ils n'en devraient et en soit, rien que la mise en scène relève de la stylisation : Tsukamoto ne semble toujours pas savoir ce qu'est un plan fixe (et tant mieux!), tout le film est tourné caméra à l'épaule, ce qui permet au réalisateur de cette perle de signer une oeuvre incroyable visuellement, frénétique dans son montage (Tsui Hark serait jaloux...) pleine de pures merveilles visuelles, en témoigne cette scène de "jeu du métro"... Je n'en dis pas plus tant cette scène est surprenante mais sachez simplement qu'avec une caméra et 3 francs Tsukamoto fait mieux en termes d'effets spéciaux que nimporte quel blockbuster hollywoodien. Rajoutez à cela une photographie du tonnerre et un noir et blanc sensationnel et avec BULLET BALLET vous savez que vous tenez une merveille visuelle.

10
Cette merveille visuelle est soutenue par des acteurs absolument incroyables. Inutile de citer Shinya Tsukamoto, qui en plus d'avoir réalisé, monté, écrit et produit BULLET BALLET en tient également le rôle principal. Le bonhomme est criant de crédibilité dans le rôle d'un salarié détruit par le suicide soudain et imprévisible dont la vie prend du sens suite à la rencontre d'une petite "punkette" (merci Jean-Pierre Dionnet pour ce néologisme.) assez provocatrice merveilleusement jouée par Kirina Mano. Et pour continuer sur les acteurs méconnus, Tatsuya Nakamura est étonnant ici, jouant un rôle qui n'est pas sans rappeler Brad Pitt dans FIGHT CLUB, il affiche une gueule assez étrange et des airs limite psychopathes. Quand à Takahiro Murase et les acteurs qui jouent la troupe de jeunes, ils sont tous parfaits dans leurs rôles de trous du cul agaçants et soulignent à merveille la haine que Tsukamoto voue à ces jeunes, la ou Mano et Nakamura créent le paradoxe en donnant vie à des personnages à part qui permettent à Tsukamoto de se ranger de leur côté, paradoxe largement explicité par cette scène ou Goda, son flingue pointé sur Goto, le petit jeune, crie "Je ne m'en servirai pas contre vous"...Réplique très représentative du paradoxe dont Tsukamoto est victime.

44
En parlant de répliques, Tsukamoto, en plus d'être un grand réalisateur, monteur et acteur, est également un grand scénariste... BULLET BALLET est une merveille d'écriture, que ce soit dans la structure de son scénario ou ses dialogues. Comme à son habitude, Tsukamoto préfère dire ce qu'il à a dire par sa mise en scène davantage que par les dialogues, il est donc très difficile de trouver des répliques inutiles, toutes font avancer le scénario et permettent à Tsukamoto de développer ses obsessions très explicitement, pour autant le bonhomme n'oublie pas de faire un film et livre avec BULLET BALLET un véritable modèle de construction dramatique. Celle-ci, en crescendo, est très efficace. Tsukamoto construit sa tension dramatique avec brio jusqu'a une explosion finale de violence qui marquera les esprits dans la mesure ou sa brutalité, en plus d'être inattendue est également marquée d'un certain suspense, ainsi cette fusillade finale, avant l'explosion de violence qui à mes yeux la caractérise, est l'occasion pour Tsukamoto de se servir de son ambiance sonore pour installer une tension nerveuse. Jouant sur les nerfs du spectateur avec l'aide de bruits les plus incongrus les uns que les autres, jouant sur le sursaut et sur l'obscurité de son décor, Tsukamoto se montre avec BULLET BALLET capable non seulement de livrer une oeuvre frénétique mais aussi de jouer sur des registres plus subtils comme le suspense, et inutile de dire que pour moi, l'essai est tout à fait réussi.

49
Pour finir, BULLET BALLET est soutenue par une musique absolument incroyable de Chu Ishikawa, le seul mec au monde capable de rendre la noise music agréable à l'écoute, qui, non content de livrer une zik incroyablement bourrine livre également dans les derniers instants de cette oeuvre une musique plus calme et agréable, apaisante, ainsi tous ceux qui connaissent un minimum ce compositeur seront surpris à l'écoute de la musique finale de ce film... Film qui pour moi à marqué un tournant puisque vous l'aurez compris, je l'adule. Il s'agit à ce jour d'un de mes 10 films préférés et si tout le monde ne partagera pas mon engouement, je tenais quand même à le préciser.

28
BULLET BALLET
est un putain de chef d'oeuvre intergalactique. A voir absolument. Malheureusement voila, trouver le film est assez difficile. Une chose est sure : vous ne le trouverez JAMAIS sur le commerce. Mais le film est disponible dans une édition qui déchire, une édition Asian Classics, un coffret qui contient deux films, ce BULLET BALLET évidemment mais aussi le génialissime TOKYO FIST de Tsukamoto, évidemment avec ces deux films il y a beaucoup de bonus : une présentation des deux films par le légendaire Jean-Pierre Dionnet, des interviews de Shinya Tsukamoto, des bandes-annonces et un livret collector détaillant et expliquant les deux oeuvres génialissimes contenues dans le coffret. Malheureusement une telle édition vient avec un prix et est donc assez cher... Mais il est sans doute possible de le trouver sur priceminister.com pour un prix convenable. Au passage, les fanas de la VF seront surpris... Car aucun des films de Tsukamoto, et je dis bien AUCUN, n'a été doublé en français... Et tant mieux!

CLIQUEZ ICI POUR ACCÉDER A LA GALERIE COMPLETE DU FILM

37
-ZE RING-

003

25 août 2010

RESERVOIR DOGS

RD01

Un film de Quentin Tarantino, réalisé en 1992.
Avec Harvey Keitel, Steve Buscemi, Michael Madsen, Laurence Tierney, Chris Penn et Tim Roth.

Après un hold-up raté, une bande de truands règle les comptes pour savoir lequel d'entre eux les à trahis.

Tous ceux qui ont vu Reservoir Dogs savent que ce film désormais culte est très loin de briller par son scénario mais plutôt par la façon dont celui-ci amené et dont Quentin Tarantino, dont c'est à l'époque le premier film, laisse planer un certain mystère sur l'histoire et ne révèle ses personnages, brillamment incarnés par de grands acteurs (Harvey Keitel, Michael Madsen entre autres, ainsi que Chris Penn, malheureusement décédé en 2006... RIP.) campant le rôle de voleurs professionnels portant chacun le nom d'une couleur, dont le plan tourne mal et règlent leurs comptes (et ce pendant presque tout le film) dans une seule et même pièce sur fond de musique des 70's. Grand film à dialogue (en effet, on parle de Tarantino à l'ancienne la, dans Reservoir Dogs, pas de bataille rangées entre 40 yakuzas et une blonde sanguinaire), dès les premiers moments, le spectateur sait à quoi il doit s'attendre : un film de gangsters classe, avec des acteurs géniaux et crédibles de bout en bout et surtout à 1 heure et demi particulièrement violente, et je peux vous assurer que sur ce dernier point, vous allez en avoir pour votre argent, car même si les scènes de violence ne sont pas légion dans le film, elles ont un impact très important. La violence, cependant, ne vient ici pas d'images absolument atroces et intenables mais du fait que les personnages sont décrits comme complètement humains et peuvent mourir en un clin d'œil, et ce style de violence continuera à être utilisé dans les films de Tarantino, alors que la plupart des films ont tendance à toujours les faire se comporter en héros avant leur mise à mort. Par ailleurs, Reservoir Dogs se fait dès le départ sa propre identité, identité que Pulp Fiction adoptera deux ans après, grâce à son montage atypique.

RD02
Les gangsters les plus classes de la planète.

Si l'on pourrait reprocher à Reservoir Dogs quelques petits défauts tels que le fait que les personnages de Quentin Tarantino et Eddie Bunker soient sous-exploités (pour ne pas dire jamais, cela dit le choix de ne presque jamais les faire apparaitre est complètement justifié) ou son scenario simple bien qu'assez original dans son déroulement (puisque la plupart des films traitant du sujet parlent de la préparation du casse, ici, c'est tout à fait le contraire), il serait dommage de s'attarder sur les minces défauts de cette perle qu'est Reservoir Dogs. Reservoir Dogs, en plus d'inspirer le respect de par l'histoire de sa création (qui à été tumultueuse, mais sachez simplement que le film n'aurait jamais existé sans le grand Harvey Keitel), inspire davantage le respect de par la manière dont les choses se passent à l'écran. Bien que 90% du film soit constitué de dialogues complètement banaux et, sortis du film, terriblement chiant malgré quelques répliques cultes, des acteurs survoltés leurs donnent vie, notamment Harvey Keitel, dans le rôle d'un "honorable" se sentant obligé d'aider le personnage de Tim Roth, blessé tout le long du film et prenant le personnage de Michael Madsen, un psychopathe, comme responsable principal de l'échec du casse, alors qu'en réalité (SPOILER) le problème vient de Mr. Orange, flic infiltré et qui se rapprochera de Mr. White, notamment en apprenant son nom & son origine, et qui finira par se faire tuer par ce dernier lors d'un aveu final violent après qu'il ait pris sa défense en tuant tous les autres membres du gang, qui le soupçonnaient d'être la balance. (FIN DU SPOILER)

Avec Reservoir Dogs, Tarantino laisse également supposer à quoi ressembleront ses futurs films, puisque très régulièrement, l'action est interrompue par des flashbacks, qu'il réutilisera dans la quasi-totalité de ses autres films, en plus de flashforwards de manière plus occasionnelle. Cela permet de s'attarder sur les personnages principaux du film, d'en découvrir leur tempérament de manière plus précise et de découvrir leur personnalité, parfois difficile à cerner. Ou alors, ils permettent d'expliquer plus en détail une révélation qui vient d'être faite au spectateur, tout ça, dans le seul but d'immerger ce dernier dans l'action et de l'en faire ressortir qu'au lancement du générique de fin. En effet, le script de Reservoir Dogs est très bien foutu et les temps morts sont rares voire inexistants, sauf peut-être cette légèrement trop longue séquence d'explication sur les origines de Mr. Orange, pas inutile et tout aussi prenante que le reste du film mais qui a tendance à trainer trop longtemps pour arriver à sa conclusion (SPOILER) LES AMIS, NOUS SOMMES REVENUS AU POINT DE DÉPART (FIN DU SPOILER). Malgré ces quelques scènes qui tendent à trainer, cet infime défaut qui ne nuit pas tant que ça à l'immersion est rattrapé par le jeu des acteurs, le génie derrière la caméra et cette bande son 70's, relax, complètement décalée par rapport au film lui-même, puisque pour être clair, Reservoir Dogs, c'est 1h30 de "partage en couilles" hardcore.

RD03

Un pur chef d'oeuvre donc, même si pour ma part c'est loin d'être le Tarantino que je préfère, mais une belle ébauche de son futur style si particulier qui fera en partie son succès. Un grand film, à voir au moins une fois (je dis au moins, mais depuis que je l'ai reçu hier, je l'ai maté 4 fois, cela dit vous faites ce que vous voulez hein), absolument culte. Par contre, je déconseille très fortement Reservoir Dogs le jeu, à peine digne en terme de qualité de l'adaptation des Dents de la mer. En même temps, je sais pas, mais quand je regarde le film, je vois mal ce qu'il y a d'adaptable à moins de changer tout le scenario... Ce qui fut le cas (jusqu'aux têtes des personnages!!).

-Ze Ring-

 

 

3 février 2011

SEUL CONTRE TOUS

SCTban

Réalisé, produit et écrit par Gaspar Noé en 1998.
Avec Philippe Nahon, Blandine Lenoir et Frankye Pain.

Cet article traite également de Carne, la préquelle à Seul contre tous, réalisé en 1991.

ATTENTION ÂMES SENSIBLES!

Premier film du cinéaste français Gaspar Noé, Carne, en 1991 était un monument en termes de film trash tel que l'on n'en avait pas vu en France depuis longtemps. 7 ans après débarque Seul contre tous, reprenant exactement les mêmes personnages que Carne, notamment ce boucher nihiliste complètement salaud interpreté à la perfection par Philippe Nahon, qui trouve ici ce qui est à ce jour très clairement son meilleur rôle. Carne s'arrêtait sur une touche d'espoir, l'espoir que ce boucher antipathique, véritable enculé au passage, puisse recommencer sa vie... Et Seul contre tous reprend sans cet espoir, dans la crasse qui semble entourer tous les films de Noé, et la ou Carne étonnait déja par son côté trash et ultra-violent, Seul contre tous lui va encore plus loin dans un trip hallucinogène qui prend ses bases dans les bas-fonds, suivant de très près ce boucher, jusqu'au point de retranscrire toutes ses pensées à l'écran par une voix-off qui montre une fois de plus que Gaspar Noé est clairement un des cinéastes les plus fous de notre temps... Sortant 15 punchlines par minute, Nahon signe une prestation comme on en voit rarement, s'appropriant le rôle avec un charisme et une classe incroyable, affichant une gueule de cinéma comme ça fait plaisir d'en voir dans ce Seul contre tous, récit de l'histoire d'un boucher nihiliste ayant des sentiments troubles pour sa fille unique... Retour sur un grand classique du cinéma français, un film extrêmement subversif et clairement le plus couillu que Noé ait pu réaliser en termes de subversion.

SCT

Gaspar Noé est un réalisateur qui ne brosse personne dans le sens du poil. Certains aimeront ou certains n'aimeront pas, de la même manière que certains réalisateurs hardcore tels que Lucio Fulci ou Ruggero Deodato, toutefois, Seul contre tous  est le plus exagéré en la matière en cela qu'il n'a même pas le côté "grand cinéma" présent dans Irréversible ou Enter The Void... Ceux qui ont été traumatisés par le trip psychédélique et le côté épileptique de ces derniers peuvent se jeter sur ce Seul contre tous sans peur de perdre leurs yeux, toutefois c'est à un film très lent et terriblement dérangeant qu'ils regarderont, faisant beaucoup penser à Stanley Kubrick dans sa propension à afficher des plans ou les actions s'effectuent à un rythme très réaliste et ou il ne semble parfois rien se passer, "référence" sans aucun doute volontaire car il ne faut pas oublier que Kubrick est le réalisateur préféré de Noé... Toutefois, la ou Kubrick est parfois très chiant, Noé ne l'est pas une seule seconde, compensant son manque d'action par une voix-off prononcée par Philippe Nahon, très perturbante, violente moralement et surtout subversive, car la est le but de Seul contre tous, déranger et bouger le spectateur de sa zone de comfort, pour cela, Gaspar Noé fait appel à sa voix-off et surtout à une ambiguité terrible. En effet, Seul contre tous à pour personnage principal un boucher nihiliste, raciste, le fils caché de Le Pen en somme, toutefois, Gaspar Noé ne dénonce rien. Pour autant, il n'appuie pas sa thèse, préférant laisser une analyse plus fouillée d'un scénario en somme très simple et contrairement à Irréversible moins favorable à l'analyse. Gaspar Noé laisse au soin du spectateur d'interpréter ses intentions comme il le souhaite, en cela, Seul contre tous est terriblement dérangeant, seulement cela ne se limite pas à l'aspect moral. Visuellement, le film est également un calvaire, ainsi si il n'y a pas cette caméra rotative et ces effets de lumières hallucinants présents dans les métrages suivants de Noé, le film se morfond dans un visuel cradingue (à ce titre, les screens sont moches en partie parce que la photographie du film est volontairement "vieille") et dans une violence visuelle terriblement crue (la vache, on s'en rappellera encore dans 10 ans de la scène de fin).

SCT2

Rajoutez à cela des prestations d'acteurs elles aussi très neutres, bien que terriblement géniales, Philippe Nahon en tête, et des personnages tous aussi crades et cons les uns que les autres et vous tenez un film à polémique. Pour autant, aussi méchant et bourrin soit-il, Seul contre tous dispose d'une réalisation et d'un sens du cadre très soigné complété par un casting de mochetés comme on en à jamais vu, d'une ambiance très spéciale et surtout de très bonnes idées : que dire de cette percussion, terriblement dérangeante puisque systématiquement elle fait sursauter quiconque est attentif au film, renvoyant encore une fois à Kubrick qui utilisait le même procédé en fin de chaque musique de The Shining? (mais je vais peut-être chercher loin, enfin dans tous les cas vous avez compris ce que je voulais dire.) Seul contre tous, non content d'être un des films les plus trashs vus sur un écran (moralement du moins) se permet en plus d'être terriblement subversif, mais que serait le film sans ses acteurs? Car en soit, si dans nimporte quel film, la réalisation à une part importante, un film tel que Seul contre tous repose majoritairement sur ses acteurs et laissez-moi vous dire une chose, c'est qu'ils ne sont pas en reste, ainsi si la plupart feront un peu de la peine à côté de Philippe Nahon, ils incarnent pour la plupart de manière très crédibles les connards qu'ils incarnent en particulier Frankye Pain, qui joue une véritable sangsue, une merde à pattes qui finira très mal. Le seul personnage "bon" dans tout ça est la fille du boucher, jouée par Blandine Lenoir, handicapée mentale et qui ne prononce pas un mot du film, mais surtout symbole de l'espoir dans ce Seul contre tous, car si les films de Gaspar Noé sont terriblement trashs et perturbants, il y a toujours une dose d'espoir, espoir toujours representé par un enfant. Seul contre tous ne fait pas défaut à cette "tradition" et c'est dans l'amour qu'il porte à sa fille que le boucher trouve l'espoir pour continuer, ainsi, et même si le personnage est un véritable enculé, il trouve l'espoir à travers une scène très émouvante dont vous vous en souviendrez, croyez-moi.

SCT3

 

Si je devais résumer Seul contre tous en quelques lignes, je dirai simplement que c'est un film FRANCAIS couillu... Qui ne plaira certainement pas à tout le monde mais qui vaut l'expérience, pour la bonne et simple raison que Gaspar Noé s'essaye à chaque film à un style très différent... Mais ça reste toujours aussi trash et aussi fou, toujours aussi violent moralement et anti-conventionnel, rien que pour cela, Gaspar Noé mérite le respect éternel, signant un film ultra-violent dont le but est clairement de diviser le public, une oeuvre polémique en somme, une belle baffe dans la gueule que pour ma part je reprends avec plaisir : ce n'est pas le cas de tout le monde et je le conçois, mais Seul contre tous est une expérience à faire, très clairement, du moment que vous n'êtes pas dérangé outre-mesure par des propos outranciers ou que vous êtes habitués à ce que tous les films ne vous brossent pas dans le sens du poil...

-Ze Ring-

2 avril 2011

STRAW DOGS

SDJAQ
RÉALISÉ PAR | SAM PECKINPAH
.
ÉCRIT PAR | SAM PECKINPAH
ET DAVID ZELAG GOODMAN.
MUSIQUE COMPOSÉE PAR | JERRY FIELDING
.

DUSTIN HOFFMAN | David Sumner.
SUSAN GEORGE |
Amy Sumner.
PETER VAUGHAN |
Tom Hedden.
DEL HENNEY |
Charlie Venner.

David Sumner (Dustin Hoffman) et sa femme Amy (Susan George) quittent New York pour vivre en Angleterre. Ils font alors face à une hostilité inattendue de la part des habitants locaux.

5


-Cet article révèle un certain nombre d'éléments sur l'intrigue-

Les chiens de paille est un film de fou. Longtemps censuré dans certaines contrées du monde en raison d'une ultra-violence époustouflante, -marque de fabrique de Sam Peckinpah-, et d'une scène de viol difficilement soutenable... Surtout pour ça en fait, je ne pense pas être le seul à avoir remarqué que bon nombre des films qui provoquent scandale contiennent des scènes de viol : Orange mécanique, IЯЯƎVƎЯSIBLƎ, Day of The Woman... Ce ne sont que des exemples parmi tant d'autres et Chiens de paille n'est qu'un exemple de plus pour appuyer ma pensée, et qu'est-ce que c'est ma pensée? Que la majorité des gens sont des abrutis qui s'excitent, crient au scandale dès qu'ils voient une bite sur leur écran et qui portent des jugements hatifs sans porter la moindre réflexion a ce qu'ils viennent de voir... Certains sont même allés jusqu'a considérer Chiens de paille comme un film fasciste... Ce qu'il faut pas entendre, partant du principe que le film est plus une réflexion sur l'homme, ses aspects sauvages et la dislocation de la famille, mais j'y reviendrai plus tard promis! Bon nombre de choses sont à dire sur ce qui est à mes yeux le meilleur des 3 films de Peckinpah que j'ai pu voir, les deux autres étant La horde sauvage et Apportez-moi la tête d'Alfredo Garcia et je peux vous dire que 3 films suffisent largement pour se rendre compte du talent du bonhomme et de la qualité globale de sa filmographie, mais je m'égare!

1

Ainsi lorsque le maitre du ralenti et des scènes d'action cracra Sam Peckinpah s'attaque à un Rio Bravo-like, ce n'est que pour plus ou moins abandonner le côté slow-motion de son oeuvre et s'attarder sur une violence rarement vue au cinéma : que ce soit cette scène de viol, ou tout le final dans la maison assiégée des Sumners, Chiens de paille est un monument de violence, percutante, un film qui verse également dans le glaucque le plus extrême. Brillament mis en scène, Chiens de paille, en plus d'être un monument de violence, balancant des images dont le spectateur se souviendra longtemps, est également un monument de suspense, on pense à ce final de 25 minutes ou Dustin Hoffman tente tant bien que mal de retenir ses agresseurs ou la tension est à son maximum, Sam Peckinpah prouve une fois de plus qu'il avait tout compris au cinéma et signe, à partir d'un postulat de base vu 550 000 fois, un véritable chef d'oeuvre, il signe un film à l'image de sa filmographie : surprenant, atypique, violent, crade, provocateur et surtout irrévérencieux, provocation qui semble avoir abouti puisque tout le scandale autour du film est basé sur une seule et même scène, très ambigue mais aussi difficilement soutenable, celle du viol d'Amy Sumner, jouée avec génie par la méconnue et charmante Susan George (les critères de beauté ont bien changé depuis les 70's mais je vous préviens les gars c'est pas possible de pas tomber amoureux.)... Des viols au cinéma on en a déja vu quelques uns mais il devient beaucoup plus dérangeant lorsque la victime alterne entre supplice et plaisir sexuel, évidemment, il n'en fallait pas plus pour tous les abrutis qui tapent aujourd'hui sur Gaspar Noé pour crier au scandale, ceux-ci n'ont rien compris, ou alors ils n'ont pas vu le film... Car en effet Chiens de paille, s'il brille par sa réalisation, brille davantage par un propos cynique et sombre à souhait et le développement de ses personnages, le film de Peckinpah, entièrement basé sur la relation bancale entre Mr Sumner, joué par le génialissime Dustin Hoffman, et sa petite femme... De la même manière que celle-ci alterne entre la souffrance d'être violée et le plaisir de l'acte sexuel, le jeune couple se voue un amour incroyable pour se taper sur la gueule la scène d'après, la faute au peu d'attention que porte David Sumner à sa femme, faisant de lui le véritable mother fucker de l'histoire, se souciant peu de sa femme et ne changeant d'attitude qu'une fois que c'est trop tard... Par ailleurs, si les paysans sont tous droits sortis de Massacre à la tronçonneuse, jamais on ne les voit s'attaquer directement au couple, certes, ils tuent le shériff, et encore, plus ou moins accidentellement, certes, ils retournent la maison des Sumner et tout dans le film indique que ce sont eux les gros enculés, mais si l'on porte un minimum de réflexion, on se rend vite compte que le véritable méchant de l'histoire est le personnage joué par Hoffman, il suffit de le voir tuer froidement ses agresseurs pour s'en convaincre... Par ailleurs, une grande partie de l'histoire est basée sur une réflexion qui n'est pas sans rappeler le Que la bête meure de Claude Chabrol, réflexion qui porte sur le rapport homme-bête, réflexion dont la question principale vis-à-vis de Chiens de paille est qui est l'homme et qui est la véritable bête : David Sumner est-il l'homme acculé par le groupe de paysans (les bêtes)? Ou alors le David Sumner aimant sa femme lors de certaines scènes est l'homme et le David Sumner qui tue froidement tout le monde la véritable bête? Une question à laquelle je vous laisse la réponse même si pour ma part il est clair que Sumner oscille entre un côté humain et un côté animal et bestial qui prend le contrôle de lui à la fin du film, bestialité symbolisée par ce plan sur les lunettes brisées de Sumner, c'est en réalité l'humanité et le pacifisme qu'on attribue au personnage au début du film qui est ici représenté comme brisé.

8

En plus de proposer une réflexion plus qu'intéréssante, Chiens de paille est un film extrêmement intéréssant de par la construction de son scénario et aussi par ses dialogues et les types qui les interprètent, alors évidemment, une bonne partie des acteurs fait pale figure à côté du génie de Dustin Hoffman (un des plus grands acteurs de sa génération, génialissime même quand il fait des films de merde.), force est de constater que Susan George livre une bonne prestation également, pour ce qui est des paysans : ils font flipper!! Et puis, les dialogues sont génialement écrits, même chose pour le film qui est génialement construit : lent, mais sans aucune longueur et surtout viscéral à mort, Peckinpah fait ici encore moins dans la dentelle que d'habitude, montrant la violence autant qu'il le peut (sauf pour sa scène de viol ou c'est la suggestion qui est dérangeante ici, je pense notamment à tous les flashbacks que subit le personnage d'Amy après cette scène qui sont particulièrement affreux.), donnant à ses personnages des morts toutes plus atroces les unes que les autres (je pense qu'on se rappelera tous du passage ou Sumner jette de l'huile bouillante sur ses agresseurs, pas particulièrement éprouvant visuellement mais inventif il faut l'avouer.), bref, Chiens de paille est scénaristiquement une réussite, un film éprouvant et beaucoup seront ceux à lacher un soupir lorsque le générique de fin du film commencera, porté par les notes de l'ici très discret mais génial Jerry Fielding.

3

Que dire d'autre de ce Chiens de paille? Et bien rien de plus si ce n'est que le fait que Peckinpah ait ici décidé d'abandonner en partie les ralentis à outrance qui le définissent (et qui définiront plus tard John Woo, qui je le rappelle, prend Sam Peckinpah et Jean-Pierre Melville comme influences principales, décidément, c'est un homme de gout le John!!) est très loin de nuire au chef d'oeuvre qu'est Chiens de paille, un film d'une telle qualité que j'ai beaucoup de mal à comprendre comment il ait pu tomber dans les oubliettes cinématographiques... Percutant, intelligent, génialement mis en scène et scénarisé, Les chiens de paille est un chef d'oeuvre, un grand moment de cinéma et si tout le monde ne supportera pas le côté violent de l'oeuvre de Sam Peckinpah, force est de constater que le film est une date, un film culte... Et la je vais dire qui ne plaira pas à tout le monde, mais c'est certainement un des meilleurs films de sa catégorie, bien meilleur à mes yeux que le déja génial Orange mécanique de Stanley Kubrick. Un film à voir et à revoir.

-ZE RING-

11
 
Publicité
Publicité
<< < 1 2 3 4 5 > >>
Publicité